Réfléchir sur le sens des limites est une manière d’aborder l’essence même de ce qui constitue l’humain et son rapport au monde. L’acte créatif tel qu’il est évoqué dans le livre de la Genèse n’est en fait que le récit de l’instauration de limites entre le créateur et sa création. La Kabbale va jusqu’à exprimer l’idée de limitation de l’Être primordial appelé tsimtsoum pour donner naissance au monde. Le Zohar ou Livre de la splendeur, considéré comme l’œuvre maîtresse de la Kabbale, explique qu’il y a trois créations distinctes qui s’articulent autour de l’acte créatif : création globale du monde, du vivant et de l’humain. Ce raisonnement est une interprétation de la présence triple du mot en hébreu bara qui signifie créer dans le premier chapitre du livre de la Genèse. On distingue deux conceptions de l’humain : la première envisage l’existence autour de limites parfaitement acceptées par l’homme et la seconde libère ce dernier de toute contrainte pour lui donner le sentiment d’une existence illimitée. Ces deux approches constituent le point de départ du passionnant ouvrage de Monique Atlan et Roger-Pol Droit intitulé « Le sens des limites » publié aux éditions de l’Observatoire. Repenser les limites pour les appréhender autrement, tel est l’objectif affiché des deux auteurs qui encouragent les hommes à ne plus voir dans la notion de limites le reflet d’une barrière étanche. D’un côté, l’Homo illimitatus qui désire effacer toutes formes de limites et de l’autre, l’Homo limitans qui souhaite les consolider ou les réimposer. Pour l’Homo illimitatus, le désir obstiné d’effacement est porté par la mondialisation et les révolutions technologiques qui installent une fusion grandissante qui rime avec confusion entre l’homme et la machine au détriment de l’humain fragilisé, relégué. L’effacement des limites se révèle présent dans tous les registres d’activité et même dans ceux de la pensée où l’on va jusqu’à proposer une suppression de toute séparation entre les vivants quels qu’ils soient, humains, animaux ou végétaux, pour ne former qu’un seul grand Tout. Cette approche est l’une des sources de la confusion qui règne dans nos sociétés contemporaines où il n’y a plus de frontières pour les communications, les flux financiers, les échanges commerciaux. Il faut y ajouter la tentation d’un effacement progressif de ce qui caractérise l’humain par excellence, autrement dit sa finitude. Il n’y a pas si longtemps, certains biologistes n’hésitaient pas à penser qu’il était possible d’effacer l’ultime destin de l’homme. « Nous pouvons certainement arrêter la mort » confiait Douglas Melton, enseignant à Harvard. C’était en 2011, le monde n’était pas encore empêtré dans une crise sanitaire liée au Covid-19 qui allait générer une forte sidération chez les hommes qui avaient fini par adhérer à l’énormité de ce type de promesse. Face à l’Homo illimitatus, il y a l’Homo limitans qui entend séparer en renforçant et en démultipliant les limites. Monique Atlan et Roger-Pol Droit exposent avec talent les contours de l’impasse dans laquelle se retrouvent nos sociétés, utilisant à plusieurs reprises un langage médical qui m’est familier : l’établissement d’un diagnostic, l’analyse anatomique de l’impasse qui n’est pas, selon eux, le simple constat d’une opposition manichéenne entre deux groupes d’hommes mais bien le point de convergence de ce qui l’emporte sur les divergences affichées. Ils expliquent qu’on ressent chez les deux groupes une même intensité de ce désir insatiable qui tend à supprimer ou renforcer les limites avec un identique refus de la négociation, de l’ajustement, de la prise en compte des nuances, de l’acceptation de compromis autour de l’idée et de la représentation de ce que constitue une limite. Ces approches apparemment opposées ne font que ramener le monde à l’identique, à une abstraite identité, désincarnée. Pour tenter de trouver une issue à cette situation, les deux auteurs proposent un long voyage historique de la pensée des limites qui occupe une bonne partie de l’ouvrage. Pour une majorité des philosophes grecs, les limites sont appréhendées comme des soutiens, elles ne sont pas subies mais désirées car elles sont garantes du bonheur. La christianisation de la société médiévale instaure une nouvelle limite à travers la notion de péché, et la culpabilité qu’elle va induire. Cette vision ne cessera d’évoluer à travers les siècles pour devenir dans les temps modernes un projet dont le propre même serait pour les limites d’être dépassées. Le progrès est alors vu comme l’acquisition d’une autonomie de plus en plus grande envers les contraintes physiologiques, géographiques ou climatiques auxquelles l’homme ne doit plus être soumis. Ce mouvement de dépassement gagne peu à peu toutes les dimensions de l’existence. Quand s’arrêtera-t-il ? Jusqu’à quel type de transgression ? Comment