Les élections cantonales, scrutin parcellaire et mineur s’il en est, permettent de tirer un enseignement triste mais précieux pour l’avenir : dans la vaste recomposition électorale à laquelle nous assistons, il n’est nullement question d’une évolution du FN mais d’une involution de l’UMP.

Cette défaite, la seule qui soit certaine, a été préparée de longue date.

Nous avions en effet entendu dire ces derniers temps que le parti présidé par Madame Le Pen n’aurait plus rien à voir avec celui présidé il y a encore trois mois par Monsieur Le Pen. Tout se passe comme si, en dépit des différences de genre, de style – et par la force des choses – de générations, quelques voix mal habiles ou trop habiles faisaient mine d’ignorer que le Front National demeurait parfaitement inchangé.

Au soutien de cette illusion, un argument instillé avec soin par les communicants du Front National est maintenant asséné à l’identique par les idiots utiles de la « normalisation » du FN, qui sont tous étonnamment proches de l’actuel locataire de l’Elysée : Marine Le Pen aurait reconnu la singularité de la Shoah tandis que son père l’avait qualifiée de «détail de l’Histoire».

C’est un peu court pour liquider la succession du principal parti d’extrême droite français en faisant fi de son passé ou plutôt de son passif.

Madame Le Pen a été élue le 16 janvier dernier au terme d’une compétition âprement disputée à Bruno Gollnisch. Le congrès frontiste avait alors bénéficié d’un retentissement médiatique nettement supérieur à tout événement analogue d’une autre formation politique. Le moins que l’on puisse dire c’est que l’extrême droite française n’a pas profité de cette occasion majeure pour décider d’un Bad Godesberg ou d’un aggiornamento plus discret qui aurait été souhaitable autant que nécessaire.

Quoi qu’en pensent de savants esprits étonnamment oublieux, quand on succède sans mot dire et sous les brava à l’homme aux 25 condamnations ; quand l’on porte un patronyme qui est la marque notoire du racisme en France pour en poursuivre le même emploi, à savoir de la politique au nom des mêmes idéaux et dans le même parti, il est des silences qui valent mieux que des aveux.

Le message est clair. On change de visage, pas d’idées ni de méthodes. Bien au contraire : quinze minutes après avoir échangé quelques mots avec la présidente nouvellement élue au congrès de Tours, un journaliste de France 24 a été isolé, insulté et molesté par ses sbires au motif, notamment, d’avoir un « nez de juif ».

D’ailleurs, lorsque le tribunal de Paris a jugé au mois de décembre 2010, l’ultime affiche de campagne électorale de Jean-Marie Le Pen qui présentait les Algériens de France comme des envahisseurs, c’est Marine Le Pen et elle seule qui s’est déplacée à l’audience pour faire sienne une cause qui procéduralement ne la concernait pas.

Ceux qui confondent un ravalement avec une révolution en seront pour leurs frais : Marine Le Pen est assurément plus proche, s’agissant de l’œuvre de son auteur, du « bilan globalement positif » de Monsieur Marchais que du droit d’inventaire invoqué naguère par Lionel Jospin. Mais, si le FN est inchangé, il n’en va pas de même du reste de la droite.

De manière incontestable, nous assistons dans le silence et l’indifférence à un effondrement moral sans précédent de la droite républicaine. En effet, Nicolas Sarkozy liquide avec obstination la part la plus noble de l’héritage de son prédécesseur, à savoir la digue méticuleusement érigée pendant vingt cinq ans entre la droite dite de gouvernement et la droite radicale. Au train où vont les choses, il ne restera en 2012, ne serait-ce qu’une ligne Maginot de la muraille qui avait si bien tenu depuis 1986.

Pour ce dernier suffrage avant l’échéance présidentielle, l’UMP a pris le parti de l’aventure avec une position qui se prête à toutes les combinaisons : ni alliance avec le FN ni front-républicain ; position encore réitérée ce 20 mars au soir du premier tour des cantonales.

Ce cadre trop lâche ne protège pas de l’entente électorale et incite à la compromission idéologique. Celle-ci a été mûrement préparée tout au long de ces dernières semaines : lancement d’un débat contre-nature sur la place de l’islam ; ovation faite au repris de justice Zemmour à l’UMP ou dérapage de la députée Chantal Brunel appelant à mettre au sens propre les immigrés à la mer. Pour parfaire cette ambiance de discrètes fiançailles, le ministre de l’intérieur, plus proche collaborateur du président de la république, vient d’être promu « adhérent d’honneur du Front National ».

S’affranchir des frontières jadis indépassables, qui séparent les droites dans notre pays depuis 1945, les rendre imperceptibles, Nicolas Sarkozy dont la place dans l’Histoire est encore incertaine, aura eu au moins cette gloire qui est le sommet de sa honte… et de la nôtre.

