De tous les problèmes qui affectent leurs sociétés, la corruption a probablement été celui dont la population des pays arabes se plaint depuis le plus longtemps.

Le ressentiment causé par la corruption est devenu un des facteurs de déclenchement des mouvements d’opposition, qui pourrait laisser la place aux islamistes, qui invoquent les valeurs morales.

En 2002, nous étions peu nombreux en Europe à demander une enquête sur l’utilisation des fonds européens alloués à l’Autorité palestinienne.

Une corruption généralisée régnait alors au sein des institutions palestiniennes en général et au profit de son chef historique, Yasser Arafat, en particulier. Ceux qui s’étaient risqués à évoquer cette évidence étaient immédiatement suspectés de collusion avec les « sionistes » et de mépriser les Palestiniens.

En réalité notre objectif était tout autre: faire en sorte que le PEUPLE palestinien puisse réellement bénéficier d’une aide financière de l’Occident.

On sait aujourd’hui que l’aide financière massive, noblement destinée à l’amélioration de vie de chaque Palestinien a été soumise aux caprices onéreux de leurs dirigeants. Quelques articles de presse ont pu faire état des fortunes considérables détournées par le leader alors incontesté du Fatah, et de ses proches.

Ont suivi les élections législatives palestiniennes de 2006 qui ont vu la victoire du Hamas. (J’ai à ce sujet évoqué dans un précédent article paru dans La Règle du Jeu le fait que des élections qui ne s’appuyaient pas sur des bases constitutionnelles solides étaient vouées au mieux à l’échec, au pire au dévoiement radical.)

Le Hamas fit une campagne particulièrement agressive, n’hésitant pas à stigmatiser un Fatah englué dans ses dérapages financiers. C’est donc sur le thème de lutte contre la corruption qu’il a bouté le Fatah hors de Gaza et qu’il a sapé le fragile processus de paix israélo-palestinien. Cette leçon a depuis été comprise par le Premier ministre palestinien Salam Fayyad, qui a fait un travail remarquable de transparence et de rigueur.

Aujourd’hui, les revendications qui reviennent constamment dans les soulèvements en Tunisie, Égypte ou en Libye et les manifestations dans les autres pays arabes, ne parlent pas de haine envers les États-Unis ou Israël.

Le fil conducteur est la mauvaise gouvernance et la corruption, accompagnée d’oppression, pratiquées de manière flagrante par les dirigeants et leur entourage.

Durant des décennies, des citoyens ordinaires ont été privés de dignité et d’accès à leurs droits tandis que des dictateurs se sont remplis les poches.

Tous les médias occidentaux ont relayé cette prise de conscience brutale et néanmoins tardive d’une corruption sans limite. Les dictateurs et les autocrates exercent un pouvoir absolu sur, notamment, toutes les transactions commerciales et financières, au mépris de toutes lois. Le citoyen ordinaire est dépossédé, humilié et maltraité à un degré tel que l’auto-immolation devient une option viable en tant que moyen d’expression. Des centaines d’attentats suicides n’ont d’ailleurs pas eu l’impact politique que cet acte désespéré a pu avoir.

Facebook, Twitter et autres médias sociaux ont facilité l’organisation et la diffusion de l’information, mais ils n’ont pas déclenché la révolte souhaitée par les citoyens. C’est l’injustice quotidienne en Égypte, en Tunisie, en Libye et dans les autres pays qui ont conduit à des soulèvements impressionnants.

Aujourd’hui, ces populations aspirent à un avenir de stabilité et de démocratie et sont prêts à en payer le prix.

La corruption a conduit les sociétés à la radicalisation. Les idéologues radicaux ont un argument à leur disposition pour inciter à agir ceux dont les droits et la dignité ont été bafoués. Seul un véritable engagement des dirigeants arabes en faveur de la responsabilisation, de la transparence et de la justice pourrait, en partie, ouvrir les portes de la démocratie et de la stabilité.

La corruption n’est pas seulement un crime financier mais une menace à la sécurité nationale et internationale.

Simone Rodan-Benzaquen est directrice d’AJC France et ancienne Secrétaire Générale de MedBridge Strategy Center.

Un commentaire

  1. JerryMiller dit :
    24 mars 2011 à 17:52
    Plus d’une semaine que la bombe FN a éclaté lors des cantonales 2011 ! Surprise, surprise, ??? Pas vraiment ! Tout le microcosme politico-politologue s’y préparait en montrant du doigt (c’est vilain de rapporter!!) le camp d’en face ou celui d’à coté. Et ça continue. Et vous continuez. Et vous donnez à la Marine le gout de chanter des ritournelles à se donner encore plus de courage pour virer le guindeau. Aucun d’entre vous, politiques de gauche, de droite… Aucun d’entre vous, journalistes de droite, de gauche n’avez ce dernier sursaut d’honnêteté lucide ou de lucidité honnête pour se battre la poitrine et avouer: JE SUIS FAUTIF !! Je suis fautif parce que depuis des années je crache, j’insulte, je moque, je vomis le camp (dit) d’en face et qu’à force de forcer le trait je réussi à le faire passer pour un repaire de brigands dénués de toute moralité. Vous y êtes arrivés, cela est bien !
    Bien ?? Pas tant que vous croyez, parce que nous, les gogos-gobeurs de toutes vos fausses vérités, nous ne sommes pas aussi idiots qu’il parait. Nous admettons que le « camp d’en face » est une bauge à cochons MAIS nous savons que vous ne valez pas pire, ni mieux surtout. Et ainsi nous vous classons là ou vous classez les autres. De ce fait nous vous vomissons tout aussi bien. Écœurés de vous, des autres, nous faisons sauter la caisse à coups de votes insensés, faisant fi de toute moralité puisque personne ne semble en avoir en politique. Honte sur nous les votants! Honte sur vous les journalistes, les politiques sans Foi ni Loi qui nous entrainez sur ce chemin immonde.