Les deux bourdes
La 1ère bourde : Dans le JDD du 31 juillet on lit : «Nous, Français et musulmans, sommes prêts à assumer nos responsabilités. […] Nous devons parler maintenant parce que l’Islam est devenu une affaire publique et que la situation actuelle est intolérable. […] L’organisation actuelle de l’Islam de France […] n’a aucune prise sur les événements» et d’énoncer les victimes des attentats depuis janvier 2015 en « omettant » les morts juives. Puis certains des 41 notables signataires se rétractent signant leur « bévue ».
La 2ème bourde : Pour le processus de paix entre Israël et les territoires palestiniens, la France a relancé le 30 mai 2016 une réunion internationale visant à «sauvegarder le patrimoine culturel palestinien et le caractère distinctif de Jérusalem-Est», et s’est associée, le 14 avril 2016, à un vote par le conseil exécutif de l’Unesco prônant de nommer les lieux antiques des Juifs de noms palestiniens.
Devant les forts remous diplomatiques, la France regrette une telle décision de vote et se rétracte.
Contexte : les attentats
Notre quotidienneté estivale présente de fort belles activités de loisirs, d’enrichissements culturels, mais elle se manifeste aussi par des attentats d’une violence et d’une cruauté sans nom.
Pour ne citer que les deux plus récents : à Nice, le 14 juillet, lors du feu d’artifice pour la Fête Nationale, et, douze jours après, le 26 juillet, l’assassinat du Père Jacques Hamel, égorgé dans son église par deux tueurs djihadistes, immédiatement éliminés par la police.
Zineb El Rhazoui, journaliste de Charlie Hebdo, soutient dans son interview sur RTL du 1er août 2016 que «la plus grande brutalité» doit être opposée aux tueurs adeptes de la cruauté du Salafisme.
L’acte kamikaze : la fusion des bourreaux et des victimes
La situation jugée intolérable par les 41 notables signataires de l’appel du JDD oblige d’interroger l’acte kamikaze.
La pulsion, l’énergie à tuer sont présentes dans les attentats djihadistes débordants de leurs jouissances destructrices. Pulsion et jouissance à tuer s’incarnent dans la ceinture explosive du kamikaze. Elle fait corps avec le tueur et devient son corps – tout autant que sa kalachnikov, son couteau ou son camion-bélier de 19 tonnes. Au cours de sa jouissance inhérente à la tuerie, le kamikaze s’assassine dans la foule de ses victimes, dans une fusion incestueuse entre les morts et les vivants. En fusionnant mort et vie, meurtre et inceste avec la mort, il reviendrait au stade le plus archaïque d’indivision entre naissance de la vie et non-vie, retournant, rembobinant le temps où allaient se discerner la mort de la vie, d’une vie à peine survenue. Dans ces attentats, les criminels, en s’y mêlant eux-mêmes, font fusionner bourreaux et victimes.
Le rembobinage : La jouissance du retour à la non-vie
Ce n’est pas sans rappeler les propos des survivants des camps nazis – où une telle fusion bourreau/victime n’avait toutefois pas lieu. Daech et Nazisme se rejoignent cependant par un lien à la cruauté. Le pouvoir de l’État qui organise la haine ici n’est pas obtenu par la cruauté, mais pour l’exercer et le plus loin possible. C’est ce qui capte les assassins et les capte de façon définitive. La jouissance du retour à la non-vie se propulse par ce rembobinage vers ces temps de cruauté primordiale où c’est la motricité, la motricisation des pulsions de meurtre qui s’exercent sans cesse et de plus en plus. La jouissance des meurtres produit la jouissance des actes kamikazes qui s’en suivent. Les effets collectifs dans le temps s’accomplissent dans des modèles de jouir s’auto-entretenant à l’infini.
Certes, il existe une position qui soutient que c’est notre civilisation occidentale et la laïcité française qui produiraient de telles horreurs commises par des jeunes hommes franco-musulmans issus des banlieues défavorisées. Je tiens cependant à dire que cela est vrai parfois mais, dès lors que le djihadisme s’empare des idéaux de ces hommes, la référence qui joue est cette captation vers le rembobinage que j’essaie de définir.
