On n’épiloguera pas sur la pitié (pour la victime), le chagrin (de ses partisans), non plus que sur l’incroyable emballement qui a suivi la fausse nouvelle de la libération de Sakineh. L’essentiel, à ce point, est d’essayer de comprendre : et ce qui s’est réellement passé, et les leçons qu’il est possible, voire nécessaire, d’en tirer.
Première leçon. L’insondable cruauté de ces gens. Ces pauvres photos de Sakineh et de son fils entrés (sous quelle menace hors champ, mais qui crève les yeux?) dans cette mascarade abjecte. La petite maison familiale où on les a fait revenir pour, l’espace de quelques heures, reconstituer un crime dont tout le monde ( à commencer par la Justice iranienne qui a, elle-meme, conclu en ce sens il y a quatre ans) sait que Sakineh ne fut ni l’auteure ni la complice. La scène, que l’on imagine sans peine, d’une Sakineh à bout de forces et prête à tous les aveux qu’on lui demande ; d’un Sajjad coupé du monde depuis des semaines, revoyant sa mère pour la première fois depuis des mois ; et, pour eux deux, pour la mère et le fils rassemblés en cette lugubre cérémonie de retrouvailles, l’injonction faite de jouer aux vivants normaux, libres d’aller, de venir, de se chauffer au soleil. Torture morale. Torture tout court. Les nazis organisaient des simulacres d’exécution. Les Iraniens raffinent et produisent des simulacres de libération. C’est la même chose.
Deuxième leçon. Le crachat à la face de l’Occident. Le bras d’honneur à toutes celles et ceux qui, dans les democraties mais pas seulement, se sont mobilisés pour cette femme et, à travers cette femme, pour toutes les femmes humiliées d’Iran. Ah! vous prétendez nous donner des leçons de liberté et de droits de l’homme ? Vous tentez de vous ingérer dans notre droit souverain à disposer de notre peuple en général et de nos femmes en particulier ? De cette femme-là, Sakineh, vous osez dire qu’elle est sous la « responsabilité » de votre pays? Et vous faites cela, comble de culot, sous la bannière d’une prétendue « vérité » dont vous seriez les garants et les gardiens? Eh bien voilà pour vous. Voilà comment nous vous traitons et qui, de fait, vous êtes. On vous tend un piège, vous y tombez. On vous lance un hameçon, vous y mordez. Votre vérité ne vaut rien. Vos dirigeants sont des clowns. Jusqu’au pauvre Berlusconi qui s’est précipité pour nous remercier – quelle rigolade! Là où il y a un salaud, il y a toujours un idiot. Nous sommes peut-être des salauds. Mais vous êtes sûrement nos idiots utiles. A bon entendeur…
Troisième leçon. L’art consommé de la manipulation, de la guerre des images et des mots, du trafic des opinions, dont vient de faire montre, une fois de plus, ce pouvoir iranien aux abois. Au flot de nos informations n’a jamais cessé de répondre, depuis le tout début de cette affaire, le contre flot de ses désinformations. Au flux de nos indignations et de nos pétitions, le reflux de ses chantages et de ses mensonges énormes. Jusqu’à ce 9 décembre où, en laissant filtrer quelques photos, en annonçant une vague video, en instrumentalisant, sans doute, tel ou tel Comité dont la sincérité n’a d’égal que la sympathique naiveté, il a tenté de disqualifier le mouvement pro-Sakineh dans son ensemble… Les terroristes du 11 septembre avaient plagié les films catastrophe de l’Amérique. Les terroristes qui gouvernent l’Iran viennent de plagier notre réseau d’information en le retournant contre lui-même. Ils ont, cette fois encore, échoué. Mais jusqu’à quand? Et pour combien de temps? Et quelle connaissance, à distance, des mécanismes qui régissent la fabrication de nos foules et de leur psychologie!
Quatrième enseignement. Le principe même de cette « reconstitution du crime ». L’idée de surdémontrer la responsabilité de Sakineh dans un crime dont je répète que la justice, lors de son procès, l’avait totalement innocentée. Et ce portrait qu’on est en train de brosser d’elle – à destination, notamment, de l’Occident – en criminelle cynique et froide dont nous ferions à tort une madone des droits de l’homme. La ficelle est grosse. Mais la manoeuvre est inquiétante. Car elle prouve que les hommes d’Ahmadinejjad n’ont renoncé à rien. Elle dit que, de Sakineh, eux aussi ont fait un symbole sur lequel ils ne céderont, comme toujours avec les symboles, que s’ils y sont contraints et forcés. Nous avons, à La Regle du Jeu, des sources qui nous signalent des dissensions, au sein de l’appareil théologico-politique iranien. On nous dit même qu’une partie du haut Clergé ne demanderait pas mieux que de se servir de cette affaire pour souligner l’esprit de clémence et de paix qui planerait sur le chiisme d’Etat iranien. Personnellement, je n’y crois guère. Ou je ne crois, plutôt, que ce que, pour le moment, je vois. Savoir: un pouvoir qui, hier, emprisonnait l’avocat de Sakineh; qui, avant-hier, cambriolait ses bureaux pour tenter de réécrire les pièces essentielles du dossier; et qui, aujourd’hui, tente de noicir encore le tableau en transformant une innocente et son fils en meurtriers de la pleine lune.
