Retrouvez chaque jour le programme du colloque Heidegger et « les juifs », se déroulant du 22 au 25 janvier, à la Bibliothèque Nationale de France et au Centre Culturel Irlandais.
Samedi 24 janvier 2015
Centre Culturel Irlandais
5, Rue des Irlandais
Paris Ve
10h00 – 12h00
Président de séance : Nicolas de Warren
Niall Keane : “The Universe Affirms Itself in the Individual”: Metaphysics, Politics, and Nihilism in Heidegger and Jünger
Mahon O’Brien : The Authentic Dasein of the People
Agatha Bielik-Robson: Love Strong as Death: Jews against Heidegger
Déjeuner (12h00-14h00)
14h00 – 15h45
Président de séance : Mahon O’Brien
Daniel Dahlstrom : Heidegger, Scholem, and the Nothingness of Revelation
Anthony Steinbock : Heidegger, Machination, and the Jewish Question: The Problem of the Gift.
Pause (15h45-16h15)
16h15 – 17h45
Président de séance : Joseph Cohen
Avishag Zafrani : Jonas et Heidegger : la sacralisation de l’Être en question
Christophe Perrin : Heidegger et Rosenzweig. Entre eux et entre nous
Pause (17h45-18h00)
18h00 – 19h15
Présidents de séance : Joseph Cohen et Raphael Zagury-Orly
Yann Moix : Heidegger et la parole juive
Stéphane Zagdanski : Die Verzauberung (L’ensorcellement)
Pause (19h15-19h30)
19h30 – 20h30
François Fédier : Heidegger et le monde juif
Pour découvrir l’intégralité du programme, cliquez ici.
Lisez mon article sur Heidegger en France sur ce site
leportique.revues.org/1389
Une Réponse à la Question d’ Emmanuel Faye sur Heidegger et le Nazisme en 2012
Cher Emmanuel Faye,
Merci pour votre message et vos questions.
En réponse, je devrai préciser que j’ai déjà parlé de la pertinence philosophique contemporaine
de la catastrophique adhésion de Heidegger à l’idéologie nazie dans un article que j’avais publié
dans la revue « Portique » (la même revue avec laquelle j’avais réalisé mon dossier anniversaire
sur Heidegger en Octobre 2006) en décembre 2007.
Je vous l’ai envoyé, ci-joint.
Même si je formulerais cette idée de manière un peu différente (et nettement moins « polémique ») aujourd’hui, je reste
toujours persuadé que l’adhésion de Heidegger au nazisme n’était qu’une expression bien particulière d’un phénomène
« métaphysique » qui dépasse l’histoire au sens historiographique du terme.
Cela veut dire que l’infâme « Bekenntis zur Adolf Hilter » de Heidegger ne peut pas être adéquatement comprise
qu’à condition d’être analysé dans le contexte de ce que Camus appelle « l’histoire corrompue de l’humanité
européenne ».
Une « histoire corrompue » dont la corruption est le résultat, entre autres, de l’exclusion et la dévalorisation
névrotiques et ignorantes de « l’Autre » dans la définition de ce qui est « européen » par ceux qui se croyaient
(et se croient toujours) des » authentiques européens ».
Des « authentiques européens » qui vivaient dans une « Europe » dont même le penseur le plus « démocratique » et « rationnel »,
autrement dit, Max Weber pensait (en 1914) que « les nègres de Sénégal » ne faisaient « authentiquement » pas partie.
Et ceci bien avant l’adhésion de Heidegger au nazisme.
Il faut aussi souligner que cela fut une obsession carrément européenne même si tous les pays et intellectuels européens
ne furent pas affectés par cette névrose identitaire de la même façon.
Je devrai aussi ajouter qu’il serait impossible, sur le plan strictement historique, de ne pas prendre en compte
le fait que (comme je l’ai dit dans mon article) Heidegger ne fut pas le seul philosophe allemand
à vouloir fournir une fondation « philosophique » aux absurdes et risibles préjugés culturels et politiques
des nazis.
Dan son livre important, Hans Sluga a bien souligné cet aspect (peu connu en France)
de la vie intellectuelle allemande de cette époque.
C’est pourquoi je ne pense que Heidegger ne fut absolument pas celui qui, le premier,
aurait « introduit le nazisme en philosophie ».
Ce qui ne veut nullement dire que il n’était pas nazi ou qu’il n’avait pas encouragé une partie importante
de la jeunesse allemande à adhérer à la « Weltanschaung » nazie comme l’avait constaté, entre autres,
un témoin écoeuré comme Raymond Klebanski.
Heidegger est aujourd’hui est aussi mort que le régime nazi mais la volonté nihiliste de persécuter
« l »Être » en lui trouvant des fondements absolus qui puissent justifier l’exclusion de « l’Autre » est bien
active et non seulement en Europe.
En témoigne la résurgence des intégrismes de tout genre partout dans le monde
Mon espoir est de pouvoir penser cette volonté nihiliste et le combattre.
L’analyse philosophique (et non pas la simple excommunication moralisante ou réductionnistes) des concepts
que Heidegger élabora tout au long de sa carrière, selon moi, puisse être d’une grande utilité à ce combat intellectuel
et culturel.
Un dernier détail mérite aussi d’être souligné, à savoir, que même un impitoyable critique marxiste
de Heidegger comme Domenico Losurdo le considère comme un « grand intellectuel
européen ».
Car être « grand », comme Nietzsche l’a mémorablement formulé, ne signifie pas
être parfait ou incritiquable.
Celui ou celle qui est « grand » risque même de devenir, comme Heidegger, une « idole » qu’il faut
savoir briser afin de pouvoir librement penser cette énigme qui est l’humanité contemporaine.
Bien Cordialement,
Simon F Oliai
:
Cher Simon Olai,
je viens de lire le message collectif que vous nous avez envoyé. Comme j’animais ce matin à l’université de Minneapolis un workshop précisément sur le sujet que vous indiquez, j’ai lu de près votre texte et dois vous dire que je m’interroge sur le sens de votre phrase: « penser la pertinence contemporaine du sens philosophique de l’adhésion d’un grand intellectuel européen comme Heidegger à l’idéologie national-socialiste dans les année 30s ». Entendez-vous vraiment soutenir que l’adhésion heideggérienne au national-socialisme aurait pour aujourd’hui une « pertinence » philosophique? Et si oui, en quel sens? Croyez bien que je n’entends réactiver aucune polémique – j’ai indiqué récemment dans Philosophy Today que je me retirais d’un débat aujourd’hui saturé. Je vous demande un simple éclaircissement qui intéressera peut-être les autres destinataires et ne commenterai pas votre réponse.
Bien attentivement,
Emmanuel Faye