Mireille Knoll avait réussi à échapper à la rafle du Vél d’Hiv en 1942 mais nous n’avons pas su, en 2018, la protéger de la barbarie antisémite.

Née en 1932 à Paris, Mireille Knoll a eu beaucoup de chance lorsque, grâce à la nationalité brésilienne acquise par son père parti rendre visite à des membres de la famille à Sao Paulo quelques années plus tôt, elle a pu, peu de temps avant la rafle du Veld’Hiv, passer en zone libre. De retour en France après la guerre, Mireille Knoll a épousé un rescapé du camp d’Auschwitz, décédé au début des années 2000.

Nous devions protéger Mireille Knoll comme nous chérissons chaque souffle de vie des derniers témoins et rescapés de la Shoah.

Saurons-nous porter aussi vivante la mémoire de la Shoah lorsqu’ils auront tous disparu ? Ce questionnement nous hante. Les témoignages des survivants de la Shoah portent en eux des parcours individuels, familiaux, mais aussi les récits vivants des parcours de tous ceux qui ne pourront jamais témoigner ; ceux dont on a voulu effacer toute trace d’humanité et toute preuve de l’extermination.

Dans son message posté hier sur Facebook, la petite fille de Mireille Knoll, Noa Goldfarb, évoque la cruauté du meurtre antisémite dont a été victime sa grand-mère mais aussi la douleur du vide laissé par l’incendie : le feu a emporté tous les souvenirs, toutes les traces, objets, vêtements, photographies, lettres de ses grands-parents.

Mireille Knoll, assassinée parce que juive ;

Mireille Knoll, mémoire vivante de la Shoah assassinée par la haine antisémite dont elle avait réchappé ;

Mireille Knoll qu’on a voulu chasser des souvenirs de ses petits-enfants dépositaires d’une mémoire transmise pour que soit tenue la promesse du «Plus jamais ça !»…

Quelle faillite de l’Histoire, quelle faillite pour l’humanité…

Au choc face à la cruauté abjecte du crime commis s’ajoute le désarroi profond dans lequel nous laisse l’Histoire lorsqu’elle pousse l’ironie jusqu’à répéter ses heures les plus sombres : un antisémitisme qui inflige les pires souffrances, un antisémitisme qui assassine et annihile.

Mireille Knoll aurait dû être protégée par l’Histoire. L’Histoire a échoué. Nous avons, collectivement, échoué.

Tristesse infinie. Immense colère.

Mercredi à 18h30 place de la Nation, marchons pour elle, pour son doux regard dont les images nous hantent depuis 24h, son doux regard dont seules les grands-mères, toutes nos grands-mères, ont le secret. 

Plus que jamais : puisse la mémoire de Mireille Knoll être éternelle.

 

L’American Jewish Committee appelle à rejoindre la marche blanche organisée à l’initiative du CRIF et relayée par l’UEJF, SOS Racisme et d’autres, ce mercredi 28 mars, à 18h30, au départ de la place de la Nation.

 

 

Anne-Sophie Sebban, directrice adjointe d’AJC Paris.