« L’urgence, c’est l’emploi » a déclaré François Hollande lors d’un discours prononcé ce vendredi matin depuis  Châlons-en-Champagne. Le président, dont la côte de popularité n’est pas au beau fixe, s’est rendu dans la Marne afin d’y rencontrer syndicalistes et salariés en difficulté. Il s’est montré rassurant : « Mon devoir, c’est de dire la vérité aux Français », et plein de promesses qui fleurent bon les résolutions d’un matin de rentrée scolaire : « Ils espèrent beaucoup dans le changement, c’est à moi de leur dire les étapes qui permettront d’y parvenir ».

Remuant le couteau dans la plaie, François Hollande a accusé la crise, « d’une gravité exceptionnelle », et a rappelé la nécessité de faire des « choix ». Parmi ces choix qui permettront éventuellement d’espérer sortir la tête de l’eau, son projet d’« emplois d’avenir ».
Face aux 22,7% de chômage chez les jeunes, la majorité, s’inspirant des emplois jeunes de Jospin, propose de déverrouiller 150 000 postes, destinés aux jeunes sans qualification ou peu qualifiés, de 16 à 25 ans, issus des zones urbaines sensibles. D’après le ministre du Travail, Michel Sapin, les postes à pourvoir se trouveront principalement dans les collectivités territoriales ou les associations, ciblant en premier lieu les secteurs porteurs d’avenir et « dont l’utilité sociale est avérée » (l’écologie ou le numérique par exemple). Le bonus de cette version améliorée des emplois jeunes : l’ouverture au secteur privé.
Dans le projet qui a été présenté en Conseil des ministres, les contrats sont établis pour une durée allant de un à trois ans, le but affiché étant naturellement de pérenniser l’embauche au-delà de la durée de subvention de l’État. Malencontreusement, la légitimité du mot « avenir » dans l’expression « emploi d’avenir » réside dans cette mince zone d’espoir.

Et c’est ici que le projet coince, comme les bonnes résolutions de l’écolier finissent par s’envoler dès la première sonnerie. La nouvelle mouture des emplois jeunes a beau avoir été élargie, la gauche de 2012 ne semble pas avoir dépassé les difficultés qui se posaient alors à Jospin et Aubry. Les points de tension restent les mêmes : quel élément fera charnière, permettant de faire basculer un emploi temporaire sur un véritable contrat ? La proposition de François Hollande demeure confinée aux limites de la solution de courte durée, n’apportant aucune issue aux problèmes de l’insertion des jeunes sur le marché du travail, ni à celui de la création d’emplois. Le projet semble buter sur les mêmes difficultés déjà bien connues des jeunes : la précarisation de l’emploi, son cortège de stages et son chapelet de CDD, ne débouchant que très tardivement sur un emploi stable. Le collectif Génération-Précaire pointe ainsi du doigt les emplois d’avenir, qualifiés de « sparadrap d’un marché du travail où la rémunération et le CDI ne sont plus la norme. »

En outre, et c’est ainsi que le gouvernement défendra son projet, les trois ans d’expérience apportés aux jeunes de zones sensibles permettront une expérience non négligeable ; encore faudrait-il que les postes auxquels les emplois d’avenir donneront accès permettent une formation profitable et avantageuse sur le marché de l’emploi.
Emplois d’« avenir » ? Une belle contradiction pour ce projet d’embauches dont la date de péremption est inscrite dès le départ. Au gouvernement de prouver qu’elle peut – et sera – résolue pour ses bénéficiaires.