Le 19 février 2013, le Premier ministre tunisien Hamadi Jebali posait sa démission. Cet acte faisait suite à l’assassinat du Tunisien laïc de gauche Chokri Belaïd, leader de l’opposition, abattu devant son domicile à Tunis. Trois jours plus tard, le 22 février, le président Moncef Marzouki demandait au nouveau Premier ministre, Ali Larayedh, nommé officiellement deux semaines plus tôt par le chef du parti El-Nahda, Rached Ghannouchi, de former un gouvernement.
Avant son affectation au poste de Premier ministre, Larayedh occupait la fonction de ministre de l’Intérieur sous le gouvernement de Jebali. Auparavant, il avait passé 15 ans en prison sous le régime du président Zine El Abidine Ben Ali.
Après avoir obtenu l’aval du parlement pour son nouveau gouvernement, Larayedh a officiellement pris ses fonctions le 14 mars, jour même de l’enterrement d’un jeune vendeur itinérant qui s’était immolé à Tunis pour protester contre le chômage, rappelant l’acte de Mohamed Bouazizi, déclencheur de la Révolution du jasmin.
La nomination de Larayedh au poste de Premier ministre n’a pas été vue d’un bon œil par l’opposition laïque et libérale. Dans un communiqué, le Front populaire, une coalition de groupes d’opposition de gauche, dont Belaïd faisait partie, déclarait que Larayedh était l’une des personnalités portant la responsabilité politique de l’assassinat de Belaïd. L’opposition libérale accuse le mouvement islamiste Ennahda, qui a remporté une majorité relative aux élections de 2011 en Tunisie, de la responsabilité morale et politique de l’assassinat (voir aussi l’Enquête et analyse n° 932 de MEMRI, « Assassinat du chef politique tunisien Chokri : pour les médias tunisiens, le gouvernement est responsable », 13 février 2013.
Toutefois, le 8 février, l’organe de presse tunisien Kapitalis publiait un long éditorial du journaliste tunisien Rachid Barnat, statuant que la responsabilité politique de l’assassinat ne repose pas seulement sur Ennahda, mais aussi sur la troïka au pouvoir, comprenant Ennahda, le Congrès pour la République (CPR) et Ettakatol. Barnat accuse la troïka de n’avoir rien mis en œuvre pour arrêter la montée de l’islamisme dans le pays, et affirme que si la Ligue de protection de la révolution (LPR) est considérée comme la milice d’Ennahda, le chef du CPR et président tunisien Moncef Marzouki peut être considéré comme ayant « flirté » avec la LPR – que l’opposition tient également pour responsable de l’assassinat de Belaïd.
L’assassinat politique de Belaïd n’était pas le premier du genre dans le pays depuis la Révolution de jasmin. Le 18 octobre 2012, Lotfi Nagued, coordinateur du parti laïc Nidaa Tounes, était battu à mort par des membres de la LPR, dans son bureau à Tataouine. Le chef du parti Nidaa Tounes, Beji Caïd Essebsi, a qualifié la mort de Nagued d’« assassinat politique ». Lors d’une réunion le 1er février 2013 du Conseil de la Choura d’Ennahda, les participants ont suggéré que les tueurs de Nagued et membres de la LPR devaient être libérés de prison. Quelques jours plus tard, à la veille de sa mort, Belaïd avait déclaré sur la chaîne nord-africaine Nessma TV qu’en suggérant une chose pareille, Ennahda avait donné le feu vert aux assassinats politiques dans le pays.
« Qui a tué Chokri Belaïd ? »
Le 21 février, sur son site web Debatunisie.com, le dessinateur tunisien « _Z_ » publiait une série de dessins animés qui mettaient en exergue la responsabilité politique du gouvernement dans l’assassinat de Chokri Belaïd – et alléguaient que le Premier ministre Ali Larayedh, parmi d’autres, devrait rendre des comptes aux autorités judiciaires pour cet assassinat.