Et puis dernier enseignement enfin. Ou, plutot, dernière hypothèse. Je n’exclus pas qu’en dosant ainsi, savamment, les demi et les fausses informations, en laissant monter l’émotion et l’excitation en Occident pour, la nuit passée, doucher nos crédulités, en jouant, autrement dit, avec les nerfs d’une opinion internationale dont ils savent bien qu’elle est, avec la société civile, leur véritable ennemi, les Iraniens aient fait un test. Y tiennent-ils tant que cela, à leur Sakineh? Le dossier est-il toujours aussi brulant qu’il le fut, mettons, cet été? Et quel prix symbolique cette femme a-t-elle donc aux yeux de ces démocraties fragiles, incertaines de leurs valeurs, timides? De ce point de vue, en revanchje. ils ont été servis. Ils avaient fait un premier test de ce genre, il y a un mois, lors de cette arrestation de Sajjad qui avait laissé le monde de marbre. Ils en ont fait un second, hier soir, en créant, puis en laissant courir, la rumeur d’une libération qu’ils n’ont, bien entendu, jamais annoncée – et le test, cette fois, a été concluant puisque c’est la mediasphère dans son ensemble, écrits et écrans confondus, qui s’est véritablement embrasée. C’est bien le seul point positif de cette terrible et macabre séquence. Et c’est la raison pour laquelle il faut, moins que jamais, se démobiliser et perdre courage.
Quatre .
Bernard Henry Levy, sioniste acharné. Tu as le droit de t’attaquer à l’Iran. la seule puissance qui ose tenir tête à Israêl. Mais toute cette hypocrisie ne te servira pas à grand chose. Te servir de cette affaire judiciaire juste pour discréditer l’Iran est digne de toi. Ton petit jeu est clair pour le monde. on en a marre de tout ça. C’est dans la religion de ce pays depuis des siècles qu’il faut lapider les fornicateurs hommes ou femmes. Tu mets comme tous les occidentaux l’accents sur les femmes pour faire bouger les féministes, qui sont de votre création pour des raisons économiques que tout le monde connait. Pourquoi c’est aujourd’hui que vous voulez sauver une fornicatrice? pourquoi si vous êtes francs, vous n’essayez pas de sauver ceux qui ont des peines de mort en arabie saoudite, vos alliés? pourquoi on ne vous voyez pas parler ainsi de ces peines à l’époque du CHAH, votre pantin? Pourquoi on t’as pas vu parlé des enfants de Gaza que tes copains ont massacré de sang froid? d
Nazisme, nazisme… Nous avons dit «nazisme»? Combien d’années Mandel est-il passé pour un vil alarmiste avant de… quoi déjà? Tout ceci n’est qu’un problème de fondamentalisme religieux, avec guerre sainte à la clé. Rien de plus que cela. Vous voyez qu’il n’y a vraiment pas de quoi se formaliser! Ça fait un mal terrible aux Iraniens, mais c’est à leurs adversaires que ça souhaite en faire, et en fera sans doute le plus. La stratégie veut que l’on fasse comme si ce n’était pas là notre priorité, mais ce non-dit assourdissant va faire monter le Front. Bon! d’accord… Laissons-leur régler leurs problèmes internes et occupons-nous de nos affaires, ça va plaire à Mahmoud, et lui laisser tout le temps nécessaire à résoudre ses problèmes de nucléarisation interne. Et vous, alors, hein? Vous, comment vous régleriez cela? Moi? Vous voulez dire «nous», je suppose… Eh bien comment avons-nous fait, avec leur Ordre du Temple? Et quid de leur Saint-Office de l’Inquisition? Leur Concordat, comment ça se noue, et ensuite, se dénoue? Leur Saint Concile Vatican II, avec qui nous faisons ces trucs-là? Tout ceci est un problème de fondamentalisme religieux, avec guerre sainte à la clé. S’il y a des ayatollahs modérés en exil, on ne les entend pas. S’il y a des mollahs modérés en exil, on ne les entend pas. S’il y a des imams modérés en exil, on ne les entend pas.
Monsieur BHL
Pourquoi exagérer cette histoire ? Il n’est pas certain qu’ils ont voulu faire croire qu’elle était libre. Ils voulaient faire de la pub pour le film.
Et puis pourquoi réagir ainsi ? Ce film est minable, mal fait. Il faudrait mieux avoir un journaliste qui connait bien le dossier le démonter sur le plan du montage. Cette allemande devrait garder la tête plus froide et cesser de faire des communications hystériques.
