L’horreur de la tuerie de Toulouse s’ajoutant à l’effroi provoqué par le meurtre barbare, en 2006, d’Ilan Halimi a conduit les Juifs de France à douter d’être heureux dans ce pays auquel ils sont tant attachés. Bien sûr, la République est là ! Elle dit, de manière unanime, son indignation. Elle condamne, assure que tout est mis en œuvre pour que de tels actes jamais ne se reproduisent. Elle met des policiers en armes devant les synagogues, les centres communautaires ou les écoles juives. Dans ce climat d’inquiétude où des réponses républicaines doivent être trouvées, certains avancent les leurs…

Alors que la France, après le drame, se retrouvait dans l’unité nationale, le Président de l’association France-Israël et membre du comité directeur du Conseil Représentatif des Institutions juives de France, Gilles-William Goldnadel a voulu faire de ce moment celui d’une révélation pour le moins surprenante portant sur une injustice soi-disant faite, depuis trente ans, à l’extrême-droite. A l’écouter, toutes les attaques qui auraient frappé la communauté juive ne seraient dues qu’à un laxisme vis-à-vis de l’islamisme. Un laxisme voire une complaisance qu’il attribue à la gauche française et aux mouvements antiracistes et notamment SOS-Racisme.

Le monde dans lequel vit Gilles-William Goldnadel apparaît bien étrange. Dans ce monde, l’antisémitisme historique, porté par la droite extrême n’existe pas, ou n’existe plus. Dans le monde de Gilles-William Goldnadel, Marine Le Pen est devenue non pas simplement fréquentable, mais la responsable d’un parti politique qu’il convient d’aider. Aussi a-t-il été, en 2011, parmi les avocats zélés d’une visite de la présidente du Front National en Israël. Visite qui, heureusement, n’a pas eu lieu, Marine Le Pen restant persona non grata pour l’Etat hébreu.

Gilles-William Goldnadel a une histoire personnelle au contact de l’extrême-droite et de ses idées. N’a-t-il pas, en effet, assuré la défense d’Anne Kling, responsable du mouvement régionaliste et identitaire Alsace d’abord dans son procès l’opposant à la LICRA ? N’a-t-il pas également défendu l’essayiste italienne Oriana Fallaci suite à la polémique lancée par son ouvrage La rage et l’orgueil ouvertement anti-musulmans ? N’est-il pas, enfin, un proche de Patrick Buisson, cet homme, aujourd’hui conseiller de Nicolas Sarkozy, ancien directeur de la rédaction du journal d’extrême- droite Minute ?

Gilles-William Goldnadel est l’incarnation d’une lente et longue dérive vers l’extrême-droite. Ses écrits et notamment son ouvrage Réflexions sur la question blanche traduisent cette inquiétude néo-maurassienne de voir la France se métisser et se diluer. Gilles-William Goldnadel fut d’ailleurs l’un des grands partisans du détestable débat sur l’identité nationale pour lequel il a regretté qu’il n’ait pu réellement aboutir.

En nouant en sous-main des pactes idéologiques avec l’extrême-droite dont la pensée reste et demeure, derrière les adaptations cosmétiques du discours, anti-républicaine, xénophobe et négationniste, Gilles-William Goldnadel propose au Judaïsme français une voie incompatible avec son histoire et ce qui le définit. Le Judaïsme, par sa portée universelle, par les valeurs d’ouverture, d’entraide et de solidarité qui le fondent, ne peut se reconnaître dans l’exclusion de l’autre.

Nul ne peut contester qu’un nouvel antisémitisme alimenté par les mouvances islamistes existe en France. La gauche et les socialistes peuvent répondre à l’inquiétude légitime des Juifs de France. La gauche et les socialistes n’ont pas attendu Gilles-William Goldnadel pour combattre l’antisémitisme. La gauche et les socialistes ne l’ont pas non plus attendu pour dénoncer et combattre l’islamisme. La gauche, par ses objectifs de justice sociale, par son attachement à l’éducation est un terrain que les Juifs de France doivent pouvoir réinvestir totalement. Pour autant, cette gauche doit en finir complètement avec certaines graves contre-vérités qui, en critiquant Israël sur des bases indignes, finissent par nuire aux Juifs dans leur ensemble. Des contre-vérités qui ont été encore propagées très récemment par Eva Joly qui a souscrit à la formule faisant de Gaza « un camp de concentration à ciel ouvert ». Des propos qui sont tout simplement insupportables.

