Les opposants iraniens MirHossein Moussavi et Mehdi Karoubi, ainsi que leurs femmes Zahra Rahnavard et Fatemeh Karoubi ont été arrêtés et conduits à la prison Heshmatieh de Téhéran, a annoncé aujourd’hui le site d’opposition Kaleme, appartenant à Moussavi.

« Selon des informations de sources fiables, l’arrestation et le transfert à la prison sont certains mais la date à laquelle cela a eu lieu est encore incertaine », ajoute le site.

L’agence de presse semi-officielle Fars, qui cite un responsable judiciaire, a quant à elle démenti l’information. Selon ce responsable, qui a requis l’anonymat, les deux leaders se trouvent toujours assignés à résidence et cette rumeur a été répandue par les chaînes de télévision BBC et Voice of America dans le but de provoquer des émeutes.

Cette nouvelle suit celle du transfert « jeudi soir vers un endroit inconnu » de l’autre leader de l’opposition Mehdi Karoubi, rapportée aujourd’hui par son site Internet Sahamnews :

« J’ai pu parler il y a quelques minutes à l’un des voisins. Il a affirmé que plusieurs véhicules de police sont arrivés devant l’immeuble et sont partis ensuite en compagnie d’une autre voiture sortant de l’immeuble. Depuis, l’immeuble est totalement évacué et toutes les lumières sont éteintes », a déclaré à Sahamnews l’un des enfants de Mehdi Karoubi.

Contacté par « La Règle du Jeu », Hadi Ghaemi, porte-parole de la Campagne internationale pour les droits de l’Homme en Iran, qui avait révélé samedi l’affaire, confirme l’information selon laquelle les deux leaders de l’opposition et leurs femmes ont été transférés jeudi vers un lieu tenu secret, mais n’est pas en mesure d’affirmer qu’il s’agit bien de la prison d’Heshmatieh à Téhéran. “Le démenti gouvernemental a pour but de semer la confusion chez leurs partisans, afin qu’ils ne manifestent pas demain”, explique l’activiste des droits de l’Homme.

 

MirHossein Moussavi et Mehdi Karoubi, candidats vaincus de la présidentielle de juin 2009, devenus grandes figures de la contestation, ont été placés en résidence surveillée il y a deux semaines après avoir appelé le peuple à manifester le 14 février dernier en solidarité avec les peuples tunisiens et égyptiens, rassemblement interdit par le pouvoir qui avait été détourné en manifestation contre le Régime.

Preuve de la crainte du Régime vis-à-vis d’une opposition dont il avait pourtant annoncé la mort, à l’issue de cette journée, de nombreux députés iraniens ont appelé à la pendaison des « leaders de la sédition », terme par lequel le pouvoir désigne l’opposition, dont les deux leaders ne remettent pourtant pas en cause les fondements de la République islamique.

Cette assignation à résidence n’a pas empêché leurs sites Internet respectifs d’appeler à une nouvelle manifestation le 20 février dernier, qui a vu des dizaines de milliers d’Iraniens défiler dans la rue. Cette nouvelle journée de contestation a amené les autorités à couper totalement les deux leaders du monde la semaine dernière, les forces de sécurité ayant investi leurs domiciles et faisant évacuer tous leurs proches, notamment leurs gardes de sécurité.

« Aujourd’hui, ce mouvement (de l’opposition) a dépassé la sédition et s’est transformé en un mouvement contre-révolutionnaire (…) La main de l’étranger et de l’oppression y est visible« , a déclaré aujourd’hui le procureur général Gholamhossein Mohseni Ejeie, cité par l’agence officielle Irna.

Pourtant, le site d’opposition Kaleme a tenu à rappeler :

« Ce ne sont autres que le premier ministre iranien, au cours des huit ans de défense sacrée ainsi que le chef du Parlement iranien durant deux mandats en compagnie de leurs femmes qui, sur ordre des autorités du pays, ont été arrêtés et transférées à la prison Heshmatieh de Téhéran ».

Les sites d’opposition kaleme.com, et sahamnews.org appartenant à MirHossein Moussavi et Mehdi Karoubi, ont publié vendredi un communiqué du « Conseil de la coordination du chemin vert de l’espoir”, appelant à une nouvelle journée de manifestations demain, de la place Imam Hossein à la place Azadi de Téhéran ainsi que sur les principales places de Province, pour protester contre le placement « illégal » en résidence surveillée des deux leaders de l’opposition.

Mais l’Iran a mis en garde aujourd’hui toute personne souhaitant manifester demain.

“Quiconque enfreindra la loi devra répondre de ses actes”, a déclaré au site de la télévision d’État le procureur général iranien Gholam Hossein Mohseni Ejei, réaffirmant que tous les partisans de MirHossein Moussavie et de Mehdi Karoubi seraient considérés comme des “contre-révolutionnaires” manipulés par l’étranger, accusation passible d’une lourde peine.

« La journée de demain sera un véritable test pour l’opposition », explique Hadi Ghaemi. « Nous allons savoir si ce mouvement de contestation peut se poursuivre sans ses leaders ou non ».