Dans un communiqué, le Front populaire se déclare opposé à la nomination de Larayedh au poste de Premier ministre
Suite à la nomination de Larayedh comme nouveau Premier ministre, le Front populaire publiait un communiqué déclarant qu’il était l’un des symboles de l’échec du précédent gouvernement, et directement responsable de la situation sécuritaire actuelle du pays.
Le communiqué déclarait : « La désignation d’Ali Larayedh comme chef du gouvernement est une recomposition du gouvernement de contournement de la révolution: de nouvelles têtes apparaissent, mais sont maintenus les mêmes choix qui ont conduit à l’échec du gouvernement précédent. La gouvernance se fait dans une logique de quotas entre partis et de partage du gâteau entre eux, au détriment des intérêts du peuple et du pays.
La situation du pays est catastrophique avec l’aggravation de la souffrance de toutes les couches du peuple, l’absence de sécurité, la prolifération des armes, la cherté de la vie, la liberté d’action laissée aux milices, la panne de productivité et la paralysie de l’administration, le ternissement de la réputation du pays au niveau international, la tergiversation dans la divulgation des coupables qui ont commandité, planifié, exécuté et offert une couverture au crime d’assassinat du martyr de la patrie, le secrétaire général du Parti des patriotes démocrates unifié et dirigeant du Front populaire, le camarade Chokri Belaïd. »
Eu égard aux déclarations successives des responsables du mouvement Ennahda sur la formation d’un gouvernement de coalition large, et l’entêtement à poursuivre les mêmes politiques qui ont conduit le pays à cette situation catastrophique, le Front populaire déclare ce qui suit:
• Nous rejetons catégoriquement cette orientation qui ne sert pas les intérêts du pays en cette période critique de transition qui nécessite un large consensus dépassant les intérêts partisans et personnels étroits. Pour cette raison, le Front refuse donc la nomination d’Ali Larayedh comme chef du gouvernement. Il est en effet l’un des symboles de l’échec cuisant du gouvernement précédent et le responsable direct de la situation sécuritaire dans laquelle se trouve le pays: prolifération des armes à grande échelle, exacerbation de la violence politique organisée, attaques contre les militants. La responsabilité politique d’Ali Larayedh est par ailleurs engagée dans l’assassinat du martyr de la patrie Chokri Belaïd;
• Nous imputons la responsabilité au président de la République par intérim de ne pas chercher une sortie de crise sérieuse en ne se servant pas de l’article 19 de la Constitution, contribuant ainsi à la continuité de la logique des contingences partisanes;
• Nous considérons que la formation d’un gouvernement de coalition partisane à grands effectifs est une reproduction de la crise qui s’est installée depuis plus de sept mois, et durant laquelle les intérêts du pays ont été sacrifiés et la souffrance des citoyens aggravée, notamment les travailleurs et les marginalisés;
• Nous renouvelons notre attachement à la nécessité de tenir une conférence nationale de sauvetage qui détermine de manière conventionnelle le programme de ce qui reste de la phase transitionnelle. Cette conférence devra choisir une équipe gouvernementale à effectifs réduits composée de compétences nationales loin des appartenances partisanes et revenir sur les nominations administratives faites sur la base de la loyauté partisane. Cela est nécessaire pour gérer la phase transitionnelle restante sur la base d’un programme conventionnel afin de :
– garantir des agendas politique, électoral et constitutionnel clairs ;
– mettre en place des instances de régulation de l’appareil judiciaire, des médias et des élections ;
– créer un climat propice à la tenue d’élections libres et démocratiques, en particulier dissoudre les dites ligues de protection de la révolution et les milices de la violence organisée ;
– prendre des mesures d’urgence économiques et sociales permettant notamment la réduction de la souffrance de la population ;
• Nous appelons les masses de notre peuple à continuer la lutte par tous les moyens pacifiques possibles. Nous appelons également toutes les forces démocratiques à unifier les rangs contre les manœuvres de ceux qui ont échoué et qui ne feront qu’approfondir la crise et aggraver la souffrance des Tunisiens. Ceci afin de sauver le pays du danger qui le guette, imposer des solutions sérieuses qui soulagent les souffrances du peuple, instaurer la sécurité, dévoiler le nom des criminels, mettre fin à la violence, et dessiner un horizon politique constitutionnel clair pour le restant de la période de transition.