Dès lors, une question demeure : que cherche vraiment Gilles-William Goldnadel en instrumentalisant les peurs et en ayant recours à des manipulations rhétoriques visant à décrédibiliser la gauche ? Tout simplement à proposer un choix définitif entre les soi-disant ennemis d’hier, l’extrême-droite, qui selon lui apporte une réponse pertinente, et les ennemis déclarés d’aujourd’hui, les islamistes. Un choix qui consisterait donc à réhabiliter l’extrême-droite. Ce choix-là, les Juifs de France ne peuvent pas le faire. L’extrême-droite est antinomique de ce qu’ils sont. A celui qui se veut un de leurs représentants de bien le comprendre. Et à la gauche de continuer de combattre ces deux ennemis.

 

Benjamin Djiane est Vice-président de Socialisme et Judaïsme

6 Commentaires

  1. « La gauche et les socialistes n’ont pas attendu Gilles-William Goldnadel pour combattre l’antisémitisme »

    Lorsque l’on voit que Delanoé, un des plus modérés à gauche pourtant, recoit à l’Hotel de Ville le terroriste Salah Hamouri (membre revendiqué du FPLP, condamné pour terrorisme et disant à sa libération que sa cible « méritait de mourir »), on peut en douter.

    Ne soyons pas sélectifs dans nos indignations.

  2. Tonalité habituelle et caricaturale des articles de la gauche bobo, se voiler la face (sans jeux de mots), refuser tout débat, se contenter de slogans et d’affirmations définitives

    Aujourd’hui l’extrême gauche est plus antisémite et beaucoup plus dangereuse pour les juifs que l’extrême droite (qui reste très dangereuse), elle représente plus de 15% de l’électorat de ces élections, mais comme d’habitude, longue tradition en dépit des effroyables massacres, le regard des bobos moralistes est toujours plus bienveillant et compréhensif à son égard (du moment qu’elle prétend défendre l’individu…alors…) c’est essentiellement ce que veut dire W G.

    L’extrême droite voulait détruire les juifs physiquement, l’extrême gauche veut les détruire identitairement ce n’est pas mieux

