Projection hier soir au cinéma saint-Germain des Près de l’Espoir de Malraux.
Le film est admirable. La salle est bouleversée. Bernard-Henri Lévy commente, met en perspective avec éloquence.
La guerre d’Espagne, soixante dix ans plus tard, nous blesse encore.
L’Espoir le montre image après image, plan après plan : il y eut, certes, les aviateurs de l’escadrille Espana, créée et conduite par Malraux dès l’été 1936, et d’autres à sa suite ; mais ce fut, tout autant, la guerre de tout un peuple. Une guerre de paysans, d’ouvriers, de mineurs, d’intellectuels, qui, tous ensemble, se défendirent les armes à la main et souvent sans armes ou presque, contre une armée professionnelle. Ce ne fut pas une guerre de militaires contre d’autres militaires. Ce fut une guerre, totalement inégale, d’un peuple de civils s’improvisant soldats contre une armée fasciste aidée par les corps mécaniques nazis et mussoliniens. Ce fut une épopée tragique, sacrificielle, la geste désespérée d’un peuple sacrifié. Sacrifié par la Non-intervention, puis, sous couvert d’aide fraternelle, par les Staliniens sur place et à Moscou.
Ce fut, ensuite, non seulement la guerre du peuple espagnol, mais aussi la guerre de tous les peuples. Le symbole en furent les Brigades internationales. Pas des soldats, eux aussi, mais des hommes de toutes conditions, de toutes les langues, venus du monde entier combattre le fascisme. Contre la Bête immonde, la mobilisation fut mondiale. Tous les citoyens du monde y participèrent par l’esprit et le cœur. Tous les démocrates du monde eurent l’Espagne au cœur.
L’engagement, la solidarité, la communion furent universels.
Et puis, cette guerre d’Espagne produisit des œuvres, à leur tour, universelles : Guernica de Picasso, Pour qui sonne le glas de Hemingway, les photos légendaires de Capa, Terre d’Espagne de Joris Ivens, l’Espoir, le livre et le film, de Malraux, Hommage à la Catalogne de Georges Orwell, Les grands cimetières sous la lune de Bernanos, tant d’autres.
Les artistes, les poètes, les écrivains, les intellectuels du monde entier furent les forces de l’esprit. Et cette guerre de l’esprit, elle, aura été magnifiquement gagnée.
Et puis enfin, et puis surtout, cette première guerre contre le fascisme aura été, et reste, la seule guerre contre le fascisme qui ait été perdue. Malgré le temps, nous n’en sommes toujours pas consolés.
Les guerres contre le fascisme, dont l’Espagne fut le prologue tragique, furent toutes gagnées. Le nazisme, le fascisme italien, leurs épigones d’Europe centrale furent jetés à terre. Franco, ce criminel tranquille et sans relief, que tout le monde donnait pour mort en 1945, leur survécut. Il y eut bel et bien alors une seconde Non-intervention des démocraties occidentales, et le franquisme survécut, criminel et tranquille, jusqu’à la fin des années 70.
Ce furent trente années insupportables.
Pour la génération de nos parents, pour les miens qui vécurent cette guerre et qui soutinrent le peuple espagnol dans son exil en France et accompagnèrent 3.000 Républicains espagnols au Chili, à l’été 1939, pour nous qui vécûmes ces trente années du franquisme, cette plaie, ce cancer tranquille aux portes sud de la France, au flanc même de l’Europe, étaient une souffrance une défaite prolongée qui n’en finissaient pas.
Soixante-dix ans plus tard, la même indignation juvénile nous remplit devant ce scandale historique d’une guerre juste, perdue. Et nous conservons, génération après génération, la même admiration pour ce peuple et ces soldats de la liberté vaincus, mais à jamais magnifiques et glorieux.
Et merci à Malraux.
Honteux oui au point de ne plus vouloir se reconnaitre Espagnol pour certains.
Devant l’ineptie de ce texte, les bras tombent
Espagnol je lis et relis et me pince incrédule
A lire d’urgence Michel del Castillo
Le Temps de Franco pour commencer à comprendre
à peu près ce qui s’est réel et tragiquement passé
Désolé d’être si dur car je lis avec intérêt ce que Gilles Hertzog publie dans votre site
pour des raisons familiales, j’allais très souvent en vieille Castille à partir de 1948… dans le petit village où j’allais, les plaies n’étaient pas refermées et j’entendais des histoires horribles… c’était un temps déraisonnable et honteux.