• Nous exigeons l’accélération de la divulgation du nom des responsables qui ont commandité et mis en œuvre l’assassinat du martyr camarade Chokri Belaïd. »
LPR – branche armée d’Ennahda ou garante de la révolution ?
Chokri Belaïd, qui vivait dans la crainte d’un assassinat, avait été menacé par la Ligue de protection de la révolution (LPR), que l’opposition tunisienne considère comme la branche paramilitaire armée d’Ennahda. L’opposition considère que la LPR est derrière l’assassinat de Belaïd.
Ci-dessous des extraits d’un article publié sur le site de Ettounsiya TV avant l’assassinat de Belaïd, accusant le président tunisien Moncef Marzouki en personne de légitimer ce mouvement paramilitaire.
« Les tentatives d’intimidation, d’incitation à la haine et d’usage de la violence… sont les moyens mis en œuvre en Tunisie par le mouvement révolutionnaire controversé connu sous le nom de Ligue de protection de la révolution. C’est un groupe de gens qui ne se prive pas d’user d’une extrême [violence] pour imposer sa loi et répandre un climat de tension.
“La question sur toutes les lèvres : La révolution tunisienne serait-t-elle fragile ou défaillante au point qu’il faille la préserver et la protéger ? C’est en tout cas l’avis de la Ligue de protection de la révolution (LPR), qui estime que c’est nécessaire de la défendre contre toute tentative de récupération contre-révolutionnaire. Si l’objectif semble noble, la manière l’est moins, car il s’agit bien là du proverbe machiavélique: La fin justifie les moyens.”
“Première apparition publique, annonce un dérapage majeur qui a lieu à Tataouine, le 18 octobre 2012, la LPR, avec le soutien de deux partis de la troïka au pouvoir, le Congrès pour la République (CPR) et Ennahdha, conduit une « marche de l’assainissement » pour se « débarrasser et écarter du chemin les ennemis du peuple et de la révolution ». Essentiellement dirigée contre le parti Nida Tounes, cette marche se solde par l’agression et par la suite le décès de son coordinateur local, Lotfi Nagued. Le 4 décembre 2012, c’est au tour des syndicalistes de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) d’être violemment attaqués par des militants de la Ligue qui réclament l’épuration du syndicat. Des incidents qui paralysent le pays et le conduisent au bord d’une grève générale.”
“La Ligue, qui se veut porteuse de la voix du peuple, s’est baptisée « l’âme de la révolution », et a manoeuvré à des violences politiques de grande ampleur notamment dirigées contre la société civile. Elle a par ailleurs lancé des menaces à l’Association tunisienne de soutien des minorités pour avoir célébré, le 29 décembre 2012, la déportation des Juifs tunisiens durant la Seconde Guerre mondiale, tout comme elle a fait recours à des méthodes d’intimidation contre les journalistes du site Nawaat lorsque celui-ci a révélé l’implication de deux de ses membres dans une affaire suspect de trafic d’armes et de projet d’assassinat de notoriétés politiques. Cette même mouvance a protesté de facon catégorique contre les médias, qu’elle dénonce comme étant incompétents et corrompus. Enfin, pour désigner sur une liste noir ceux qu’elle juge être les meneurs de la contre-révolution, trois personnalités y figurent le chef de la communauté juive Roger Bismuth, le leader de Nida Tounes Béji Caïd Essebsi et le lobbyiste Kamel el-Taief.”
