Arrêtées à leur tour, les trois activistes venues d’Europe pour soutenir Amina, la Tunisienne emprisonnée, comparaissent en appel ce mercredi 26 juin.

Quand ce qui allait devenir le Printemps arabe s’est déclenché en Tunisie avant de s’étendre à l’Egypte puis au Yémen, à la Libye et à la Syrie, nous nous sommes aussitôt engagés en faveur de ce magnifique élan vers la dignité et la liberté. Nous lui avons fourni notre appui chaque fois que possible, ici en France dans les manifestations et les médias, voire en allant sur le terrain afin d’apporter une aide concrète à ceux qui se battaient contre leurs despotes sanguinaires. Nous avons d’emblée placé d’immenses espoirs dans ces surgissements contestataires survenant dans des pays considérés jusque-là comme durablement verrouillés. C’est dans la droite ligne de cet engagement auquel nous restons fidèles que nous exprimons aujourd’hui notre soutien, plein et entier, aux quatre Femen détenues en Tunisie.

Nous demandons la libération d’Amina, menacée de plusieurs années de prison parce qu’elle a commencé à tagger «FEMEN» sur un muret à Kairouan en signe de défi aux fondamentalistes d’Ansar al-Charia qui devaient tenir leur congrès dans cette ville ; nous demandons la libération de Pauline, Marguerite et Joséphine, venues de France et d’Allemagne soutenir leur camarade tunisienne, arrêtées et condamnées à quatre mois de prison ferme et dont le procès en appel se tient ce mercredi.

Les Femen agissent seins nus? La Tunisie n’est pas encore prête pour ce genre de contestation? Les Femen outragent les bonnes mœurs, les traditions locales? Mais faut-il comprendre par là que hurler dans la rue «Mort aux juifs», comme l’ont fait des hordes fondamentalistes, est plus conforme à l’esprit du pays puisque ces cris de haine n’ont entraîné nulle poursuite, nulle arrestation? Serait-il aussi plus acceptable de s’en prendre à des galeries de peinture, à des cinémas, au film Persépolis de Marjane Satrapi?

Nous n’allons pas ici rejoindre le consensus le plus trivial qui ne reconnaît le courage impressionnant dont font preuve ces jeunes activistes que pour mieux s’interroger sur le bien fondé de leurs «provocations». Certes, elles provoquent, mais au nom d’un message politique explicitement émancipateur. Elles sont légitimement décidées à affronter le sexisme, le patriarcat, les archaïsmes auxquels les Tunisiennes, qui avaient connu des jours meilleurs sous Bourguiba, sont à nouveau brutalement confrontées, comme le sont les femmes sur la majeure partie de la planète. La vraie provocation, cette fois dirigée contre l’égalité entre les sexes, est de porter le niqab et de vouloir même le garder en cours à l’Université ; elle est d’invoquer une prétendue «complémentarité» des femmes avec les hommes ainsi que les islamistes avaient tenté de l’inscrire dans la nouvelle Constitution tunisienne. La vraie provocation, contre les valeurs démocratiques universelles, est d’avoir condamné à sept ans et demi de prison pour blasphème Ghazi Béji – qui a heureusement pu se réfugier en France – et Jabeur Mejri, qui lui croupit derrière les barreaux dans des conditions inacceptables. La vraie provocation est d’avoir infligé au rappeur Weld El 15 deux ans de prison ferme pour «outrages à des fonctionnaires» et «atteinte aux bonnes mœurs». La journaliste franco-tunisienne Hind Meddeb qui était venue à son procès par solidarité s’est retrouvée quant à elle poursuivie pour «atteinte à la pudeur». Rappelons que la petite vingtaine de voyous salafistes qui se sont retrouvés devant la justice tunisienne pour avoir attaqué l’ambassade américaine et mis le feu à des bâtiments en 2012 n’ont été condamnés qu’à deux ans… avec sursis.

Aujourd’hui au gouvernement, les Frères musulmans du parti Ennahda, qui avaient tant hésité avant de prendre en marche le train de la révolution, feraient bien de se rendre compte de la Tunisie qu’ils sont en train de façonner : un pays au moralisme étriqué et archi-rétrograde, s’enfermant sous une chape idéologique de bigoterie misogyne, sanctionnant ses contestataires par une répression démesurée tout en montrant une inquiétante complaisance à l’égard des islamistes les plus extrémistes. Ce n’est pas ainsi qu’ils rendront leur pays plus attrayant aux yeux du monde qu’il ne l’apparaissait sous Ben Ali.