7 Commentaires

  1. Nous assistons dans le silence et l’indifférence à un effondrement moral sans précédent de la droite républicaine »!!! et de la gauche idem !!!
    Journalistes prompts à l’anathème, tapez votre poitrine de votre poing et dites après moi:  » MEA CULPA, MEA MAXIMA CULPA » »
    VOUS, les journalistes et les politiques avaient tout fait pour que nous ayons à vos égards le mépris que vous méritez. Ce n’est pas la droite qui s’effondre, c’est l’ensemble de nos peuples. Arrêtez de cracher, de vomir sur notre président, sur nos représentants, sur nos gouvernants, parce que vous nous ouvrez la route du mépris pour la droite, certes, mais aussi et à égalité pour la gauche qui ne vaut pas mieux. C’est vous qui nous poussez dans les bras des extrêmes !!! Honte à vous !!!
    Vous me faites penser à ces parents divorcés qui disent à leurs enfants « pis que pendre » de leur ancien conjoint et s’étonnent que ces enfants tournent mal et deviennent des délinquants !!!

  2. Nous assistons dans le silence et l’indifférence à un effondrement moral sans précédent de la droite républicaine »!!! et de la gauche idem !!!
    Journalistes prompts à l’anathème, tapez votre poitrine de votre poing et dites après moi:  » MEA CULPA, MEA MAXIMA CULPA » »
    VOUS, les journalistes et les politiques avaient tout fait pour que nous ayons à vos égards le mépris que vous méritez. Ce n’est pas la droite qui s’effondre, c’est l’ensemble de nos peuples. Arrêtez de cracher, de vomir sur notre président, sur nos représentants, sur nos gouvernants, parce que vous nous ouvrez la route du mépris pour la droite, certes, mais aussi et à égalité pour la gauche qui ne vaut pas mieux. C’est vous qui nous poussez dans les bras des extrêmes !!! Honte à vous !!!
    Vous me faites penser à ces parents divorcés qui disent à leurs enfants « pis que pendre » de leur ancien conjoint et s’étonnent que ces enfants tournent mal et deviennent des délinquants !!!

  3. Plus d’une semaine que la bombe FN a éclaté lors des cantonales 2011 ! Surprise, surprise, ??? Pas vraiment ! Tout le microcosme politico-politologue s’y préparait en montrant du doigt (c’est vilain de rapporter!!) le camp d’en face ou celui d’à coté. Et ça continue. Et vous continuez. Et vous donnez à la Marine le gout de chanter des ritournelles à se donner encore plus de courage pour virer le guindeau. Aucun d’entre vous, politiques de gauche, de droite… Aucun d’entre vous, journalistes de droite, de gauche n’avez ce dernier sursaut d’honnêteté lucide ou de lucidité honnête pour se battre la poitrine et avouer: JE SUIS FAUTIF !! Je suis fautif parce que depuis des années je crache, j’insulte, je moque, je vomis le camp (dit) d’en face et qu’à force de forcer le trait je réussi à le faire passer pour un repaire de brigands dénués de toute moralité. Vous y êtes arrivés, cela est bien !
    Bien ?? Pas tant que vous croyez, parce que nous, les gogos-gobeurs de toutes vos fausses vérités, nous ne sommes pas aussi idiots qu’il parait. Nous admettons que le « camp d’en face » est une bauge à cochons MAIS nous savons que vous ne valez pas pire, ni mieux surtout. Et ainsi nous vous classons là ou vous classez les autres. De ce fait nous vous vomissons tout aussi bien. Écœurés de vous, des autres, nous faisons sauter la caisse à coups de votes insensés, faisant fi de toute moralité puisque personne ne semble en avoir en politique. Honte sur nous les votants! Honte sur vous les journalistes, les politiques sans Foi ni Loi qui nous entrainez sur ce chemin immonde.

  4. les partis politique sont a l’image des populations les idees marines ne font que repondre a l’attente d’une france qui veut etre entendue.
    alors si les francais veulent se faire entendre faschistes que voulez vous de marine elle n’en est que la voix

  5. très simplement: la France a votée libéralement. Il y a pas de polémiques: les électeurs sont ils libres de virer vers une (extrême) droite structurée, parce que – très empiriquement- ils ont libres de manifester leur désapprobation vers une situation qui ils aiment pas.

    Et alors, selon les règles démocratiques, il faut donner le mandat exprimée en forme libérale et populaire à UMP et un FN fortes; car ceci c’est ce que on appel démocratie.
    Non?
    Merci

  6. Schizophrénie d’une France engagée à défendre la liberté des populations libyennes insurgées contre le gang nazi-fasciste de Kadhafi, et d’une autre France, plus cachée aux yeux du monde, cantonale, du terroir, qui s’enracine, se calfeutre chez soi par peur de ce même monde, qui se montre incapable devant le désastre politique d’un sursaut démocratique, républicain, citoyen, salutaire contre les thèmes puants et intolérables du FN. Une droite rance donc qui brade l’héritage historique et culturel par trouille de perdre ses privilèges et qui se prête à un petit jeu politicien sans condamner avec force la xénophobie ambiante, le repli identitaire, le refus de l’autre. Elle finit par contredire le message universaliste de cette autre France qui est au combat en Libye. « Ni FN ni gauche » c’est la consigne. Elle nous rappelle « ni droite ni gauche » de Zeev Sternhell, l’idéologie française analysée et dénoncée par Bernard-Henri Lévy. Elle nous démontre combien les racines du fascisme français soient profondes, comment celui-ci soit protéiforme et mutant, se positionnant aujourd’hui en antithèse de l’Europe unie et fédéraliste, affirmant une primauté de la préférence nationale à la démocratie européenne.