La LPR s’est transformée en milice qui recourt à la violence contre les opposants d’Ennahda
“La Ligue affirme vouloir défendre et veiller à la protection des objectifs de la révolution, mais ses ses méthodes sont suspects et louches tels que les maintes – intimidations, incitations à la haine, recours à la violence – ce qui a fini par remettre en question ses idéaux. Samir Rabhi, porte-parole de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, explique : « Après le 14 janvier, la LPR était une mouvement citoyen qui avait pour but d’assurer la protection des quartiers, des villages et des villes. Mais aujourd’hui, ces objectifs n’ont plus de validité. Elle s’est transformée en une milice qui intervient d’une manière violente et par le recours à la force pour empêcher les meetings de partis opposés à Ennahdha. » Il ajoute que nombreux sont les membres de la Ligue à afficher leur affinité avec le parti islamiste.”
“Depuis juin 2012, la ligue s’autodéclare comme une association. Mais ses représentations régionales et ses bureaux locaux visent à contredire cette thèse et la place au rang d’ une puissante organisation. Elle est principalement financée par les cotisations de ses membres et des dons. Ayant principalement ses fiefs dans les villes côtières, elle demeure en retrait dans les régions intérieures, où son idéologie révolutionnaire semble moins populaire. Hamadi Maamer, responsable de la section de Sfax, affirme que la mission primaire de la Ligue est de sauvegarder les acquis de la révolution, engager et protéger l’éveil révolutionnaire, et défendre l’identité arabo-musulmane. La Ligue cherche également à dénoncer la corruption et les abus de l’ancien régime, mais aussi promouvoir un Etat de droit qui est fondé sur les principes universels des droits de l’Homme.”
Sur la liste des ennemis de la LPR se trouvent tous ceux qui critiquent le gouvernement
“Tenant compte des faits, la Ligue s’adonne à une véritable chasse aux sorcières. Dans sa liste d’ennemis de la révolution on retrouve : Nida Tounes, les « pseudos-rcd » de l’ancien régime, détermines d’ hommes d’affaires corrompus, des partis de l’opposition, des élites laïques, des médias et tous ceux qui remettent en question la légitimité gouvernementale. Jouant sur l’argument classique de l’instabilité du pays, la Ligue a dénoncé diverses théories du complot pour « lutter contre ceux qui se préparaient à semer le trouble dans le pays », affirmant qu’ils raisonnent comme le régime de Ben Ali . Ainsi tous ceux qui ne sont pas avec eux sont forcément contre eux, et ces derniers cherchent à user de la révolution pour réétablir un régime qui fondé sur les mêmes préceptes que la dictature », clame un sympathisant du Front populaire, à Médenine. La Ligue ne s’estime pourtant ni terroriste ni réellement militante. Mais il est incontestable qu’ elle a un pouvoir de nuisance . On lui reproche aussi d’ être dénuée d’une véritable réflexion intellectuelle et à se servir d’un registre populiste en s’élevant au rang de la gardienne de la révolution. Pour l’islamologue Abdelmajid Charfi, « les LPR sont en étroit rapport avec la révolution. Ce sont des organisations qui sont propres aux régimes totalitaires et qui vont au-delà des institutions de l’État avec pour objectif majeur de changer la société.”
La LPR bénéficie du soutien du CPR
“Il va s’en dire que la Ligue reçoit l’appui du Congrès pour la République (CPR), lequel, à son tour, l’a instrumentalisée à des fins politiques pour obtenir un soutien populaire sur le principe d’exclusion politique qu’il veut appliquer aux proches de l’ancien régime. Mohamed Abbou, secrétaire général du CPR, a déclaré que « la LPR incarne la voix officielle de la révolution et détermine un outil de pression sur le gouvernement pour lutter contre le retour de la dictature ».”
“Cependant les nombreuses accusations à son encontre, dont celles de l’UGTT, s’appuient sur des données qui visent à démontrer que celle-ci fait usage de violence, incitant à la haine, ce n’est pas conforme au règlement des associations. Cependant, cette dissolution n’est pas facile, car la Ligue se réclame d’être la voix et porte-parole du peuple ! » ”
“Pour les experts, « la LPR profite de la faiblesse de l’État”, contournant le droit institutionnel . Mais le constitutionnaliste Kaïs Saïed considère ainsi que « la Ligue ne peut en aucun cas se substituer à l’État. Elle garder une distance de toutes les formations politiques et non pas agir comme le bras droit d’un seul parti ». Néjib Chebbi, avocat et président de la commission politique du Parti républicain, prévient par contre que ce n’est pas le cas, et va même jusqu’à dire que « la Ligue constitue la milice d’un parti or cela va à l’encontre de la loi et des règles ».” (Source : http://www.ettounsiyatv.com/39021/666/1/tunisie-la-ligue-de-protection-de-la-revolution-est-t-elle-veritablement-la-garante-de-la-revolutionij.html )
L’opposition tunisienne : « la nouvelle formation gouvernementale n’est qu’une ‘copie’ de l’ancienne.»
