Le phénomène de la violence aura toujours accompagné l’histoire de l’humanité. Violences politique, religieuse, sociale, économique, voire discursive, les humains n’ont cessé de se faire violence, et ce même lorsqu’ils prétendaient l’éradiquer en cherchant à dispenser le bien. L’humain a toujours recherché à comprendre sa source ou son origine, ce qui l’agence et l’entraîne, ce qui la fait perdurer et persévérer dans son Histoire. D’où provient notre propension quasi-naturelle à la violence ? Depuis quel moment et selon quelles conditions la violence arrive-t-elle à s’immiscer dans l’agir humain ? Ou encore, pourquoi l’humain recourt-il, en connaissance de cause ou alors involontairement, à la violence pour faire avancer son dessein ? La violence peut-elle être révoquée ou bien constitue-t-elle une indéracinable et ineffaçable marque de l’humanité ?

Ces questions hantent intellectuels et philosophes, politiques, historiens, sociologues et théologiens. Or, même si les appréciations et les analyses diffèrent, la constatation première est demeurée la même : la violence surgit dans le rapport à l’autre – jusque et y compris lorsqu’elle est retournée contre soi. Il conviendra, en un premier temps, de poser la question de notre relation à l’altérité, entendue dans chacune de ses déclinaisons : histoire, nature, autre humain, inconscient, Dieu, société, civilisation, etc. En ce sens, nous constaterons en quoi et comment le rapport à l’autre, alors qu’il est nécessaire à la vie de notre humanité et à la possibilité même de notre « vivre-ensemble », ne cesse d’inciter l’humain à un surcroit de violences risquant chaque fois de le projeter dans une catastrophe sans retour. Au cœur de cette analyse de notre rapport à l’altérité, nous verrons donc se déployer les multiples « logiques » de la violence ainsi que les modalités par lesquelles l’humain cherche à répondre au déferlement de ces mêmes « logiques ». Cependant, cette analyse ne saurait entièrement nous satisfaire.
Se posera la question de savoir s’il se produit aujourd’hui à une réelle amplification des violences ou bien si celle-ci nous semble telle que parce que, plus que jamais, nous sommes beaucoup plus informés, exposés, sensibilisés par les médias et autres relais d’information quant aux violences perpétuées ici ou ailleurs.

Autre interrogation : comment et de quelle manière la fragilisation de la démocratie aujourd’hui serait liée à cette incontestable montée des violences. Comment penser l’identité démocratique face à la montée des violences ? Et donc sans la replier sur elle-même en la transformant en régime de contrôle et de répression ? Cela signifie aussi de poser la question des conditions de possibilité ainsi que des limites de la démocratie face à la montée des violences l’affectant à la fois depuis elle-même comme d’au-delà d’elle-même.

La première édition du Colloque des Intellectuels Juifs de Langue Française devra aussi apporter une attention toute particulière à ce qu’il convient de nommer une résurgence de la violence affectant les communautés juives de France et d’Europe. Comment distinguer la résurgence actuelle de la violence contre les juifs de celles qui les auront, dans le passé, affectés ? Quelles sont les nouvelles formes de violence contre les juifs et comment les analyser.

Ces réflexions seront également articulées à une interrogation soutenue des sources judaïques au sujet de la violence. Il sera ainsi une explication aussi rigoureuse que possible avec les textes de la tradition juive.