En lutte contre les brutalités d’une langue radicalement étrangère, Mohandas Karamchand Gandhi, dans sa prison de Mumbay (ex-Bombay), avait toujours à la main le texte de la conférence prononcée par le philosophe H D Thoreau. Conversation accueillie avec des sentiments mitigés, en 1846, et éditée trois ans plus tard ; ne méritant pas d’autre honneur ou épitaphe que le silence et l’oubli. Désobéissance civile se dit en sanskrit ahimsā : Gandhi allait répandre ce terme avec vénération.
Thoreau se refusa à collaborer avec un État en guerre contre son Mexique bien-aimé autant qu’inconnu ; en outre, il n’appréciait pas de voir ce même État maintenir un régime esclavagiste. C’est pourquoi, en simple citoyen, il refusa de payer ses impôts. Ce qui permit aux autorités de comprendre combien il se montrait fermement vertueux et radical dans ses fruits, ses branches et son tronc. Sans prendre plaisir aux douceurs de la tolérance, elles le mirent en prison, car, selon elles, le plus sûr était de ne pas réveiller un dormeur, quand le philosophe osa dire que l’arbre au plus noble sommet a des sabots aux pieds. Henry Miller a déclaré que Thoreau est ce qu’on peut trouver de plus rare sur la croûte terrestre. Le philosophe soutenait avec mesure et droiture : nous sommes des individus d’abord et seulement ensuite des citoyens. Il révéla le secret de la véhémence de ses opinions et de son extrême libéralisme en affirmant : Tout homme qui a davantage raison que ses voisins constitue une majorité d’UN. Il n’a jamais rien exigé de personne et était encore moins tenté par l’anarchie. Il n’a jamais demandé qu’il n’y ait pas de gouvernement mais un meilleur gouvernement. Sans mépris de sa condition (la plus obscure), il a déclaré qu’un État libre ne pourra jamais exister tant qu’il n’acceptera pas de reconnaître l’individu comme une puissance supérieure, seule source de son pouvoir et de son autorité.
Il était comme un Indien marchant vers sa destination dans un Far West de cowboys ; c’était le Spinoza de l’industrialisation, pensant son existence et vivant ses idées. Son journal était son examen de conscience quotidien alors qu’il décrivait le cosmos et l’univers à partir de sa Voie Lactée. Il ne s’est jamais départi de son éthique existentielle individuelle et radicale avec Schopenhauer, Stirner, Spinoza. C’était, sans prêcher, le contrepoint individualiste aux solutions et aux utopies.
Ni embusqué ni camouflé, observant sa conscience, il s’inspirait d’évidences telles que l’homme est riche en proportion de la quantité de choses dont il peut se passer. Il faisait don du fruit de son travail et de son adresse : chez moi il y avait trois chaises : une pour la solitude, la deuxième pour l’amitié, et la troisième pour la société. Il ne s’est pas laissé submerger par les incohérences ni par la colère de ses auditeurs et lecteurs les plus radicaux. Il affirmait que la bonté est le seul investissement qui ne déçoit jamais.
Il a pu écrire sur ce que presque personne ne songeait à faire : Par exemple, sur la succession des arbres dans la forêt, les teintes de l’automne, les pommes sauvages, la lumière de la lune, les temps de maturation des fruits, la profondeur des étangs, ou les jours où les oiseaux migrent. Il a été le piéton-poète diverti par son penchant pour les libertés et les délices illicites. Ce fut le philosophe qui étudia scrupuleusement les phénomènes naturels et, amassant une foule d’exceptions et de confusions, est devenu un scientifique. Thoreau, et non seulement à cause de la nouvelle race de braillards, était et est considéré comme un homme des cavernes arriéré, un original réactionnaire, un provincial grincheux hostile à tout progrès matériel, un ultra qui tourne le dos à toute idée de progrès. On a prétendu qu’il s’aliénait le « positivisme scientifique ». Il y avait même ceux qui le taxaient de très mauvais, très mauvais, très mauvais… et en outre d’être un bigot ne cherchant qu’à conduire l’homme à une vie animale et dégradante. Au contraire, Jean Giono s’est inspiré de ses concepts philosophiques pour écrire son Refus d’Obéissance, Romain Rolland a qualifié ses écrits de Bible du grand individualismeet Marcel Proust, Léon Tolstoï Martin Luther ont tiré beaucoup de profit de sa lecture ; comme Ernest Hemingway ou Bernard Shaw. Thoreau a tenté de rencontrer Walt Whitman en parcourant 347,8 km : la distance entre son village et la mère du poète.
