La laïcité, qu’ailleurs on nous envie un peu comme notre système de protection sociale, est donc actuellement en débat dans notre pays. Pour certains presque un combat ! Ce principe fondamental, garant de la liberté de conscience et de culte, ne devrait être ni un instrument, ni un épouvantail. Grâce à la laïcité, les religions sont en France en sécurité. Pour autant et même si le sujet est récurrent, il n’est pas illégitime d’en débattre encore car une grande religion, l’Islam, s’est installée récemment dans notre pays. Y a-t-elle trouvé toute sa place ? L’a lui a-t-on laissée ? J’ai aimé l’image des religions rassemblées manifestant leur fraternité.

En 2003, Jacques Chirac avait fait les choses en grand, en public, à la télé, confiant la laïcité à la fameuse Commission Stasi. Sans céder à la pression populaire, évitant l’écueil de la stigmatisation d’une religion, invitant l’ensemble des Français à prendre part à un débat interactif, durant près de six mois, pas moins de 20 personnalités dont je faisais partie, ont planché. À la baguette, un homme de valeurs, un homme de consensus, oserais-je le dire, un homme de confiance : Bernard Stasi, alors Médiateur de la République, auquel je veux aujourd’hui rendre hommage.

C’était les débuts de la démocratie participative. Quelques 140 représentants de la société civile, des partis politiques et des instances religieuses, ont été auditionnés par des experts ou sachants incontestables, au-dessus des partis et des religions, tels René Remond, Régis Debray, Maurice Quénet, Alain Touraine, Mohammed Arkoun, Gilles Kepel, Marceau Long, Raymond Soubie…

Au terme de passionnants travaux, le rapport aux multiples préconisations remis au Président de la République, n’est pas resté sans suite. Il a notamment, chacun le sait, conduit à la promulgation de la loi interdisant le port de signes religieux ostentatoires à l’école. Mais il aurait du permettre d’aller beaucoup plus loin, d’aller au bout du raisonnement, de prendre suffisamment de mesures, qui auraient évité notamment qu’à peine 1 000 burka monopolisent un temps l’actualité et le législateur…

Certainement par prudence ou par frilosité, peut être par manque de courage politique, toutes les réponses n’ont pas été apportées à des questions à nouveau et inévitablement posées aujourd’hui. Puisque le vin est servi, restons autour de la table pour que cette fois, du débat ne jaillissent pas que des idées ou des préconisations mais des décisions.

Et pour veiller à leur application, je dirais même à leur exécution, comme je l’avais à l’époque suggéré, mettons en place cet Observatoire de la Laïcité (créé par un énième décret non appliqué du 25 mars 2007), placé sous l’autorité du Premier ministre, pour alerter les Français et les pouvoirs publics des risques de dérive ou d’atteinte à ce principe essentiel. Cet observatoire ne sera ni une association bien pensante, ni une nouvelle structure bureaucratique mais bien une autorité indépendante des partis et des religions. Elle aurait un rôle d’anticipation, de régulation et d’intervention.

C’est la laïcité à la Stasi qui nous permettra de toujours revendiquer, avec fierté, notre attachement à cette exception à la française, une laïcité bien ordonnée…

Par Nicole Guedj, ancien ministre et membre de la Commission Stasi

4 Commentaires

  1. L’idée d’un observatoire de la laïcité, indépendant des religions et des partis politiques me parait docile, la France devrait, à mon avis, se départir de ce laïcisme moribond, et pourquoi pas assumer sa chrétienté dans la tolérance des autres religions présentes sur la scène sociale.

  2. L’acronyme excluant et ostentatoire d’un Parti Chrétien-Démocrate pourrait-il faire l’objet d’une plainte auprès de l’Observatoire de la Laïcité?

  3. Défendre une commission sur la laïcité?!
    Pourquoi faire? Ne stigmatise-t-on pas assez les musulmans en France?