Hier la Tunisie et l’Égypte, aujourd’hui la Libye. Les manifestations ont éclaté le 13 février à Benghazi, la deuxième ville du pays. L’on recense déjà des centaines de morts. Mais une semaine après, cela n’a pas empêché le mouvement d’embraser la capitale, Tripoli.

Le raz-de-marée révolutionnaire poursuit inexorablement son œuvre dans le monde arabe. Mêmes rumeurs annonçant le départ précipité du chef d’État, même soulèvement massif, même visages et même détermination dans la foule que rien ne semble pouvoir arrêter.

Il faut d’abord saluer la détermination héroïque des manifestants libyens. Là où Ben Ali et Moubarak avaient sans doute quelques scrupules à tirer massivement sur leurs propres populations, cela n’est pas le cas de Kadhafi. En général, les dictateurs ont besoin de l’illusion de faire le bien pour justifier leurs forfaits. Le guide de la révolution libyenne semble être une exception à cette règle. Cela fait bien longtemps que le despote a cessé de croire qu’il œuvrait pour son peuple. Le chien fou du monde arabe a fait bombarder ses propres citoyens par l’aviation militaire. Des mercenaires ont été payés pour semer la terreur dans les rues de Tripoli. Les témoignages se multiplient et évoquent un véritable massacre.

Évidemment, Kadhafi va partir. Et malgré les morts qui vont malheureusement s’amonceler à une allure insupportable (l’ONU évoque ce matin la possibilité de crimes contre l’humanité), la chute du dictateur libyen se fera sans doute encore plus vite que celle de Ben Ali ou d’Hosni Moubarak. Car nous savons combien les régimes les plus tyranniques sont aussi les plus fragiles. Et celui-là repose essentiellement sur la crainte personnelle qu’insuffle le colonel Kadhafi. Il n’y a aucun corps d’État intermédiaire en Libye. Ivre de sa puissance, rappelons qu’en 2009, il a entrepris un fait inédit dans l’histoire des régimes meurtriers : dissoudre toute son administration. On voit déjà des ministres démissionner pour rejoindre l’insurrection. Les défections d’ambassadeurs libyens se multiplient aux quatre coins du monde. L’armée, quoique en partie peu scrupuleuse à tirer sur sa propre population, n’est déjà plus tout à fait fidèle au chef d’État.

Ce régime paranoïaque ne tiendra pas longtemps, même s’il se dit prêt à noyer la contestation « dans une rivière de sang » comme l’a promis l’un des fils Kadhafi. Le leader libyen va-t-il partir ? Sera-t-il assassiné ? Les prochains jours le diront.

Mais là où les Tunisiens et les Égyptiens demandaient justice sociale et libertés publiques, il semblerait que les Libyens ne réclament rien d’autre que le départ du tyran. L’unique question qui demeure est donc savoir ce qui se passera ensuite. L’opinion européenne connaît bien trop peu de choses de la politique intérieure libyenne pour l’imaginer sereinement. Certains évoquent la guerre tribale. Il faut craindre qu’un nouveau régime tout aussi sanguinaire ne succède à l’ancien. J’espère avoir tort.

5 Commentaires

  1. Article prémonitoire s’il en fut !!!! D’ailleurs il date du 22 février 2011 et, alors que j’écris en ce 7 mars 2011, le canard Khadafi est toujours bien vivant.
    Tant de lucidité dans l’analyse, de maestria dans la géopolitique, de talent dans le décryptage des relations internationales m’interpelle grave.
    Car il ne faut vraiment rien connaitre du tout à l’Afrique et au monde Arabe, être totalement inculte au niveau basal des caractéristiques et modes de pensées de ces peuples (et surtout tribus), ne penser que par les infos de 20h de TF1, pour imaginer une seule seconde que l’ineffable guide de la révolution allait s’enfuir au premier coup de feu de Kalachnikov. Khadafi n’habite pas l’avenue montaigne et il ne frissonne pas à la vue des sauvageons, mon bon (et ça rime).
    Bref, cet article ineffable est caractéristique de l’aveuglement de la plupart des zélites de classe moyenne adeptes des randos dans le Sud Marocain par Nouvelle Frontière. Une vrie culture de bazar et de Carouf. Mais ça fait sens comme dirait l’autre.

  2. Kadhafi, c’est fini

    Camarade
    J’ai pour vous un télégramme de Chavez :
    Uno :
    Le révolutionnaire, ce n’est pas un métier, à un moment ou à un autre il faut y passer comme l’a fait le Che.
    Dos :
    Ton peuple réclame ton départ. Et ton devoir c’est d’abdiquer parce que nous savons plus que quiconque ce que mourir veut dire…
    Très :
    Tu as défié et nargué les impérialistes et les terroristes du monde entier… ce n’est pas ta tête qui va t’empêcher de finir en beauté…
    tu appuies ou j’appuie sur la gâchette ?
    http://www.lejournaldepersonne.com/2011/02/kadhafi/

  3. Kadhafi est une racaille d’état, il n’a aucun poste officiel donc une recaille qui controle pas un coin mais un pays, imaginez une racaille qui nomme des ministres des ambassadeurs , etc , j’en reviens pas, je veux me réveiller …!

  4. La place de Kadhafi n’est pas en prison. Elle est dans une cellule capitonnée du centre psychiatrique le plus proche. Je délivre donc un certificat en vue d’obtenir une « H.O. » c’est à dire une hospitalisation obligatoire et définitive. A moins qu’une balle dans la nuque ?

  5. D’ accord avec ce que Mr Haddad dit de manière juste, l’éspérance de tous les peuples est de vivre ses choix de société, mais jusqu’où les puissance de ce monde seront prêtent à aller pour que cela arrive. La preuve, Moubarak était copieusement arrosé par les américains pendant 3 décennies et nous savons dans quel but. Idem pour ben Ali, où beaucoup de nos politiciens français, intellectuels, artistes avaient profité des grâces du président tout en sachant ce qui s’y passait. Cela aura un effet si le reste suit, à savoir qu’en Palestine, le droit soit restitué et que les Israeliens respectent les injonctions faites par les Nations Unies depuis des dizaines d’années. Tout cela doit fonctionner ensemble et en parrallèle et ce qui est valable pour les uns doit l’être pour le reste du monde, ce qui n’a jamais vraiment été le cas. Les peuples ont besoins d’une lecture claire de ce qui se passe et cela n’a jamais été le cas, le non sens ou le mensonge, l’interêt voir l’arrogance a toujours primé sur le droit. D’autre part, l’intervention des intellectuels ou autres hommes publiques doit être intellectuellement honnête et surtout impartiales, choses qui est rarement le cas et cela met en balance leur crédibilité. Il faut attendre qu’un Monsieur comme Stephane Hessel, du haut de ses 93 ans, « rappelle au désordre »afin de nous implorer de nous reveilleret de ne pas accepter ce qui nous ai proposé ces derniers temps, car même si nous sommes lons Géographiquement les uns des autres, le monde n’a jamais été aussi petit!!!!