Disparue ce mardi à l’âge de 89 ans des suites d’un accident vasculaire cérébral, Lauren Baccal est née le 16 septembre 1924 dans le Bronx à New York, de son vrai nom Betty Joan Perske. Elle perce au cinéma à 19 ans, avec son premier grand rôle dans le film Le port de l’angoisse de Howard Hawks. Face à elle, Humphrey Bogart, 44 ans, qu’elle épousera l’année suivante. Surnommée « le regard » (The look), elle devient rapidement l’une des plus notables comédiennes de l’âge d’or d’Hollywood.
En 1997, elle figure au casting du film de Bernard-Henri Lévy, Le Jour et la Nuit, aux côtés d’Alain Delon, Arielle Dombasle et Karl Zéro.
Dans Récidives, paru chez Grasset en 2004, le philosophe raconte le premier jour de tournage de l’icône hollywoodienne :
« Elle est arrivée hier soir de Los Angeles où elle terminait un film avec Jack Lemmon. Elle est déphasée, forcément. Pas encore vraiment dans le coup. Mais enfin elle est là, ce matin, pour sa toute première scène, avec son look de légende, sa beauté intacte, son humour, ses retards calculés, sa colère contre Netanyahou qui monte dans les sondages, son coiffeur, son maquilleur, l’assistant qui annonce « she walks » dans un talkie au moment où elle sort de sa caravane, l’autre assistant qui l’escorte avec un parasol — voici la grande Bacall en superstar hollywoodienne et la voici qui, à peine arrivée, sous le soleil blanc de cette fin de matinée, blêmit, titube, puis s’effondre. Branle-bas sur le plateau. Médecins. Réanimation. Défilent dans mon esprit quelques images brèves – ce pauvre et tendre stock dont je ne peux m’empêcher de songer que c’est tout ce que j’aurai pris d’elle : notre rencontre à New York dans l’appartement aux murs recouverts de photos d’Humphrey Bogart ; notre premier dîner, la veille, avec Delon ; ses rires de très jeune femme ; la scène qu’elle a faite, ce matin, parce que la production n’avait pas prévu les sous-vêtements que les studios fournissent, d’habitude, par contrat – « The Big Slip », a ricané Karl Zéro. Et puis la voilà qui, sans crier gare non plus, et comme si de rien n’était, frissonne, rouvre les yeux, se relève doucement, nous foudroie tous du regard, bref, ressuscite aussi vite qu’elle avait paru succomber et, sourde à nos émois, exige de tourner immédiatement son plan. Grande, très grande dame. Grande, très grande leçon de maintien et de comédie. »

Bernard-Henri Lévy et Lauren Bacall, en 1996, sur le tournage de "Le Jour et la Nuit"
Bernard-Henri Lévy et Lauren Bacall, en 1996, sur le tournage de « Le Jour et la Nuit »