J’avais dix-sept ans lorsque la découverte à la télévision d’un génocide perpétré à l’autre bout du monde me bouleversa. Appartenant à une génération qui reçut en héritage le « plus jamais ça », je voyais dans les crimes commis au Cambodge se réverbérer l’écho des atrocités nazies. Jeune homme, dans les camps de réfugiés de ce pays je perdis mes illusions, réalisant que ce combat mondial n’était pas gagné et que « ça » se reproduirait tant que des institutions internationales ne parviendraient pas à faire respecter les droits fondamentaux. Cette conviction dévia ma trajectoire et l’orienta vers la défense de principes sans lesquels il n’y a pas de dignité humaine. Comme militant, avocat puis diplomate, j’arpentais la topographie du malheur et réalisais cent fois ce qu’il y a d’universel dans l’épreuve de l’exil et la condition de réfugié. Des camps du Darfour aux faubourgs de Bogota, de Tchétchénie au Congo, je découvris dans la galaxie des ONG autant de soldats des droits de l’Homme. Je peux témoigner de leur engagement pour dénoncer l’esclavagisme moderne, défendre la liberté de la presse, démobiliser les enfants soldats, recueillir sur les terrains les plus difficiles les preuves dont la justice internationale aura un jour besoin. Comme le Cambodge trente ans plus tôt, mes visites à Gaza me secouèrent. Quoique juif et viscéralement attaché à l’existence d’Israël, je m’efforçais de penser contre moi-même : comment verrais-je le monde si j’avais grandi là-bas ? A Gaza, j’ai vu ces mêmes ONG œuvrer pour le droit des femmes, former des juristes au procès équitable. Ce sont des compagnons de route dont j’admire le travail. 

Israël vient d’être attaquée par une organisation spécialisée dans le massacre de civils juifs et l’oppression des Palestiniens. A l’heure où j’écris ces lignes, on dénombre six cents morts dont plus de cent otages, dont des enfants. Toutes les capitales des pays démocratiques condamnèrent immédiatement et sans réserve l’agression terroriste. Pas les principales organisations de défense des droits de l’Homme qui n’eurent aucun mot de solidarité pour les victimes. Le sang coule, où est votre indignation, vous dont la mission est d’appeler un crime un crime, un civil un civil et un otage un otage ? On peut rechercher ailleurs des causalités, se perdre dans les considérations sur les causes profondes. Ce n’est pas le temps de l’analyse, mais celui du cri. Comment ne pas voir, dans votre silence la désertion du combat de René Cassin, qui incarna en son temps les droits de l’Homme, et présida aussi l’Alliance israélite universelle. Personne n’y voyait de contradiction, au contraire. Surtout, il était l’homme d’une idée simple et forte, celle que la dignité humaine doit être défendue partout, sans exception, avec la même exigence. En vous taisant, c’est cet universel que vous trahissez.


François ZimerayAvocat, ancien ambassadeur de France pour les droits de l’Homme.

Thèmes

9 Commentaires

  1. L’antinetanyahisme primaire n’est pas sans rappeler la traque des sarkonazis.
    Si nos alliés mort-nés avaient mis ne serait qu’une infime parcelle de leur énergie sombre à purger l’engrais à élites des sables mouvants de Ramallah, nous n’en serions pas à redouter que l’extrême droite israélienne bénéficie d’un événement sans précédent, que l’on aimerait sans subséquent — sans se faire trop d’illusions, hélas — dans l’histoire post-shoatique d’Israël.
    Ne craignez rien, camarades ! seul le peuple israélien, eu égard à la prise de conscience de la matérialité d’une menace existentielle que ses forces armées nationales seront parvenues à éliminer, saura sortir vainqueur de l’épouvante et de sa cruelle théâtralité.
    La gauche et la droite ont un même problème : elles n’ont jamais réalisé que l’être juif ne se bornait pas à la pratique de la religion dite juive ni, Dieu merci, n’en dépendait.
    Les Juifs agnostiques et athées sont intrinsèquement liés à l’histoire d’Israël, n’en déplaise aux détracteurs de l’État juif démocratique et à l’autre côté de la médaille que sont les promoteurs de l’État orthodoxe d’Israël.
    Gardons bien à l’esprit ce postulat de base : l’Être est lettré.
    And so, let it be !

