1. L’intérêt du contre-pied

On le disait otage des synthèses, voilà qu’il a montré sa capacité au contre-pied. En émaillant son discours de déclinaisons concrètes, François Hollande a surpris ses observateurs et pris à revers les responsables de droite pourtant bien rodés au « Hollande Bashing » (voir une démo dans ce billet du Huffington Post). Il y avait là un double avantage. D’une part, rassurer ses proches, qui voyaient dans sa trop grande prévisibilité un élément explicatif de son manque de charisme. D’autre part, prendre à rebours les snipers de la majorité, qui ayant préparé leurs ripostes sur le thème du « flou » probable d’un discours général, se sont retrouvés pris de court durant les quelques heures qui ont suivi cette allocution. Point gagnant pour François Hollande.

2. Un programme ? Surtout pas !

Durant ce grand meeting au Bourget et pendant près d’une heure trente de discours, François Hollande s’est raconté, a parlé de la France, mais il a aussi rappelé, ou dévoilé pour l’occasion, quelques unes des mesures qu’il entendait mettre en œuvre.

Il est intéressant de noter à quel point les candidats à l’élection présidentielle rivalisent d’ingéniosité pour contourner le terme de « programme ». Un type qui aspire à la fonction suprême est un navigateur : il fixe le cap, présente un projet, daigne illustrer son discours par des propositions, mais jamais oh grand jamais, il ne présentera un programme en guise de première grande allocution. C’est au pire « un capitaine de pédalo », mais surtout pas un technicien. Mitterrand l’écrivait déjà dans sa Lettre aux français durant la campagne présidentielle de 1988 «  Un programme est l’affaire des partis ».

Voilà donc un aspect qui désormais, par pragmatisme ou par tradition politique, fait consensus. L’élection présidentielle est la rencontre entre un homme et son peuple. Et l’exercice du premier discours doit le refléter.

3. Est-il possible d’exalter l’idée de normalité ?

Pas de programme mais des propositions. Soit.  En conséquence, on ne peut pas dire que ce discours visait prioritairement à la communion nationale. Et pourtant, il semble avoir fonctionné. D’abord, parce qu’Hollande a trouvé son propre équilibre entre vision et propositions. Durant son speech, il a parlé de sa vision de la France, de l’égalité, du rêve, et a décliné ces thématiques. Il n’a donc pas fait l’impasse sur cette fonction du discours. Ensuite, parce qu’il n’est pas certain qu’en cette période de crise, les français attendaient seulement un plaidoyer inspiré. Peut être voulaient-ils aussi de la rationalité. Vouloir « ré-enchanter le rêve » tout en reconnaissant la faiblesse des marges de manœuvre pour y parvenir, n’est pas un exercice aisé. Il semble y être pour l’instant parvenu.

Pourra-t-il longtemps exalter la « normalité » de sa candidature? Ce discours, parce qu’il n’a pas tout à fait obéit aux canons de l’exercice va lui poser des difficultés. Le candidat socialiste a beaucoup dévoilé durant ce speech. Conscient que l’élection présidentielle est une parade nuptiale, parviendra-t-il à entretenir l’attention ? Choisir de diluer la passion des débuts en convoquant la raison des électeurs, n’est-ce pas prendre le risque de lasser ? C’est toute la difficulté posée par la « normalité vertueuse ». Faire valoir la normalité dans une période tourmentée est rassurant, mais peut aussi être ennuyeux. A trop vouloir être normal, on encoure le risque de devenir rapidement ordinaire.

4. Une facilité inquiétante : la désignation d’un ennemi irréductible

Enfin, on peut regretter que Hollande ait cédé aussi largement aux sirènes de la désignation d’un ennemi irréductible: « Le monde de la finance ». Il faut évidemment combattre les dérives de la finance, mais désigner à la vindicte une population dans son ensemble ne grandit jamais un responsable politique.

On a, à tort, fait ces derniers jours le lien entre la référence au « monde de la finance » d’Hollande et celle aux « puissances d’argent » de François Mitterrand. Je crois pourtant qu’il est très différent de vouloir réduire l’influence de ceux qui usent de leur argent pour asseoir leur domination et de désigner ainsi un ennemi global. La force d’un homme politique, c’est de condamner des comportements, jamais des individus. Contrairement à ce qu’a dit Hollande ce jour là, le monde de la finance a un visage, il a en même plusieurs. C’est celui de votre banquier, de votre assureur ou de votre voisin boursicoteur. C’est le vôtre, avant que vous ne cassiez votre PEL balbutiant. Je parle à gauche et je fais au centre ? L’analyse des mesures présentées par Hollande durant ce discours semble rappeler cette vieille recette socialiste. Il n’empêche. Un projet politique sain ne fait l’économie de personne.

Un commentaire

  1. Mr François Hollande,

    je suis d’accord avec vos 60 propositions sauf sur 2 points:

    – l’adoption d’enfant par des homosexuels me semble contre nature, l’enfant pourra-t-il fonder une famille équilibrée ?
    – le vote des étrangers en France: si les français peuvent voter dans les pays correspondants.