Deux possibilités s’en dégagent :
– La prise en charge socio-psychique de ceux qui sont repérés comme djihadistes non encore en voie d’être des criminels, avant d’exercer la cruauté contre la vie d’autrui et d’eux-mêmes,
– Exercer la «brutalité la plus grande» pour les exclure de nos sociétés, voire les tuer sans hésiter comme cela a lieu de plus en plus lors de leurs forfaits.
Djihad/Daech et Nazisme
Notons ce point que Djihad/Daech et Nazisme ont en commun d’utiliser la cruauté comme but ; mais de plus le nazisme pratiquait ce que Henri Rousso a très justement nommé devant la négation de l’existence des chambres à gaz : le négationnisme des crimes inhérents aux jouissances des tueurs pour continuer leur génocide des Juifs. Daech pratique, au contraire, un non moins effrayant affirmationnisme dans leurs tueries, il les répand, les affirme et capte ses adeptes par leurs médias, et par nos médias piégés dans le monde du spectacle où nous «vivons ensemble», et par le Web dénoncé de plus en plus et en vain.
Comment comprendre « l’omission »?
Supposant acquise cette approche, comment comprendre, comment accepter une telle « omission » collective par les notables franco-musulmans des souffrances juives ? N’ignorant pas celles de la Shoah, pourquoi aujourd’hui effacent-ils celles des attentats de l’Hyper Cacher à Vincennes, d’enfants juifs tenus par les cheveux assassinés par balle à bout portant dans la tête à Toulouse en mars 2012, le massacre d’Ilan Halimi, séquestré, tué, après avoir été torturé pendant 24 jours en 2006 ?
Peut-on penser, nos notables peuvent-ils penser que c’est par vengeance sociale ? Et donc que cela serait justifié ? Pourquoi pas alors nommer les victimes non juives, celles qu’ils n’ignorent pourtant en aucune façon ?
Non, il semble bien que cela a (eu) lieu par une impossibilité de renoncer à un pro-palestinisme tellement répandu aujourd’hui en France. Ce qui ne peut que nuire au processus de paix israélo-palestinien. Au point que ces bourdes avouées de la délégation française auprès de l’Unesco et de l’annonce des notables dans le JDD sont autant de signes de soutien aux pro-palestiniens de France. Sans même se douter que la cause du Fatah n’en demande peut-être pas tant. Si c’était le cas, nos 41 notables les ont-ils contactés ? Peuvent-ils le transmettre par voie de presse, comme ils en ont la possibilité ?
La bourde à l’Unesco et celle des 41 notables du JDD sont une allégeance quasi réflexe (hello notables médecins, ce terme ne vous est pas inconnu ?!), aux modes de haine des Juifs pratiqués sous le nom de BDS «Boycott, Désinvestissement, Sanction». Soit d’ignorer et les Juifs et leurs souffrances, et de les effacer de leur conscience de citoyens franco-musulmans. Comme si c’étaient des produits judéo-israéliens à bannir du marché du «politically correct»…
Ceux qui se sont rétractés devant leur bourde et acceptent de la rendre claire pour penser notre monde, peuvent-ils nous dire comment lutter désormais contre notre ennemi commun, la barbarie djihadiste, sans en exclure les Juifs de France et ni le patrimoine culturel hébraïque?
Excellent article. Très bonne analyse psychologique.
Il a cependant une des deux solutions préconisées (et non créées) par l’auteur à laquelle je n’adhère absolument pas (et ce, depuis sa création). Celle de la « déradicalisation » ou « guérison par la psychologie » des jeunes djihadistes sur le point de partir en Syrie ou ceux qui en reviennent. Soit il s’agit de « psychologues » incompétents, naïfs et à côté de leurs pompes, soit nous sommes en face d’amateurs malhonnêtes et imposteurs, avides d’argent facile à gagner.