  2. L’Inoccident teste les Lumières inoxydables. On veille à augmenter le volume du shofar jusqu’à ce qu’il ait percé le bouclier baveux derrière lequel un éclat de néant attend que nous nous enlisions. C’est encore insuffisant. Le plan d’évacuation serait irréalisable.
    Vous qui semblez si fascinés par les inégalables stratagèmes de Dwight et Sir Winston, dites-moi si, 24 heures avant Overlord, une pluie d’avertissements avait été larguée sur des populations normandes que l’on savait résistantes à 0,1 pour cent et, pour l’essentiel, collaboratrices ou collaborationnistes ?
    Sous le clocher pulvérisé de Saint-Pierre de Caen, on retrouverait une lettre, griffonnée sur un bout de papier sanguinolent et enfouie dans la poche d’une veste qui ne parvenait plus à réchauffer un corps inanimé. Avant de mourir, le guerrier des ombres avait eu le temps de savourer l’instant tant attendu, sans omettre de louer les Alliés, tout en criant victoire à l’encre bleue.
    Les frappes de Tsahal ne dénotent pas un début de génocide ni même un crime involontaire contre l’humanité, mais elles n’ont rien non plus d’un crime de guerre. Elles sont l’émanation d’une force juste immédiatement reconnaissable pour qui ne la laisse pas s’éteindre : celle du libérateur.
    Un objectif suite aux spectacles de l’Immonde qui avait les yeux plus gros que le ventre sur lequel il marchait : empêcher toute possibilité de récidive de la part des mièvres planificateurs de la Reconquista islamica.

  3. Le bouclier humain de l’ONU hamassiste n’étendra pas sa chape moisie sur notre France qui, si elle ne parvient toujours pas à opérer la résorption des excroissances décoloniales et pogromistes sur le sol du Droit, n’a pas encore eu la mauvaise idée d’y troquer l’idéal républicain pour instaurer ou restaurer une Irrévolution mondiale ou nationale.
    La France appelle à une réponse forte, mais juste. Cela tombe bien, Tsahal combine ces deux vertus.
    Pour rappel, la justice et la charité sont deux degrés bien distincts parmi les hypostases de la puissance qui fonde notre humanité en raison, deux attributs indissociables de cet esprit unique en son espèce qui nous permet de distinguer, d’un simple coup d’œil, l’homme de la bête et le monde de l’immonde.
    En l’occurrence, la Charité a vocation à tempérer, voire à contrebalancer, le bras de la Justice.
    Alors oui, Monsieur le Président, soyez rassuré, la réponse d’Israël va être forte comme à son habitude, mais cette fois-ci, elle sera vraiment juste.

    • La BBC chercherait-elle à masquer la sale drague pas-de-vaguiste qui l’empêche de nommer l’innommable ?
      Nos crocodiles aux petits anges partis trop tôt refermeraient-ils les mâchoires acérées, gênés aux commissures, après avoir bayé de manière ostensiblement sourde aux corneilles tels des Boutros bouffis d’orgueil, tandis que leurs martyrs professionnels allaient profiter de l’effritement de l’ordre international pour rentrer dans les Juifs comme dans du beurre, l’argent de ce même beurre, et le c… de la crémière onusienne ?
      Le principe de neutralité a bon dos là où les mécanismes de collaboration font rouage au service d’une horloge politique dont les aiguilles tournent à l’envers.
      L’idéologie est tout ce qui reste aux amputés de l’éthique universelle privés de leur propre histoire, de leur propre mémoire, de leur malpropre esprit et, sous le coup d’une impulsion funeste affectée de strabisme, arrachés au corps intrinsèquement global et royalement loyal des Justes parmi les nations.

  4. Je ne suis pas sure que « se perdre dans les considérations sur les causes profondes » soit une perte de temps.

    En effet, cela est abjecte et il n’y a rien a dire ! Mais est-ce que violer le droit international depuis des années et des annéesn acte dont l’Israël a l’air coutumière es-ce indignant ? revoltant ?

    Et qu’est ce qu’on appel causes profondes ? Le poids de l’histoire? L’invasion des juifs sur un territoire étranger ? L’auto-proclamation de l’Israel contre l’avis international ? Ou le maintient de l’oppression de l’Israel face à Jerusalem violant tous les droits internationaux ?

    Nous ne pouvons pas hiérarchisé, ni s’offenser sur les dégâts très regrettables d’une guerre quand l’oppresseur devient l’oppressé.
    Donc non, ce n’est pas une perte de temps car les causes profondes ont amenés malheureusement à cette tuerie.