s’est forgé le passage de l’éloge de la transgression tel que Michel Foucault le perçoit chez Georges Bataille et dans l’œuvre du marquis de Sade à celui de l’effacement des limites ? Autant de questions que traitent avec érudition Monique Atlan et Roger-Pol Droit pour tenter de trouver une issue à cette aporie. Ils proposent de dépasser l’approche binaire et d’entrevoir de nouvelles perspectives autour de dix variations qui réhabilitent les limites dans leur dimension vitale. Il y a dans ce bel ouvrage de Monique Atlan et de Roger-Pol Droit, des références évidentes à la philosophie et à la sagesse indienne mais j’y vois aussi des allusions à la Kabbale, les dix variations évoquant les dix séfiroth, ces niveaux finis de l’émanation de l’être dans le processus créatif qui sépare le néant de l’infini (Ein-Sof) de la Kabbale. La limite sépare et unit, l’intitulé de la première variation m’évoque un enseignement de Rabbi Berekhia cité dans l’un des textes fondateurs de la Kabbale, le Livre de la clarté ou le Bahir à propos de l’expression biblique de « tohou vavohou » qui a donné notre tohu-bohu traduit par « chaos ». Ce rabbin nous enseigne que l’on a tendance à oublier le sujet du monde pour ne se consacrer qu’à son objet. Il explique que l’expression tohu-bohu, composé de deux mots en hébreu, est le reflet de la simultanéité de deux mouvements qui sont antinomiques, un qui va vers le vide comme une dilution d’être (tohou) et un autre qui s’oriente vers l’effectivité réelle de la présence (bohou lu en le décomposant en bo et hou). Le tohou est l’objet et le bohou est ainsi le sujet. L’un va à la détermination totale et l’autre va à la liberté totale, deux consciences d’existence antinomiques certes, mais qui ne font qu’une. Le sens des limites, est un ouvrage inspiré et inspirant…
Le sens des limites, Monique Atlan et Roger-Pol Droit, éditions de l’Observatoire, 223 pages, 20 janvier 2021.
On a la guerre mondiale qu’on mérite.
Incapable d’assumer sa défaite face à la Révolution islamique mondiale, notre génération se sera contentée d’entrer dans une course au nanoarmement pour faire face à un ennemi de l’humanité dont les scénaristes de blockbusters en série (Z) nous avaient presque convaincus de la possibilité d’unifier contre son espèce les idéologies les moins conciliables de la planète Homo, tel qu’on nous l’avait fait virtualiser cent fois devant l’ultime danger que constitue, pour tout public inéduqué, l’envahisseur extraterrestre.
En attendant l’inéluctable raclée électorale que son clientélisme compulsif s’échinerait à repousser hors du champ d’inconscience obstruant ses facultés d’anticipation au point mort, la représentation républicaine transclasses agiterait l’épouvantail populiste au-dessus du Parc Bébé mondial, se trouvant toujours une nouvelle excuse pour ne pas régler un problème civilisationnel dont les fumeuses racines socialisantes ne feraient que renforcer, chez le contestataire de l’altérité d’autrui, le sentiment qu’il mène un combat légitime contre le seul obstacle qui eût jamais le cran de se mettre en travers de sa route, ce Minus majuscule qui, quoi qu’il nous en coûte, ne le laisserait jamais amorcer sur ses terres, ou du moins celles qu’il revendique, un nettoyage (aussi peu) éthique (que put l’être celui) qu’il avait promis de lui infliger, et ce jusque dans les chiottes.
La question de l’État social est trop vitale pour qu’on la transfuse dans le mauvais corps : ici, le corpus vampiriste de l’islam radical.
Les misérables n’ont pas de sexe ; c’est dire qu’ils n’ont pas de peau.
La question de la foi est, quant à elle, trop essentielle pour qu’une uchrocivilisation aux ambitions ultimes en relègue le labour aux seuls champs cultuels.
Les peuples sont plus vieux que les religions qui leur courent après, fussent-elles irrésistibles.
Rendons-leur la liberté de circuler à l’intérieur comme à l’extérieur de leur histoire illinéaire avec science, rigueur, pénétration, et hauteur de vue.
La déradicalisation ira de soi lorsque chaque sous-groupe ethno-culturel sous influence antirationaliste, remué par le chevauchement d’insondables plaques d’amnésie collective, remontera le chemin nouveau et primordial de la connaissance de Soi.
P(res)-S(oir bleu-blanc-rouge-brun) : Quand, brusquement, le hijab aurait toujours été un signe de soumission à Dieu et non à l’homme. Si vous cherchiez à dire que, dans l’inconscient d’une musulmane ordinaire, son homme — pour paraphraser Dolto — a pris la place de Dieu, nous pourrions à la rigueur tomber d’accord. Dans le cas inverse, nous vous demanderions d’enjoindre notre ministre de l’Intérieur de veiller à ce que le nombre de femmes et d’hommes qui, se réclamant de l’islam et uniquement de l’islam, ne s’en arrogent pas moins la liberté d’aller et venir tête nue dans la rue islamorépublicaine de France, soit bien équivalent.
