Ce dimanche 14 novembre, au Palais des Congrès de Paris, avait lieu la onzième convention nationale du CRIF, le Conseil représentatif des institutions juives de France.
Ce rassemblement, aux allures de « retrouvailles », comme l’a noté le président de l’organisation Francis Kalifat, a été introduit par le nouveau chef de l’État d’Israël : Isaac Herzog. Ancien membre du parti travailliste, Herzog marque une rupture avec l’ère controversée de Benyamin Netanyahou. Il entend contribuer à remettre en marche le processus qui vise à établir une paix durable avec la Palestine. La fin du conflit semble être un élément majeur de son engagement présidentiel, comme en témoigne sa rencontre, dès 2013 en Cisjordanie, quelques jours à peine après avoir pris la tête du parti travailliste, avec Mahmoud Abbas, le président palestinien.
C’est donc cet homme, Isaac Herzog, qui a enregistré un message pour le public venu assister à l’échange, à Paris, sur « l’Universel à l’épreuve des identités ». Alors que les débats s’électrisent en France à l’approche des échéances électorales du mois de mai 2022, et tandis qu’un certain Eric Zemmour ne reconnaît aucun legs du peuple juif à la France, affirmant même lors d’une réponse à Bernard-Henri Lévy qu’il « n’y a pas de Juifs de France, il n’y a que des Français de confession juive », Herzog, lui, a rendu hommage au judaïsme français :
« Le judaïsme français a enrichi le monde juif au-delà de toute mesure, de Rachi à Adolf Crémieux, des grands Tossafistes à Bernard-Henri Lévy, de Léon Blum à la regrettée Simone Veil. » Il ajoute, lui qui connaît bien la France et qui porte l’héritage de son arrière-grand-père français, le Rabbin Joel Leib Herzog, Grand rabbin dans le quartier du Marais à Paris : « Le Panthéon des grands Juifs français est une civilisation à part entière. »
Un judaïsme français incarné donc par un Bernard-Henri Lévy qui côtoie, dans la citation d’Herzog, quelques-unes des plus grandes figures de la pensée juive. Un judaïsme de celles et ceux qui sont juifs et français, non pas français d’abord, juifs ensuite. Une judéité cosmopolite, généreuse, fraternelle : « Nous sommes une famille, conclut Herzog. Nous sommes des extensions de la même famille ».
En répondant présent, de son côté, à l’invitation du CRIF pour intervenir lors de cette journée qui entendait « lutter contre les raccourcis et les confusions historiques », Bernard-Henri Lévy affirme à nouveau, dans un temps troublé, son attachement à l’esprit du judaïsme. Il avait déjà inauguré plusieurs forums du CRIF, notamment au Collège des Bernardins en octobre 2010 lors d’un colloque, « Le visage, la rencontre de l’autre », où il déclarait : « Au moment où la concurrence des victimes semble instiller, plus que jamais, son mauvais venin dans les esprits, je ne trouve franchement pas mauvais de se retrouver ici. »
Depuis plus de dix ans, le venin a changé, mais il demeure : aujourd’hui, plutôt que de mettre les victimes en concurrence, on réécrit l’Histoire. Nul doute que Bernard-Henri Lévy n’a une fois encore pas trouvé mauvais de développer sa pensée pour lutter contre la montée, dans notre pays, de la haine aux extrêmes. Le Premier Ministre Jean Castex, qui par sa présence a marqué le soutien du gouvernement aux Juifs de France, a conclu la journée sur ces mots : « L’oubli est le pire de nos ennemis. La connaissance de l’Histoire est le premier des antidotes à l’affaiblissement des consciences et à l’abaissement de la politique ».