L’opposition tunisienne considère le gouvernement récemment formé comme une suite de la crise politique du pays. Selon le porte-parole d’Al-Joumhouri, Issam Chebbi, la nouvelle formation gouvernementale n’est qu’une «copie» de l’ancienne, parce que la «troïka» n’a pas pu élargir le spectre de la coalition au pouvoir. Al-Joumhouri, dont les membres ont également été pris pour cible par la LPR, appelle le nouveau gouvernement à œuvrer pour dissoudre la LPR.
« Issam Chebbi estime que l’approche retenue a finalement été celle des quotas partisans, c’est-à-dire de la répartition des portefeuilles ministériels entre les trois partis de la «troïka» : Ennahdha, le Congrès pour la république et Ettakatol.
Pour sortir du flou qui a caractérisé la seconde phase de la transition politique, il aurait fallu constituer un gouvernement de salut national, le seul capable de remettre sur les rails le processus démocratique, a expliqué M. Chebbi, estimant que la nouvelle formation proposée par Ali Lârayedh aura du mal à rassurer les Tunisiens et à conduire à son terme l’étape de transition.
Issam Chebbi a, aussi, précisé que le chef du gouvernement désigné, Ali Lârayedh, n’a pas exprimé sa volonté, ni celle de son équipe, de se consacrer à l’action gouvernementale, et cela en s’engageant à ne pas se porter candidats aux prochaines élections.
Le dirigeant du Parti républicain a souligné également l’absence de volonté politique claire de lutter contre la violence politique, notamment par la dissolution des Ligues de protection de la révolution (LPR), ou l’organisation d’un dialogue national destiné à l’élaboration d’un programme consensuel de salut national en cette période cruciale.
Le porte-parole d’Al-Jomhouri a, par ailleurs, considéré que la nomination de personnalités neutres à la tête des ministères régaliens est «un pas positif», précisant que son parti surveillera la prestation des nouveaux ministres […] » (Source : http://www.kapitalis.com/politique/14935-issam-chebbi-le-gouvernement-larayedh-aura-du-mal-a-rassurer-les-tunisiens.html)
Des médias tunisiens : « Les ministres les plus discrédités du gouvernement de M. Hamadi Jebali ont tous été réassignés »
Selon le média Kapitalis, la liste des ministres du nouveau gouvernement montre que « les ministres les plus discrédités du gouvernement de M. Hamadi Jebali ont tous été réassignés, dans certains cas, aux mêmes postes ».
« C’est le cas, par exemple, de Sihem Badi (Affaires de la Femme et de la Famille), l’une des ministres plus incompétentes et des plus arrogantes que la Tunisie ait eu depuis l’indépendance en 1956. N’a-t-on pas pu trouver une Tunisienne plus méritante pour défendre la cause de la femme et de la famille? La reconduction de cette provocatrice à son poste, qui plus est le jour de la célébration de la Journée internationale de la femme, peut être interprétée comme une offense à toutes les femmes tunisiennes.
L’allégeance tapageuse de Sihem Badi à Ennahdha, son parti d’origine qu’elle n’a jamais quitté, même si elle se proclame aujourd’hui du Congrès pour la république (CpR), est sans doute pour beaucoup dans sa «longévité» politique. Beaucoup plus, en tous cas, que ses compétences ô combien invisibles!
