Le 9 juin prochain, les 450 millions de citoyens de l’Union européenne (UE) seront appelés à choisir leur avenir.  

L’Union qui sortira gagnante des élections au Parlement européen sera scrutée de près par nos alliés comme par nos adversaires dans le monde entier.  Ce choix est d’autant plus déterminant que les équilibres géopolitiques ont rarement été aussi instables et que la pertinence du modèle démocratique est interrogée par des régimes anti-démocratiques soucieux de saper les valeurs que nous défendons.  

La guerre qui vient de resurgir sur le sol européen depuis l’invasion des troupes russes en Ukraine illustre combien les valeurs occidentales et européennes, nos modes de vie, sont chéries par les États qui souhaitent vivre dans un monde libre et démocratique. 

Défis écologique, économique, social, démographique, culturel, migratoire, démocratique, de défense et géopolitique, l’UE fait face à une multitude d’enjeux qui présageront de son avenir et de sa pérennité.  

Dans ce contexte, le rôle des villes Européennes et plus particulièrement celui de Paris, est primordial. Les villes européennes ont toujours eu une grande influence dans le maillage du continent, ce que l’historien Jacques Le Goff appelait «  la belle Europe des villes et des universités  ». Au cœur de cette influence se trouvent leur prise de conscience politique, la mise en réseau des savoirs et le creuset des rencontres humaines. Façonnées d’abord et de longue date par le commerce, mais aussi par la culture et le partage des connaissances. 

Les villes «  Cœurs » d’hier, telles Florence, Amsterdam ou Bruges, comme les villes d’aujourd’hui sont devenues, comme l’illustrait Jacques Attali en 2006 dans son ouvrage  Une brève histoire de l’avenir, des centres économiques, culturels, démographiques, constituant un des moteurs de l’Europe.  

Aujourd’hui, face à la montée des extrêmes, du populisme, des idées xénophobes et racistes,  les  villes sont au cœur du combat démocratique et elles seront au cœur de l’Europe de demain.  

Face à la tentation du repli sur soi et la montée d’une extrême-droite conquérante, désireuse de frapper au cœur l’esprit des institutions européennes,  les villes peuvent être un antidote.  Elles demeurent en Italie, comme en Pologne, en Suède comme en Grèce, de Lisbonne à Paris, en passant par Hambourg, Florence, Varsovie, Barcelone, Stockholm ou Vilnius, des lieux où se vit et s’invente la démocratie et où l’impératif écologique ne s’oppose pas à la justice sociale.  

Ce prisme européen des villes demeure une réalité et se confirme d’élection en élection. Par conséquent,  de la participation électorale des villes dépendra en grande partie la tonalité du scrutin de juin.   

Le 27 décembre 2023, la disparition de l’ancien président de la Commission européenne, père de l’euro et figure de la gauche française, Jacques Delors,   architecte de l’Europe rêvée », selon l’expression d’Enrico Letta, ancien Président du conseil des ministres d’Italie et aujourd’hui Président de l’Institut Jacques Delors, dans un article du journal belge le « soir  », nous met face aux défis que ce projet politique doit affronter.

Je partage par ailleurs son analyse : «  une attention à la chaleur sociale pour récupérer le consensus de la partie la plus eurosceptique  ». Car oui ! Si l’Europe doit être une puissance économique pour répondre aux grandes puissances démographiques et économiques que sont les États-Unis, l’Inde ou encore la Chine, elle ne peut y arriver sans gagner la bataille des cœurs des citoyens européens comme cela fut le cas lors de la grande crise sanitaire de la Covid-19 et ou encore la mise en place du plan de relance européen.  

À l’avenir, l’Union européenne doit donc investir plus en profondeur les politiques de solidarité, pour réaliser une Europe citoyenne, proche de ses habitants et moins technocratique. 

Les villes européennes doivent également continuer à être des acteurs clefs de la lutte contre le réchauffement climatique. Le grand défi de notre siècle !   

Mais si L’Europe est une source d’inspiration, elle est aussi une source d’ouverture pour rompre le déterminisme social ou la tentation du repli national.   

Les villes de l’Union Européenne sont de fait au cœur des enjeux migratoires et de l’accueil des réfugiés car elles représentent l’espoir d’un monde meilleur pour de nombreux immigrés. De Paris à Amsterdam en passant par Berlin, elles l’ont toujours été comme l’ont toujours été New-York ou encore Londres. 

Bien sûr, je suis conscient qu’en raison des difficultés économiques, sociales et culturelles de nombreux citoyens soient tentés par un repli sur soi et hésitent face à l’accueil d’immigrés ou que des maires s’inquiètent de la capacité pour leur ville d’accueillir de nouveaux migrants, comme le montre la récente  mise en garde du maire de New-York, Eric Adams, alertant sur « la crise migratoire qui va détruire New York  » face aux défis d’une vague migratoire sans précédent de plus de 150. 000 immigrés depuis un an.  

Mais les villes sont aussi par  leur histoire, dynamisme, diversité, expansion et valeurs, les symboles d’un vivre ensemble, d’une générosité et d’un espace de liberté. Il est selon moi aujourd’hui essentiel que les Maires puissent être sur ce sujet également mieux associés aux  réflexions qui précédent la mise en place des politiques migratoires décidées par les États. Ces enjeux d’accueil seront d’ailleurs au centre de la conférence internationale sur les réfugiés voulue par Anne Hidalgo, Maire de Paris, en amont des Jeux olympiques et paralympiques.  

Enfin, je  crois en une Europe qui remette le citoyen au cœur de son action.  Lors de la restitution de la conférence sur l’avenir de l’Europe, le 9 mai 2022, j’ai été enthousiasmé par la leçon d’espoir que les jeunes nous ont  donnée, en exprimant leur souhait d’une Europe plus écologique, plus sociale et souhaitant être pleinement associés au processus de décision européen.  

Conseil parisien des européens 

Mais que sont devenues depuis ces justes et légitimes interpellations  ?   J’y vois précisément le rôle des villes pour donner aux institutions de l’UE de formidables outils de démocratie concrète et locale, notamment avec la création du Conseil parisien des européens dès 2019. C’est une instance unique en Europe, rassemblant 61 parisiens issus des 27 pays membres, chargés d’éclairer par leur expérience si diverse nos politiques publiques et de proposer de nouvelles initiatives. Il a été créé sur le modèle d’instances démocratiques mises en place à Paris comme l’Assemblée citoyenne ou le Conseil parisien de la jeunesse.  

Le 3 février prochain, j’ai accueilli à l’Hôtel de ville de Paris la nouvelle promotion de cette instance. Je souhaite que ce Conseil Parisien des Européens, par sa modernité, symbole d’unité dans la diversité qu’il incarne, puisse essaimer en Europe et contribuer au débat nécessaire sur l’Union européenne que nous voulons. Je le ferai vivre en mobilisant les Parisiennes et les Parisiens, en lien avec les Maires d’arrondissements, de la majorité comme de l’opposition et leurs équipes.  

Le 9 juin prochain le vote sera décisif pour l’avenir de l’Union européenne.  Ne laissons pas ces élections aux mains des extrêmes ! Alors, aux urnes Citoyennes,  Citoyens !  


Arnaud NGATCHA, Maire-adjoint à la Maire de Paris en charge de l’Europe, des Relations Internationales et de la Francophonie.