Henry David Thoreau est né le 12 juillet 1817 dans un petit bourg du Massachusetts : Concord, comme son élève, la romancière des Quatre filles du docteur March (« Little Women »). Son grand-père paternel d’origine anglaise était venu au Nouveau Monde sur un navire corsaire. Pendant la majeure partie de sa vie d’adulte, Thoreau a fabriqué des crayons comme son père et sa famille, et il les faisait à merveille ! Il a découvert le processus de fabrication de bons crayons avec du graphite de qualité inférieure. Il étudia à Harvard entre 1833 et 1837. Son grand-père maternel Asa Dunbar avait joui aussi d’une certaine notoriété en prenant la tête, en 1766 – précisément à Harvard – de la révolte du beurre : la première contestation étudiante. Les diplômes universitaires – droit, église, commerce, médecine – ne l’intéressaient pas. Il enseigna alors à l’école publique, mais il démissionna bientôt pour ne pas avoir à administrer les châtiments corporels obligatoires. Il refusa de payer les frais de cinq dollars par diplôme. Il dit à l’administration qu’il préférait que chaque mouton garde sa propre peau – à son époque, des rouleaux de peau de mouton étaient utilisés pour les diplômes.
Le 4 juillet 1845, son ami intime Ellery Channing [poète « transcendentaliste », mais pas encore « satrape »] le recommandait : « Allez, construisez une cabane et commencez le grand processus de vous dévorer ». Thoreau éleva de ses mains une hutte au milieu de la forêt, dont aujourd’hui une réplique est visitée : à 2 km et demi de sa maison natale. C’était un endroit mystérieux pour lui. Une place murée (que voulait-il dire par un tel mot ?). Il connaissait bien l’étang (son lac) depuis son enfance. La construction de la hutte, décrite en détail, est une métaphore qui illustre la construction de l’âme. Il a essayé de disparaître temporairement de la vie, de rejeter l’existence occupée uniquement à la poursuite de la subsistance quotidienne, pervertissant de facto la liberté dans le désespoir. Il ne s’agit pas d’une évasion ou d’un refuge d’ermite, puisque l’écrivain revenait souvent voir ses amis, mais cela rappelle l’expérience de Jean-Jacques Rousseau dans la forêt d’Ermenonville. Thoreau en mouvement et en « inter-action » avec son environnement naturel et social offre toujours des découvertes, même avec ses promenades. Il fut le premier randonneur et un canoéiste de championnat. Il observe en détail la nature, ses concitoyens, son domaine, enregistre et note avec des observations de plus en plus détaillées « Ma vie est le poème que j’aurais aimé écrire puisque vivre est mon métier pour m’émerveiller de ce qui m’entoure ».
Dans la cabane, il a vécu en autarcie. Pour ce faire, il a planté un hectare de pommes de terre, haricots, blé, maïs, etc. Le lieu s’est fait connaître grâce à son livre Walden ou la vie dans la forêt : Une vie de simplicité, d’indépendance, de magnanimité et de confiance. Thoreau a donné à ses contemporains l’exemple d’une relation active avec la nature, le concept de « simplicité volontaire ». André Gide disait de Walden : Ce n’est ni un roman ni une véritable autobiographie, mais une critique du monde occidental, l’histoire d’un voyageur immobile qui narre sa révolte solitaire.
Thoreau contracta la tuberculose, ravivée par l’air chargé de poussière de graphite comme Spinoza frottant ses lunettes. Il continua à écrire des lettres et à tenir un journal jusqu’à ce qu’il se trouve trop frêle pour tenir un stylo. On était étonné de sa calme acceptation de la mort. Il s’est occulté le 6 mai 1862 dans son village non loin de son Wallden, à l’âge de 44 ans. Quelques jours avant que sa tante Louisa lui demande s’il avait fait la paix avec Dieu, Thoreau a répondu : « Je ne savais pas que nous nous disputions ».