P(e)-S(te vert-brun) : Il serait effectivement dommage que nous nous opiniâtrions à briser notre impeccable thermomètre à l’apollon, en espérant ainsi faire disparaître la maladie de l’islam qu’est la contre-globalisation obscurantiste et le jihâd armé, rampant et galopant. Mais le brassard frontal islamonazi n’est pas un instrument de mesure ; c’est une arme, et s’il est illusoire de nous penser aussi parfaits qu’il faudrait l’être pour élaborer un programme de déradicalisation des partisans et partisanes de la Révolution viriliste panarabislamique, il est en revanche plus qu’impérieux que nous la désarmions, car une grande partie de son influence réside dans la conviction qu’elle fait naître chez ses petits soldats de l’efficience de leurs modes de conquête civilisationnelle invasifs, offensifs, obscènement pudibonds, stylistiquement fascistes.
Nous ne pensons pas pousser dans la camisole intégriste des Français auxquels nous demandons, outre le minimum de discrétion que requiert la paix intellectuellement armée que tout citoyen est en droit d’exiger de ses semblables en matière de confession de foi, la stricte observance des valeurs universelles dont l’égalité entre l’homme et la femme aura été, dès le principe, l’un des grands commandements génésiques.
Lorsque deux individus, inconnus l’un de l’autre en terre de Liberté vouée à la reconquête épique, établissent un premier contact, ce sont deux êtres libres et égaux en droit qui sont amenés à se découvrir l’un l’autre, et ce sans qu’aucune barrière culturelle ait le pouvoir d’entraver a priori les relations fructueuses, pour eux-mêmes comme pour leur propre pays, qu’ils se voient offrir l’opportunité de nouer ensemble.
Le voile islamique n’est pas un signe religieux anodin ; il est de ceux qui contreviennent aux premiers principes de l’état de droit contemporain, j’entends par là aux vertus cardinales de l’humanisme après qu’elles furent combinées aux libertés individuelles ainsi qu’aux droits sociaux, le tout allant s’arc-bouter à l’égalité des sexes.
La liberté de culte est, comme toutes les autres libertés fondamentales, une liberté bornée par celle d’autrui, et d’abord par l’impératif de respecter la dignité humaine.
En France, on n’accepterait pas, quand bien même ces dernières y trouveraient-elles leur intérêt, que des femmes s’accroupissent aux pieds de leurs époux autour d’une table de restaurant, et qu’on leur serve le plat du jour dans une gamelle en plastique pour chien, les forçant de la sorte à se mettre à genoux, puis à se pencher en avant afin de happer leur repas sous le regard circonspect de leurs concitoyens du monde parallèle.
Pour le symbole qu’elle représente à la lisière des dépotoirs collaborationnistes, mais aussi pour sa rareté dans le paysage culturel occidoriental, je propose qu’à Zineb El Rhazoui soit décerné le prix Nobel de la guerre, et dans ma bouche, ceci est un hommage au combat endurant d’une résistante au désintégrisme islamofasciste en temps de guerre sainte mondiale, celui d’un être viscéralement adamique, incapable de ne pas attribuer aux êtres et aux causes les noms qu’ont mérité de recevoir des actes par lesquels leurs trajectoires propres ou communes soit s’écriront en lettres de feu dans la mémoire universelle, soit en seront effacées à tout jamais.
Nous ne doutons pas que cette femme unique en son genre, probablement beaucoup plus symbolique qu’elle ne l’aurait voulu à en juger par les accusations de riposte disproportionnée qu’elle essuie de toutes parts, deviendra ce qu’elle est sitôt qu’elle sera parvenue à lever une armée d’élastiseurs d’effondrement fossile suffisamment chevronnés pour dénoyauter l’appareil du Parti syndicaliste étudiant, et déjà enseignant.
La dernière fois que la France a signé un armistice avec le fascisme, notre nation jeannedarquée depuis Londres — décidément, Dieu a le sens de l’humour — n’a pas tardé à s’en mordre les doigts.
Nous haïssons la guerre mais, contrairement à nos abhorrateurs, nous voulons la finir et, si possible, en finir avec elle une bonne fois pour toutes.
Nous touchons là au nerf de ce qui nous oppose ; les va-t-en-paix sont toujours prêts à ramper à plat ventre devant la Brêle immonde, escomptant qu’elle leur épargnera, s’ils se joignent à la meute, son envoûtant réquisitoire contre les esprits forts qu’elle incrimine d’intelligence avec l’ennemi.