La suppression dans leur bouche du mot antisémitisme est un négationnisme

lundi 03 juin 2024

Pour Christine Angot, le langage a toujours été un engagement qui implique l’être humain dans la totalité de son être, et les mots autant de repères, d’appuis pour se livrer à la plus dure des tâches : comment dire le réel ? Comment restituer les nuances, les silences et les plis de chaque expérience, individuelle ou historique, qui survient en ce monde ?

C’est en tant qu’amoureuse et que gardienne des mots qu’elle prend ici la parole. Pour s’indigner de l’usage qui est fait du langage depuis le 7 octobre. Avec force, elle dénonce le sabir de l’indifférence : celui qui, sous couvert de concepts, arase les souffrances. « Il n’y a donc personne à Sciences-Po, s’étonne-t-elle par exemple, pour leur dire qu’indifférencier sous un seul mot mène à l’indifférence ? Et que la suppression dans leur bouche du mot antisémitisme est un négationnisme ? »

Car l’antisémitisme est aussi un phénomène linguistique. Haine de la nuance, plaisir presque pornographique d’hyperboliser dans l’art de l’insulte, d’inverser la victime et le bourreau, l’attaque et la défense, de nier les massacres quand ils frappent les Juifs pour mieux accuser ces derniers d’être génocidaires. Plaisir, extase meurtrière de mal nommer les choses.

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