Lettre de Charles Berling, en soutien à Jafar Panahi

Comme je joue tous les soirs au théâtre, j’arriverai tard à La Pagode où aura lieu mardi un grand rassemblement de soutien à Jafar Panahi. Mais l’événement, pour moi, est évidemment très important. Ce cinéaste iranien représente la liberté d’expression face aux régimes dictatoriaux. Je ne le connais pas personnellement. Je n’ai jamais travaillé avec lui. Mais, sur des combats pareils, il ne faut surtout pas céder.

Cela fait déjà un an que nous nous mobilisons pour Jafar Panahi. La justice iranienne l’a arrêté à son domicile, en mars 2010, à cause d’un film qu’il était en train de tourner, soi-disant contre le gouvernement. La vérité est qu’il a, surtout, soutenu l’adversaire malheureux d’Ahmadinejad à la dernière présidentielle. Il a été jugé et condamné en décembre dernier à six ans de prison et à vingt ans d’interdiction d’exercer son métier. Panahi a fait appel de ce jugement. Et la décision sur un éventuel renvoi en appel aura lieu dans quelques jours.

Savez-vous qu’un proche du président iranien Ahmadinejad a récemment critiqué le jugement? Bien sûr, personne n’est dupe. Il y a tout un jeu de rôles au sein du gouvernement. Mais, avec La Règle du jeu, nous nous appuyons sur cette déclaration. Et nous supplions le régime de faire en sorte que le jugement soit révisé.

Plus les artistes du monde entier manifesteront, plus on pourra espérer qu’il y ait un procès en appel. Au dernier Festival de Cannes, Frédéric Mitterrand, le ministre de la Culture, a lu une lettre magnifique du cinéaste iranien, et les images de sa chaise vide ont fait le tour du monde. Cela ne sert jamais à rien de manifester comme cela, de façon pacifique, sans donner des leçons, mais en insistant pour que la liberté d’expression universelle soit respectée. D’ailleurs, une pétition en faveur de Jafar Panahi, et du coréalisateur Mohammad Rasoulof, continue de circuler (http://www.ipetitions.com/petition/solidarite-jafar-panahi/).

La censure, je le répète, est une abomination. On se bat donc pour ceux qui sont là-bas, qui la subissent de plein fouet. Mais on se bat aussi, d’une certaine façon, pour nous. Car défendre la liberté d’expression d’un cinéaste comme Jafar, c’est aussi défendre la nôtre. La France n’est, évidemment, pas l’Iran. Mais il y a tant de manières de censurer! Il ne faut jamais baisser les bras. Regardez ce qui vient de se passer en Tunisie. Moi, j’avais tourné là-bas il y a quelques années. J’avais bien vu à quel point les artistes étaient muselés. Je suis rongé d’inquiétude pour Jafar. Empêcher un artiste de s’exprimer, c’est comme le décapiter.

* Cette soirée, organisée par la revue La Règle du jeu et le magazine Transfuge, est ouverte au public (rens. : laregledujeu.org).

** Entre autres, Bernard-Henri Lévy, Agnès Varda, Michel Piccoli, Jane Birkin, Vincent Lindon, Hippolyte Girardot, Jean-Pierre Mocky, Amos Gitaï…

Entretien paru dans le Journal du dimanche

Un commentaire

  1. Des centaines de morts en Egypte au nom de la sacro-sainte sécurite d’israel. Et ici on ne parle que de Panahi. C’est vrai ce ne sont que quelques bougres qui meurent, la sécurité d’israel vaut bien ça. Attention au retour de bâton messieur les gentils sionnistes. Il risque d’être d’une rare violence..
    Vous êtes déconecté du réel. En France aussi le peuple souffre. Quand je vois les gens qui s’expriment sur ce site, je ne vois que des privilégiés. C’es plus important pour vous un cinéaste qu’on empèche de travailler que des millions de gens qui crève la dâle. C’est ça la gôche en France. C’est trop grave. C’est le peuple qui vous a mis là ou vous êtes, vous allez regreter de l’avoir oublié!
    Les Iraniens sont fières de leur gouvernement, qui a remporté bien plus de sufrages que n’en remportera jamais un politicard chez nous.

    La note va être salé…