C’est le cas aussi de Abdelwaheb Maâtar, un autre Nahdhaoui déguisé en Cpriste, dont le bilan à la tête du ministère de l’Emploi et de la Formation a été quasi nul, de l’avis de tous les observateurs, et qui se voit aujourd’hui confier par Ali Lârayedh le ministère du Commerce et de l’Artisanat. Il avait dit un jour : «Le rôle du ministère de l’Emploi n’est pas de créer un emploi». Que dira-t-il de sa nouvelle mission? Bonjour les dégâts!
On pourrait dire autant de Slim Ben Hmidene, resté à la tête du ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, qui n’a pas brillé, lui non plus, par ses grandes performances. «Ouzir El Ghalba» (ministre faute de mieux), disait de lui Néziha Rejiba alias Om Zied, qui a démissionné du CpR en 2011.
On remarquera aussi que les ministres les plus décriés d’Ennahdha, de Moncef Ben Salem (Enseignement supérieur), à Noureddine Bhiri (Justice), en passant par Abdellatif Mekki (Santé), Abdelkerim Harouni (Transport), Noureddine Khademi (Affaires religieuses) ou autres Mohamed Ben Salem (Agriculture), ont également tous été reconduits, comme si le parti islamiste voulait dire aux adversaires de ces apprentis ministre, bavards, incompétents et arrogants à la fois: «Vous les critiquez ? Alors vous les aurez pour un nouveau bail!» (source : http://www.kapitalis.com/politique/14910-tunisie-les-ministres-les-plus-impopulaires-reconduits-dans-le-cabinet-larayedh.html)
ANNEXE – Les ministres du nouveau cabinet tunisien
Ali Larayedh : Premier ministre
Lotfi Ben Jeddou : ministre de l’Intérieur
Nadhir Ben Ammou : ministre de la Justice
Rachid Sabbagh : ministre de la Défense
Othman Jarandi : ministre des Affaires étrangères
Abdelwaheb Matar : ministre du Commerce
Naoufel Jamali : ministre de la Formation et de l’Emploi
Slim Ben Hamidene : ministre des Domaines de l’Etat
Jamel Gamra : ministre du Tourisme
Salem Abyadh : ministre de l’Éducation
Mehdi Jomaa : ministre de l’Industrie
Sihem Badi : ministre des Affaires des femmes
Nourredine Khadmi: ministre des Affaires religieuses
Khalil Zaouia : ministre des Affaires sociales
Moncef Ben Salem : ministre de l’Enseignement supérieur
Abdelkarim Harouni : ministre des Transports
Mohamed Selmane : ministre du Logement
Elyes Fakhfakh: ministre des Finances
Abdellatif Mekki : ministre de la Santé
Mohamed Ben Salem : ministre de l’Agriculture
Samir Dilou : ministre des Droits de l’homme et de la Justice transitionnelle
Jamel Eddine Gharbi : ministre du Développement
Tarek Dhiab : ministre de la Jeunesse et des Sports
Mongi Marzoug : ministre des Technologies de la Communication
Amin Doghri : ministre de la Coopération internationale et du développement
Les sous-ministres du cabinet du Premier ministre :
Noureddine Bhiri : vice-ministre des Affaires politiques
Ridha Saïdi : vice-ministre des Affaires économiques
Abderrahman Ladgham : vice-ministre de la Transparence et de Lutte contre la corruption
Ministères adjoints aux ministères individuels :
Leila Bahria : vice-ministre des Affaires étrangères
Ledit Mchichi: vice-ministre des Affaires locales et régionales
Nidhal Ouerfeli: vice-ministre de l’Énergie
Houcine Jaziri: vice-ministre adjoint des Affaires sociales dans la section de l’immigration
Chahida Ben Fraj Bouraoui: vice-ministre du Logement
Sadok Amri : vice-ministre de l’Environnement
Chedly El Abed: vice-ministre des Finances
Habib Jemli: vice-ministre de l’Agriculture
Fathi Touzri: vice-ministre de la Jeunesse et des Sports
Nourredine Kaabi: vice-ministre du développement régional
* Anna Mahjar-Barducci est chargée de recherche au MEMRI.