  5. La cause palestinienne et la cause islamique, ou islamiste, ou islamisatrice, ou instauratrice de la paix sur terre dans l’islam, partagent une seule et même finalité politico-religieuse, en tout point conforme aux tendances barbares des défis civilisationnels qu’elle enjoint de relever aux microorganismes décérébrés s’agglutinant au pied de son totem totalitaire.
    En cela, c’est une ignoble cause.
    Une cause à laquelle nous avons réagi de deux manières.
    1) En refusant d’avaler la bouillie conceptuelle onuso-compatible que nous servent les Goebbels de la Ligue panarabe et en prenant l’asociété palestinienne pour ce qu’elle est : un vivier de djihadistes recrutables à tous les échelons de l’organigramme révolutionnaire suite, en bas, au démantèlement d’une cellule active/dormante ou, encore plus bas, à la décapitation d’une franchise terroriste.
    2) En prenant l’ennemi au mot pour mieux le contraindre à se soumettre au droit international, au respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territorial (la sienne, mais aussi celle des autres, à commencer par l’Autre suprême, l’étranger radical, le dissonant absolu, car le plus proche du soi, autant qu’il soit possible de palper une identité nationale là où l’inconscient collectif n’érupte que d’une cuve d’inhumanités en fusion).
    Ces deux approches furent et demeurent non seulement nécessaires, mais appelées à combiner leurs expériences et connaissances respectives de l’ennemi désigné par les uns, plus ou moins adroitement et droitement esquivé par les autres.
    La place de Lapid est au sein de l’Union sacrée.
    Inconditionnellement.
    A fortiori à la table d’un Smotrich ou d’un Ben-Gvir qui n’auront d’autre choix que de prendre en compte le poids de la pensée on ne peut plus juive qu’il co-incarne.
    La nécessaire incursion dans Gaza ne doit à aucun prix se conclure par l’occupation prolongée d’un territoire indéradicalisable ; ce serait là nous faire un cadeau empoisonné de la pire composition, sauf à jeter les Palestiniens à la mer, ce qui n’est pas dans l’ADN des Israéliens.

    • En nous accusant de stigmatiser la communauté musulmane tandis que nous appelons le Hamas par son nom, la Gauche poursuit un but inavouable qui est de conforter les musulmans dans leur volonté d’agir avec le peuple juif comme le font ces derniers authentiques révolutionnaires contemporains que sont les fous d’Allah.
      La Gauche en deuil d’elle-même admire le combat des combattants du Jihad islamique dès lors qu’elle justifie la bave aux lèvres les causes abjectes qui en définissent les modalités.
      L’immense majorité des petites frappes rétives à observer une minute de silence en mémoire des martyrs de Charlie Hebdo voit dans Mélenchon non pas un Savonarole des temps modernes qui s’attellerait à dresser les citoyens français les uns contre les autres, mais bien plutôt le protecteur d’un clan ethno-religieux qui ne se reconnaît ni dans la citoyenneté ni moins encore dans la francité.
      La Gauche n’a à faire aucun amalgame entre les héros du Hamas et une foule à la masse qui explosera toujours de joie quand on dénombrera les victimes d’un pogrom.

  6. Que ce qu’on peut dire … C’est leur lavage de leurs cervaux avec des platitudes comme « rich = exploiteur = coupable » versus « pauvre = victime automatique » ainsi que leur peur de l’Islame qui les ont paralysés. Quelle honte monumentale, vraiment … Mais tout cela va changer très tôt, déjà il y a des voix officielles en Allemagne qui demandent l’abolition de tout aide monétaire pour les palestiniens (étant des milliardes d’euros par an!) et la terminaison de la liberté à dénoncer et demonstrer contre les Juifs dans les rues de l’Allemagne, demandés même par la Gauche. This is a first! And long time overdue! Pour mois c’est une signe que les peuples (et leur representations) enfin sont en train de se réveiller …

    Amicalement de la Suède,
    Maja

  7. En effet! Où sont-elles? Peut-être trop de pudeur ? Ou bien sont-elles occupées ailleurs? Quoi encore? La honte les inhibe -t-elle? Ou bien se donnent elles un temps de le réflexion pour clamer bientôt leur TOTALE INDIGNATION ?