  3. L’hyperterrorisme islamiste mène une guerre souterraine. La guerre contre l’hyperterrorisme islamiste s’opère en souterrain. On ne voit pas, on n’entend pas les gouvernements ni d’après ni d’avant les attaques du 11 septembre 2001 lutter contre cet ennemi d’entre les plus acharnés de l’humanité, non qu’ils sous-estiment le problème, mais ils l’estiment précisément sous nos pieds plutôt que sous nos yeux. Ils ne communiquent pas sur les infiltrations menées par leurs taupes car ils ne vivent pas à Supracon.
    Vous traversez une place, monsieur Goldnadel, nous la traversons ensemble, nous nous croisons en son milieu avant de poursuivre notre chemin vers le destin que nous nous choisissons, et nous n’explosons pas à l’instant 0 où un pétard mouillé subit un interrogatoire-écran dont les idiots inutiles de la république désirent à tout prix briser la raison d’État. Je ne peux pas imaginer que vos sources vous tiennent moins bien informé sur la zone grise que les miennes ne le font pour moi. Je ne suis pas non plus assez arrogant pour me persuader de ce que les personnes faisant l’objet de cette haute surveillance ignorent qu’elles le sont. Et c’est très bien ainsi. Elles se savent traquées. Elles ne vivent pas tranquilles. Elles ne vivront jamais tranquilles tant qu’elles n’auront pas triomphé de ce système de décadence décivilisateur que représente à leurs yeux le non-Califat universel dont l’occident est le vortex, et elles n’en triompheront jamais.
    Les théoriciens du complot sont plus étatsuniophiles que les Amerlocks eux-mêmes. Ils n’ont pu concevoir que la CIA n’ait pas anticipé l’hyperattentat qui décacheta le troisième millénaire chrétien. Ils ne pouvaient pas le concevoir pour la simple raison que Jack Ryan n’avait jusque-là jamais échoué sur les théâtres d’opération en HD où on l’avait parachuté. Nous en avons entendus, des qui ont habillé le terroriste Merah d’un uniforme de la DCRI tout comme ils avaient forcé Atta à enfiler un costume d’agent du renseignement américain. Il y a aussi ceux qui ne se seraient jamais doutés que Mohamed ait pu s’être radicalisé, lui qui écoutait de la musique, sortait en boîte de nuit et buvait de l’alcool. Mohammed lui aussi avait dérouté les mêmes esprits carrés qui avaient découvert qu’il avait passé la soirée du 10 septembre 2001 accoudé au comptoir d’un bar, – pour se donner du courage, s’étaient-ils expliqués le comportement du djihadiste en mode camouflage. La guerre contre l’hyperterrorisme islamiste est une nouvelle guerre froide. Ce n’est pas avec le sénateur McCarthy qu’on la gagnera. On doit y jouer comme aux échecs. Perdre un coup ne signifie pas perdre la partie. Perdre la partie, ce n’est en perdre qu’une.
    France-Israël était une idée que la France n’avait pas les moyens de gâcher. Mais la France vit elle aussi au-dessus de ses moyens. Elle s’imagine en mesure de résister à une deuxième chute dans le néant total. Qu’elle se ressaisisse! Il se peut que droite ou gauche aient traversé l’isthme d’un «isme» les ramenant à divers bercails couvrant un spectre aussi improbable que préoccupant. Nous disposons déjà de quelques instruments à couacs se jouant d’eux-mêmes de concert avec les ralliements de tous poils au candidat entrant. Le genre d’amis que fuyait Matteo Ricci. Lors d’une rechute partielle et quelquefois ponctuelle, il peut survenir ce qu’on appelle des brouillages d’ondes. Le «Gaza : camp de concentration à ciel ouvert» par exemple, un gaz à effet de serre qui fut émis de gauche à droite sans qu’il ne vienne jamais sphinctériser la vague PS ou UMP, – là, ce n’est pas un allié qui avait décoincé un pet de l’âme, mais carrément un membre, et de surcroît, emblématique! – à cause d’une remise au point qui lui eût accordé plus d’importance qu’on ne souhaitait qu’il en prît. Le silence de Hollande en l’espèce, et cela monte en puissance de mois en mois, de semaine et semaine, de jour en jour, nous montre que lui aussi a une poigne de fer. Mais s’il arrive que ça déconne à la Sociale, je n’oublie pas que ç’a osé se risquer à gros, que ça s’est exposé à défendre ce à quoi ça croyait au point de se faire caillasser la caisse de Premier ministre par les sbires d’Arafat. Et là, on admire, et on retient.
    Le camp d’extermination qu’al-Husseini ambitionna de faire de l’État juif le jour même de sa reconnaissance officielle ne doit prêter le flanc à aucune permutation de rôles. Le peuple juif a survécu aux plans des potes du Grand Mufti. Son désir, c’était alors de vivre, et comme il faut en général un endroit pour faire ça, de s’installer quelque part. Si possible, là où le Seul Dieu S’était fait bâtir par lui une résidence secondaire (cf. Bible). Un tout petit endroit de la taille de son nombre. La haine de ses voisins n’était pas dans son rêve. Il ne reproduira pas la haine qu’il aura subie, mais devra uniquement se protéger des morts qui s’ennuient tout seuls.
    Nous, et je parle en fils de Lévi, sommes suffisamment haïs pour de mauvais raisonnements. N’offrons pas à nos détracteurs une seule chance de le faire pour de bons!

    • Dimanche 25 mars, trois jours après l’intervention du RAID, quatre après la comparaison viciée d’Ashton entre Toulouse et Gaza, la fameuse plume de Nicolas Sarkozy était l’invitée de Radio J. On lui demanda de réagir aux propos de madame Joly, mais il éluda la condamnation attendue par cet «il faut toujours se méfier des mots», – qui vous trahissent? – et puis cherchant tout de même à dire ce qu’on ne voulait pas lui faire dire, on put l’entendre insinuer «que d’une certaine manière»… Gaza était «une prison à ciel ouvert, puisque ces gens ne peuvent pas rentrer, ne peuvent pas sortir, ne peuvent pas se baigner dans la mer…» Il est vrai que les prisonniers du ghetto de Varsovie tiraient chaque jour une pluie de missiles sur les passants aryens qui se protégeaient d’eux. Suis-je bête…

  4. William Goldnadel represente surement beaucoup mieux les Juifs de France, majoritairement de droite et meme tres a droite, qu’une association appelee « Judaisme et Socialisme », deux termes antinomiques par nature, mais pour le savoir, il faudrait deja que vous connaissiez quelque chose au Judaisme. Bizarrement ce sont toujours les Juifs les plus eloignes et les moins instruits dans leur propre culture qui essaient de nous faire croire que le Judaisme serait « de gauche ».
    Que Goldnadel sous-estime l’antisemitisme de l’extreme-droite, je veux bien vous l’accorder, encore qu’a le lire, je n’ai pas cette impression. Mais vous niez carremment que l’essentiel de l’antisemitisme en France, aujourd’hui, vienne de l’extreme-gauche et des « jeunes » d’origine immigree. Ce qui est nettement plus grave.