L’une des questions centrales de L’esprit du judaïsme, le dernier livre de Bernard-Henri Lévy, est cette idée que le judaïsme détient une obligation envers l’autre, les dépossédés et les oubliés, ce qui explique sans doute, en partie, l’engagement de son auteur lors des guerres de Bosnie, du Darfour, de Libye et, aujourd’hui, dans la bataille contre Daech en Syrie et en Irak. Et c’est cette dernière qui est au coeur de Peshmerga, le documentaire de BHL qui suit la ligne de front irakienne, du sud au nord, et rapporte des images exceptionnelles du combat des Kurdes et de leurs alliés occidentaux. Ce film qui est né du désir de témoigner de cette bataille si essentielle contre le fondamentalisme et le terrorisme islamique a été projeté hier au Lincoln Center, à New York.

Ainsi, après Cannes (où le film fut présenté dans la sélection officielle de la 69e édition du festival), Londres, Amsterdam, Spoleto, Dohuk ou encore Tel Aviv, Peshmerga poursuit donc son parcours international aux Etats-Unis où il bénéficie d’un accueil chaleureux, notamment dans le New York Times. Diffusé à l’occasion du New York Jewish Film Festival, le documentaire a été projeté à deux reprises faisant, à chaque fois, salle comble.

On reconnaissait, dans la salle, Salman Rushdie ; notre ami, l’essayiste, collaborateur du New Yorker, Adam Gopnik ; le philanthrope Tom Kaplan qui sera à l’origine de l’exposition Rembrandt, au Louvre, du mois prochain ; Woody Allen, dans son coin ; l’état-major de Random House, en majesté ; Marty Peretz, en famille ; des personnalités du tout New York comme Harold Evans ou Arianna Huffington ; l’ambassadrice du KRG à Washington ainsi qu’une délégation de Peshmergas menée par le Général de brigade Hajjar Ismaïl et qui avait fait le déplacement exprès depuis Erbil ; le philosophe de la guerre Michael Walzer ; beaucoup d’autres, à commencer par le public des festivaliers qui est resté pour les 20 minutes de débat avec Bernard-Henri Lévy qui ont suivi la projection.

En commençant le tournage sans idée préconçue ni plan, Bernard-Henri Lévy a rapporté du front des découvertes et des réflexions, pas seulement sur cette guerre qui nous mène l’Etat islamique, mais aussi sur le peuple kurde et les enjeux politiques et religieux de la région. La caméra de BHL et de ses camarades fut le témoin privilégié de l’importance du rôle joué par les Peshmergas dans la libération de la région. Une aventure kurde qui est d’ailleurs également en lice pour le César du meilleur documentaire.

Le journal américain Foward souligne que l’un des fils conducteurs de Peshmerga est la relation entre Juifs et Kurdes, un lien historique avec une résonance contemporaine : « J’en étais plus ou moins conscient, mais cela m’a frappé. Je savais que les Kurdes avaient aidé à libérer des Juifs d’Irak et d’Iran. Mais cette volonté d’habiter une fraternité de destins, je n’en mesurais pas tout à fait l’importance. »

Peshmerga est indéniablement une contribution au combat contre Daech et le public new yorkais l’a manifestement compris. « C’est une bataille mondiale, a encore dit BHL. Elle nous concerne tous. Ceci est ma façon d’y contribuer. Les Kurdes sont isolés, peu armés, et j’ai voulu contribuer à leur effort. Quand vous vous placez de leur point de vue, et que vous voulez contribuer à leur effort, que pouvez-vous faire ? Vous pouvez combattre vous-même. Vous pouvez lever des fonds et aider matériellement. Ou vous pouvez être un témoin, par les mots, les images, et mieux, par l’association des deux. C’est ce que j’ai fait. ». Un message qui a sensibilisé le public américain et les Etats-Unis où d’autres projections sont en cours de programmation. Puis une sortie commerciale dans plusieurs grandes villes.

Bernard-Henri Lévy présentait, le 18 janvier 2016, son film « Peshmerga » au Lincoln Center, à New York.
Bernard-Henri Lévy présentait, le 18 janvier 2016, son film « Peshmerga » au Lincoln Center, à New York.