Pour nous, le Printemps arabe était et demeure un espoir de liberté et de démocratie. Il est annonciateur de l’accès du monde arabo-musulman aux droits de l’homme, c’est-à-dire aussi aux droits des femmes pour lesquels se battent les Femen. Comme l’a déclaré leur porte-parole Inna Shevtchenko : «Il n’y a pas de “white feminism », il y a des droits universels. Pourquoi les droits des femmes au Maghreb seraient différents de ceux des Américaines, des Européennes ?» Nous n’avons rien à ajouter à cela. Sauf, encore une fois : libérez les Femen !

3 Commentaires

  1. Enfilez un hijab noir sur un jilbab noir, et munissez-vous d’un niqab de même valeur. Soyez accompagnée d’un homme, de préférence un membre de votre famille, qui pourra monter la garde 60s/60 et vous avertira de la présence d’un agent d’obscénité à cent mètres à la ronde. Vous aurez ainsi tout le temps de démonter les pièces de votre bunker en kit, il vous suffit pour cela d’en dénouer la meurtrière si jamais la dystopie divine se retrouve coincée dans le collimateur de l’État infidèle, et vous doigterez comme il se doit son enfoiré de droit de l’homme et du citoyen. Ce message s’autodétruira dans 5 secondes.

  2. La différence entre ce que je fais et une apologie du colonialisme, c’est ce que je fais. La différence entre moi et ceux qui verront en moi un bacille responsable de leurs plaies, c’est moi. Et je ne saurais dire quand j’ai eu décidé de toujours m’en tenir à ce que j’avais vu depuis l’autre côté du miroir. Soutenir l’unité structurelle des politiques fantasmées, c’est parfois l’étriller. Le troupeau ne soutient pas le berger égaré. Il le précipite dans le précipice.

  3. Les Dark Vador de Charles de Gaulle – Étoile ont des seins qui ne sont pas sans dessein. Des mamelons Bic à la bille rétractable échouant à effacer chaque mot d’un manuscrit dispersé à l’intérieur d’une trouée d’inclinations contraires, avant que la porte ne claque. Des tétons-hygiaphones de noyées shakespeariennes s’ingéniant à percer le tympan d’une eau nue, restant sourdingue à leur colère. Les post boxes de Finsbury Park ont la poitrine grosse, moyenne, petite, symétrique ou dissymétrique, proportionnée ou disproportionnée, géante sur un corps de naine ou naine sur un corps de géante. Les Zorra de Michael Powel ont le sein rond, carré, triangulaire, le poumon cézannien : tout, dans la nature, peut être représenté sous une forme géométrique simple. Ça se voit comme le plexus au milieu de la cage. Les porte-drapeau de l’islam radical ont des obus qui visent le visage dévoilé des hommes. Elles sont la crème de la crème fouettée lorsque crevées, leurs poches s’empressent de se presser autour d’un féal rimbaldien. Elles ont des montées de fromage fermenté. Les cercueils de drap noir éprouvent du plaisir résurrecteur à proportion du désir qu’ils éveillent chez un homme à la morgue aussi raide que froide. Les femmes du Prophète fantasment sur l’extase qu’elles atteindraient dans l’enceinte d’un harem inversé. Les cachalots échoués sur le ravage aimeraient jouer au baseball avec Ulysse, mais l’homme à la dérive est bien trop occupé à dépasser son propre stade d’évolution pour s’occuper du chant involutionnaire de l’image de sa propre image. Les Peeping Tomatoes de la rue arable s’intromettent aussi naturellement qu’une Beccarie de la décade de Dante. Elles aiment imaginer qu’on les imagine aimer. Chaque fois que je me suis retrouvé devant le nu d’Alger, j’ai pu ressentir le respect dans lequel me tenait l’Arabe à l’odeur de souffre, à la couleur de terre, cette présence incontestable, cette satisfaction de l’être-là, Rabira, femme modèle, femme et modèle aux Beaux-Arts en tant de guerre. Jamais personne, aux dires du peintre, n’eut un geste ou un mot déplacé envers son cul somptueux qui avant de filer, s’était laissé en souvenir au mur à la manière d’une anthropométrie de Klein. Rabira, délivrée du tyran, serait obligée de braver la menace d’un homme et derrière lui, de l’homme si elle souhaitait aujourd’hui, comme hier, se diriger toute seule vers l’antichambre du monde tel qu’il devrait l’être, et arrivée dans le sanctuaire du rêve, se départir de ses vêtements l’un après l’autre jusqu’au dernier, puis aller prendre place sur l’estrade sous l’œil-éponge des garçons et des filles montant à chevalet. Rabira se pisse encore dessus à l’idée que son époux puisse savoir où elle est.