Exposition minimal à la Bourse de Commerce, très près de la Promenade de Vénus surréaliste, où jadis nous nous réunissions : André Breton, Magritte, Buñuel, Octavio Paz, etc.

François Pinault (Gucci, Saint Laurent, Balenciaga, Bottega Veneta, etc.) présente sa collection, il écrit en toute clarté, sa vision très personnelle et courageuse :

« L’art minimal va à l’essentiel.
– Son expression est incisive.
– Sa radicalité écarte l’anecdotique.
– C’est avec l’art minimal, que le temps pouvait se suspendre.
– L’esprit peut se libérer.
– S’aventurer au-delà des apparences.
– Pour la première fois, je lève le voile sur ma collection d’art. 
– C’est le souffle qui m’accompagne et m’inspire toujours
. » 

(… je me permets de relever cet écrit exceptionnel ; je ne connais pas François Pinault ; et j’ignorais à quoi il se consacrait.)

Le 30 mai 1914, Kazimir Malevitch déclara à Mikhaïl Matiouchine : « Je suis constructiviste, et mieux encore, suprématiste ». Cette déclaration intervint alors que Tommaso Martinelli l’incitait, à Moscou, à organiser une manifestation futuriste. Par le suprématisme, il simplifiait l’espace, réduisant les éléments picturaux à l’extrême, créant ainsi un système complet pour la construction du monde. Il affirma :

« J’ai maîtrisé les conditions de l’existence humaine, ce qui me permet d’utiliser un langage cosmique pour confirmer les lois générales de l’univers. Les clés du suprématisme me conduisent à la découverte de choses qui dépassent la connaissance. Mes nouvelles peintures, telles que Blanc sur blanc et Quadrilatère noir entouré de blanc, appartiennent au monde ; elles parlent d’une voix nouvelle, celle du symbole d’une lumière nouvelle. »

Kasimir Malevitch naquit à Kiev dans une famille d’origine mi-polonaise, mi-ukrainienne. La décoration des khaty (maisons traditionnelles), des pyssanky (œufs peints) et des icônes constituait « la forme d’art la plus élevée » et représentait sa première école « sauvage ». À partir de 1905, Malevitch s’installa définitivement à Moscou. « L’essentiel n’est pas de peindre des phénomènes ou des objets, mais d’atteindre une technique picturale pure (ou une texture) ; de rester fidèle à ce principe même en s’approchant du suprématisme ».

Blanc sur blanc est une réflexion sur la couleur elle-même. La peinture, conçue dans sa spécificité matérielle, devient l’exigence fondamentale du formalisme : la réduction à des unités minimales. Cela amène Malevitch à affirmer que l’art n’est pas un procédé, mais une ouverture vers un être non figuratif, sans objet. Il affirme la primauté de l’acte créateur : un « acte pur », une « flamme cosmique », « sans nombre, sans précision, sans temps, sans espace, sans état absolu ni relatif ». Du Carré blanc sur fond blanc, l’espace du monde émerge de son abîme infini. Parvenu au zéro, au Néant comme essence de la diversité, à un monde sans objet, Malevitch explore au-delà du zéro, les espaces du Néant, l’abîme de l’être.

Pendant dix ans, entre 1916 et 1926, Malevitch, à Petrograd et à Moscou, créa une architecture utopique violemment attaquée par Petchat’i Revolyutsiyaqui la qualifia de « méli-mélo inepte, d’œuvre inintelligible révélant un mélange pathologique et maniaque d’un dégénéré se prenant pour un prophète ».

Pourtant, Malevitch parvint à développer une pensée complexe, orientée vers l’être (et non l’essence de ce qui est) comme non-objectivité ; avec l’ineffabilité de la purification possible et la liberté inhérente à son Néant, un Néant où l’homme apprend à s’envoler librement ? Au cours de dix années de réflexion solitaire, Malevitch trouva le nom juste pour la question suprême : « Néant libéré » – un accès expérimental à la vie positive du Néant ?

Pour Malevitch, la « mise à zéro » des formes n’est qu’un tremplin qui le mènera au-delà du zéro, vers les régions du Néant libéré et pourtant immergé dans le monde sans objet – la seule réalité ?

 [Depuis lors – il y a un siècle – , l’art minimal est reconnu et exposé dans les musées et les expositions. Du MoMA de New York au Musée d’art de Rio de Janeiro, du Musée d’art métropolitain de Tokyo à la Stadische Kunsthalle de Düsseldorf, en passant par le Musée d’Art Moderne de Paris ; avec des œuvres de Lee Ufan, Emma Lavigne, Meg Zester, Jessica Morgan, François Morellet, Iannis Xenakis, Vasarely, Soto, Bridget Riley… et la centaine d’artistes recensés dans le catalogue.]

Trois « pseudo-arrabalesques » minimal

« …rien n’est-il en cours d’effondrement ? »
« …le destin ressemble-t-il a un cumulo-nimbus ? »
« …rien n’est-il inconcevable ? »
« …tout est-il contradictoire ? »
« …moi, je m’étale ? »
« …il respecte les adjectifs ? »
« …fais comme si ce n’était pas moi ? »
« …il n’y a pas de Lumière ? »
« …je me substantive ? »
« …le 41 août ? »
« …“t” est ma lettre fétiche ? »
« …invente des familles ? »
« …l’affabulation, n’existe pas ? »
« …le bon-sens est-il un fantasme ? »

Tableaux et photos de Fernando Arrabal

Minimal, 1992.
Minimal, 2023.
Minimal, 1993.
Minimal, 1994.
Minimal, 2015.
Minimal, 1992.
Minimal, 2017.
Minimal, 1996.
Minimal, 1999.
Minimal, 2021.
Minimal, 1998.
Fernando Arrabal en visite à l’exposition Minimal, à la Bourse de Commerce.
Fernando Arrabal en visite à l’exposition Minimal, à la Bourse de Commerce.

Minimal
Bourse du Commerce-Fondation Pinault,
Du 8 octobre 2025 au 16 janvier 2026.