« Mo », Mohamed Nabbous, ingénieur en télécoms, photographe et blogueur improvisé, est mort, tué par un sniper kadhafiste dans une rue de Benghazi, hier, samedi, vers 13h, alors qu’il filmait les destructions des bâtiments civils sous les bombardements ennemis, à l’heure exacte où, à Paris, se décidait une intervention aérienne pour mettre fin à ces mêmes crimes.

On ne dira jamais assez le courage tranquille de cet homme qui, seul, créa dès l’aube de la libération de Benghazi, il y a trois semaines, Street Press, filmant avec son portable cette libération puis l’avancée des rebelles vers Syrtes, puis leur reflux devant la contre-offensive des troupes de Kadhafi, et enfin les bombardements sur sa ville de Benghazi, dont il fut, caméra-stylo en main, l’un des plus grands défenseurs.
Ses images, ses appels étaient diffusés sur le blog Libya Alhura.

Samedi, à 13 h, il filmait sur son portable, et les personnes qui regardaient son blog ont assisté en direct à son exécution en pleine rue. Il est mort peu après à l’hôpital.

Il y a quelques jours, devant le retournement de la situation, les journalistes occidentaux et arabes et plusieurs grandes agences d’information quittaient Benghazi pour se replier à Tobrouk, à 500 km vers l’est, non loin de la frontière libyenne. Quelques-uns, bravant le danger, sont restés.
Mo, lui, a dit : « C’est vraiment idiot, aucune info du tout ne sort plus de Benghazi. Elles sont toutes parties, je ne sais pas comment c’est arrivé, mais c’est arrivé. »

6 juin 1944. Robert Capa est le seul photographe accompagnant les troupes d’assaut, le jour du débarquement allié en Normandie. Pendant six heures sous les balles et les bombes, il prend 119 clichés. Le laborantin qui les reçoit et les développe en urgence les expose, dans sa précipitation, à la lumière. Seules quelques-unes, bien que très floues, seront sauvées. Elles ont fait le tour du monde.
Mo était l’héritier de Capa.

 

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