John Updike m’a dit il y a une vingtaine d’années au restaurant Sardi’s à NY : « Walden est devenu un totem en un peu plus d’un siècle, le totem du retour à la nature ! Il a vécu, si authentiquement, en ermite, que son livre est en danger, comme la Bible, d’être acheté mais pas lu. »
En español
Los lapiceros del filósofo Thoreau
A revueltas de las brutalidades de un idioma cerril, en la cárcel de Mumbai (ex-Bombay) el libro de cabecera de Mohandas Karamchand Gandhi agarrado a su mano fue el muy fregado texto de la charla impartida por el estadounidense Thoreau. Plática acogida con sentimientos enjutos en 1846 y sacada a la luz y editada tres años más tarde, no mereciendo más honra ni más epitafio que el silencio o el olvido. Desobediencia civil se dice en sánscrito ahimsā, que Gandhi divulgaría con el sentimiento de su veneración.
Thoreau se negó a colaborar con un Estado que guerreaba contra su bienquisto y desconocido México, y además no le gustaba en absoluto que mantuviera su régimen de esclavitud. Por eso, desde el montón, se negó a pagar sus impuestos. Con ello los que mandaban comprendieron cómo era vigorosoen las virtudes y supieron de raiz cuáles eran sus frutos sus ramos y su tronco. Sin ellos regodearse en las monerías de la tolerancia fue encarcelado. Pues según los mandos lo más seguro era no despertar a quien duerme, cuando el filósofo se atrevió a decir que el árbol más copetudo tiene zoquetes en los pies.
Henry Miller afirmó que “Thoreau es lo más raro que se puede encontrar sobre la capa de la Tierra”. El filósofo sostenía con templanza y limpieza: “lo primero: somos individuos y tan solo luego ciudadanos”. Destapó los entresijos de la turbulencia de sus opiniones y su liberalismo extremo afirmando: “cualquier hombre que tenga más razón que sus prójimos constituye una mayoría de uno”. Nunca exigió nada de nadie y aún menos con ramos de anarquismo. Ni pidió que no hubiera gobierno, sino “un gobierno mejor”: Sin menospreciar desde su asiento (el más oscuro) dijo: “nunca podría existir un Estado libre hasta que no acepte reconocer al individuo como un poder superior del cual toda su potencia y autoridad se derivan”.
Fue como un indio marchando hacia su destino en un far west de cowboys. Fue el Spinoza de la industrialización pensando su existencia y viviendo sus ideas. Su diario fue su examen de conciencia día a día mientras describía el cosmos el universo desde su vía láctea. Nunca se apartó de su ética existencial individual y radical con Schopenhauer, Stirner, Spinoza. Fue, sin predicar verdades, el contrapunto individualista a las soluciones y a las utopias.
Ni emboscado ni camuflado, mirando a su conciencia, se le ocurrían evidencias como “el hombre es rico en proporción a la cantidad de cosas de las que puede prescindir”. Daba de balde sus hechuras y sus buenas mañas: “en mi casa había tres sillas: una para la soledad, dos para la amistad, tres para la sociedad”. No le sofocaban las inconsideraciones y enfurecimiento de sus más radicales oyentes y leyentes. cuando aseguraba: “la bondad es la única inversión que nunca quiebra”.
Era capaz de escribir sobre lo que casi nadie hacía : Por ejemplo sobre la sucesión de los árboles del bosque, los tintes otoñales, las manzanas silvestres, la luz de la luna, las épocas de maduración de la fruta, la profundidad de los estanques o los días en que las aves emigran. Fue el peatón-poeta-turista entretenido por su inclinación a las libertades y los deleites forajidos. Fue el filósofo que estudiando escrupulosamente los fenómenos naturales y amontonando una población de excepciones y confusiones se convirtió en científico.
Thoreau, y no solo por la nueva casta de vocingleros, fue y es considerado un atrasado cavernícola, un original reaccionario, un gruñón provinciano hostil a todo progreso material, un ultra que “da la espalda a toda idea de progreso”. Se pretendió que enajenaba el “positivismo científico” Hubo incluso quien le tachó de ser “muy malo, muy malo, muy malo y además un carca que solo busca llevar al hombre a una vida animal y degradante”. Por el contrario Jean Giono se inspiró en sus conceptos filosóficos para escribir su “Refus d’Obéissance”, Romain Rolland se refirió a sus escritos como a la “Biblia del gran individualismo” y descubrieron en su lectura mucho provecho, Marcel Proust, León Tolstói Martin Luther King Jr., Ernest Hemingway o Bernard Shaw. Thoreau intentó conocer a Walt Whitman recorriendo los 347,8 km que mediaban entre su pueblo y la madre del poeta.
