Le Prix de Flore, décerné au Café du même nom depuis 1994, avait l’avantageuse coutume de couronner des auteurs aussi futurement estimables que Vincent Ravalec, Michel Houellebecq, Virginie Despentes, Guillaume Dustan, Christophe Donner, Joy Sorman, Christine Angot, Amélie Nothomb ou Simon Liberati.
Le Prix de Flore était décerné par un jury composé de gens aussi estimables que Frédéric Beigbeder, Manuel Carcassonne, Arnaud Viviant, François Reynaert, Bertrand de Saint-Vincent et quelques autres.
Le Prix de Flore, cette année, vient d’être décerné hier à Michael Jackson. Oui, Michael Jackson ! Et ce n’est pas bien. C’est même tout à fait fâcheux. J’oserais dire plus, c’est nul.
Le Prix de Flore, en apparence, a été décerné hier soir à un jeune auteur, présentement barman de son état et très certainement aussi estimable que ses prédécesseurs lauréats, Oscar Coop-Phanen, pour « Zénith Hôtel ». En apparence, seulement.
Car le vrai lauréat du Prix de Flore, ce sont bel et bien Michael Jackson et consorts, sur le dance Flore duquel et la « musique » – si l’on peut dire – desquels, se défoulait hier soir toute une population de zombies lunaires branchouillés qui avaient à voir avec la littérature ce que la littérature a à voir avec la branchouillade pubomodeuse parisienne.
Hommage du vice à la vertu, Saint-Germain-des-Près, on ne le sait que trop, est, de quartier jadis des écrivains et des artistes, devenu le grand Central des boutiques de fringue, de bijoux et autres colifichets non moins indispensables aux Lettres et à la vie de l’esprit que votre tondeuse à gazon ou votre vibromasseur. Feu Saint-Germain-des-Près. La Hune vient de céder la place à Cartier ou Vuitton, ou quelque coiffeur pour dames et shampoinneur de même acabit. La Société des Gens de Lettres est devenue la Société tout court. Restent le Flore, Les Deux Magots, Lipp, L’Ecume des Pages, le Roustan un peu plus loin. Autant de phares brillant dans les ténèbres, régnant partout ailleurs, de la chic-marchandise pour connards friqués.
Et voilà que le Flore se transforme en boîte de nuit d’un soir.
Je ne vais pas invoquer les mânes des grands ancêtres du Flore, le respect n’est plus ce qu’il était, nous sommes tous bien d’accord, et la mémoire est une affreuse petite chose ressentimenteuse. Mais Michael Jackson, cher Miroslav, non ! Pas ça.
La fête, oui. Le bastringue, oui. L’alcool, oui, les Zazous, Mouloudji, les happenings de 68, oui, La Règle du Jeu, oui, la déconnade beigbedérienne, oui, le Prix de Flore, oui.
Mais pas ce Dance Flore à deux balles, pas la fièvre du jeudi soir à Saint-Germain des Pitres et des Pires.
Le Flore mérite mieux que cette ringardise, que cette bâtardise. Noblesse oblige, et le reste.
A commencer, peut-être, par la littérature, cette pleureuse, cette sale petite emmerdeuse, qui voudrait, l’insolente, empêcher les braves gens de danser un soir à Saint-Germain-des-Prés sur son cadavre. Crève, salope ! Et vive Michael Jackson !
Mais trêve de lamento ! Toujours critiquer ! Pour une fois, soyons positifs, shit, man ! Soyons constructifs, et, tous ensemble, regardons l’avenir.
La boîte de nuit, c’est fait et bien fait. N’y revenons plus. Je suggérerais que l’an prochain, pour le Prix de Flore, le Flore d’un soir se fasse, au choix, patinoire chauffée avec vin chaud, pédiluve de champagne (mais un bain mousseux fera aussi bien l’affaire), ring de boxe française (avec, en match vedette, courte exhibition de Busnel-la petite Frappe contre le lauréat), ou encore foire aux manuscrits refusés chez Gallimard.
Mais non. mauvaises idées. Fausses routes. Hier soir, une première pierre vient d’être posée. Une voie a été ouverte. Elle ne doit pas rester sans lendemain. Il faut absolument poursuivre l’entreprise. L’inscrire dans les murs, persévérer, faire mieux. Tout en restant, fidélité oblige, dans le même esprit super-swing.
Ca y est, j’y suis. L’an prochain, pour le Prix de Flore, soirée KARAOKE, yeah !
Un empêchement m’a privé de cette soirée; j’allais le regretter. Mais votre superbe texte , qui va bien au delà de l’anecdote, m’a évité cette erreur. Je vous en remercie. Grégoire
ah bon, aimer Michael Jackson ce n’est pas assez bien pour vous monsieur Hertzog! bon, si vous le penser comme celà, vous ne présenter aucuns intérets, mais vous me faite rire, a vous prétendre intélo car votre absence d’ouverture d’esprit me fait dire que votre niveau est très loin de celui qui vous aimeriez poséder.
salut l’intélligencia parisien! très très nul