Le soutient est bien mais il faut permettre aux iraniens de trouver leur solution. Ils disent pour ceux qui veulent l’entendre que le cas n’est pas décidé. Ils peuvent tout à fait faire de la clémence et il est probable que beaucoup de gens là bas préfèreraient démentir l’image d’un régime sans pitié ou cruel.
Dans un bras de fer l’opposant n’est jamais respecté quand il pleure et arrache les cheveux, ayez au moins un peu plus de dignité et etre moins sentimental. C’est mon opinion.
Quel bonheur que des femmes courageuses comme Mina Ahadi ainsi que toutes celles qui la soutiennent existent! Elles risquent leur vie. Sauf que la coupe est pleine avec ces mollahs, talibans, FIS… Leur premier souffre douleur : LES FEMMES! Qu’ils vivent entre eux et qu’ils laissent en paix les femmes, cet être si « abjecte » « erreur de la création de leur bon dieu » ne méritant que mort et rabaissement. Je soutiens Mina Ahadi et admire son combat, sacrifice et intégrité.
Quant à Sajjad, dans quel état était-il dans le reportage, soit battu, soit drogué mais à peine s’il arrivait à s’exprimer! Sakineh, quant à elle des moments de silence qui en disait long, la tête baissée… Elle s’exprime, dans le sacrifice d’elle même, certainement pour sauver son enfant! De quoi l’ont ils menacé? De faire encore plus mal à Sajjad? Ils en sont capables, ils ont prouvé pire.
Ces mollahs sont répugnants, ils jouent certes de manière sadique mais c’est un jeu pour eux. Ils sont froids, calculateurs, manipulateurs et dénués de tout sentiment humain… Des MUTANTS.
Mais comme Mina et tant d’autres qui ont compris que le chemin sera long… C’est là notre force! La leur est dans les biceps et la terreur, celle des femmes est mentale. Nous aurons le dernier mot. L’espoir reste entier, ils ne tiendront pas… Tôt ou tard!
Même remarque encore et encore ! Cessez donc de parler des « Iraniens » comme d’une globalité. En Iran, il y a des défenseurs des droits humains, des féministes qui luttent au prix de leur vie quand vous êtes tranquillement assis derrière votre clavier. C’est facile de jeter l’opprobre sur tout un peuple. Apprenez donc la précision et définissez ces Iraniens cruels, sans laisser croire qu’ils sont tous pareils.
Bonsoir,
J’ai beau essayé de regarder le visage de cette femme, je ne lui trouve pas les traits de Sakineh qui sont bien plus fins. Qu’elle ait été torturée et droguée ça, malheureusement, je n’en doute pas mais elle est si bouffie sur cette vidéo de la télévision iranienne que je ne peux la reconnaître. Peut-être de tant espérer qu’il s’agit d’une « actrice » qui n’a pas l’air bien heureuse non plus dans son rôle. Idem pour le fils de Sakineh, je ne le reconnais pas non plus. Quoi qu’il en soit, que ce soit Sakineh et son fils ou des « acteurs » comment pensent-ils nous convaincre en agissant de la sorte ? Je suis convaincue que Sakineh est entièrement innocente. Tout ceci est de la propagande contre les femmes, contre le peuple, contre la liberté, contre toutes les libertés. C’est un énorme pavé dans la marre de toutes les barbaries ! Les autorités iraniennes se ridiculisent en refusant d’entrer dans le siècle de la civilisation. Le respect, c’est comme les antibiotiques, c’est pas automatique. Si on ne respecte pas la vie à l’échelle d’un état, on ne mérite pas de l’Humanité et on ne mérite pas du respect des Citoyens du Monde.
Il faut libérer Sakineh. Il ne faut plus jamais appliquer des sentence de peine de mort qui relèvent d’une autre époque.
Et je ne suis pas en accord avec votre façon de voir les choses Monsieur Lévy. Ne leur donnez pas ce plaisir de leur laisser croire qu’ils nous ont insultés. Ce n’est que propagande ! Jamais propagande n’a pu salir, insulter qui que ce soit qui croit en la justice et en la démocratie. Ne dit-on pas que la bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe !!?? L’insulte et le crachat, ils se le font à eux-mêmes par des montages de propagande auxquels eux-mêmes ne croient pas un seul instant.
Par contre je vous rejoins lorsque vous pariez sur le fait que nous allons nous laisser emporter par le flot de l’actualité et que nous risquons d’oublier Sakineh pour le plus grand plaisir des autorités iraniennes car des petites Sakineh, des injustices, des catastrophes, le flot des news, de par le monde, il y en a tant … Mais vous êtes là. Vous allez veillez et nous ferons notre possible pour continuer à veiller nous aussi.
Merci pour Sakineh et les autres petites Sakineh … merci pour nous tous