Henry David Thoreau nació el 12 de julio de 1817 en un pueblecito de Massachusetts: Concord, como su alumna la autora de de “Mujercitas”.Su abuelo paterno de ascendencia inglesa llegó al Nuevo Mundo en un barco corsario. Durante la mayor parte de su vida adulta Thoreau hizo lapiceros como su padre y su familia, y ¡la mar de bien! Descubrió el proceso de hacer buenos lápices con grafito inferior. Estudió en Harvard entre 1833 y 1837. Su abuelo materno Asa Dunbar también, alcanzó una cierta notoriedad dirigiendo en 1766 -precisamente en Harvard- la “rebelión de la mantequilla”: la primera contestación estudiante. El mismo hizo cursos de retórica, filosofía, matemáticas, y ciencia. Que le hubieran abierto las profesiones tradicionales a los graduados universitarios -la ley, la iglesia, los negocios, la medicina-, pero que no le interesaron, así que enseñó en la escuela pública, pero pronto renunció para no tener que administrar el obligado castigo corporal. En Harvard por cierto se negó a pagar la cuota de cinco dólares por diploma. Dijo a los mandos que prefería “que cada borrega mantuviera su propia piel”; en su tiempo se usaban pergaminos de piel de oveja para los diplomas.
El 4 de julio de 1845 su íntimo Ellery Channing le recomendó: “Vete, construye una cabaña y comienza el gran proceso de devorarte a ti mismo”. Thoreau levantó con sus manos una choza en pleno bosque. De la que hoy se visita una réplica: 14 acres a 2 km y medio de su casa natal. Era un lugar misterioso para él. “Un lugar amurallado” (¿qué quiso decir con semejante palabra?). Conocía el estanque (“su lago”) desde su infancia. La construcción de la cabaña, descrita en detalle, es una metáfora que ilustra la construcción del alma. Trató de desaparecer temporalmente de la vida, de rechazar la existencia ocupada únicamente en la búsqueda de la subsistencia diaria, “pervirtiendo de facto la libertad en desesperación”. No se trata de una fuga o un refugio de ermitaño, ya que el escritor volvía a menudo a ver a sus amigos; recuerda la experiencia de Jean-Jacques Rousseau en el bosque de Ermenonville. Thoreau en movimiento y en interacción con su entorno natural y social siempre ofrece descubrimientos, incluso con sus caminatas. Fue el primer senderista y un canoísta de campeonato. Observa detalladamente la naturaleza, su pueblo su campo, registra y anota, con observaciones cada vez más detalladas: “Mi vida es el poema que me hubiera gustado escribir puesto que vivir es mi profesión para maravillarme de lo que me rodea”.
En la cabaña vivió en autarquía dos años, dos meses y dos días. Para ello plantó una hectárea de patatas, judías, trigo, maíz etc. El lugar que se conoció gracias a su libro como “Walden o Vida en el bosque”, “Una vida de sencillez, independencia, magnanimidad y confianza” según él Thoreau dio a sus contemporáneos el ejemplo de una relación activa con la naturaleza, el concepto de “sencillez voluntaria”. André Gide dijo de Walden “no es ni una novela ni una verdadera autobiografía, sino una crítica del mundo occidental, la historia de un viajero inmóvil que narra su rebelión solitaria”.
Thoreau contrajo la tuberculosis que se reavivó por el aire cargado de polvo de grafito como a Spinoza el frote de sus lentes Siguió escribiendo cartas y redactando su diario hasta que se encontró demasiado frágil para sostener una pluma. Asombró por su tranquila aceptación de la muerte. Se ocultó el 6 de mayo de 1862 en su pueblo, no lejos de su Wallden, a los 44 años. Días antes su tía Louisa le preguntó si había hecho las paces con Dios, Thoreau respondió: “No sabía que teníamos una pelea”.
John Updike me dijo hace una veintena de años en el Sardi’s Restaurant de NY: “Walden se ha convertidoen poco más de un siglo ¡en un tó-tem! ¡El to-tem del retorno a la naturaleza!. Vívió, tan auténticamente ermitaño, que su libro corre el peligro, como la Biblia, de ser comprado como no leído.”