La compagne de Hossein Derakhshan a néanmoins révélé que cette libération n’était que temporaire et que le blogueur devait retourner en prison, « probablement vendredi soir, ou samedi matin ».

« Je reste très prudente, avoue la Française, car on ne connaît pas grand chose des conditions de libération, et qu’il n’y a pas eu de confirmation officielle. Mais Hossein me l’a dit lui-même, il constate une nette accélération de son dossier ».

Le 28 septembre dernier, Hossein Derakhshan, journaliste et blogueur irano-canadien de 35 ans, plus connu sous le nom de “Blogfather” pour son rôle primordial dans la création et l’essor de la blogosphère en Iran, a été condamné à 19 ans et demi de prison pour collaboration avec des États ennemis, propagande contre le Régime islamique, propagande en faveur de groupuscules contre-révolutionnaires, insulte envers des saintetés ainsi que la création de sites obscènes”.

Suite à ce verdict, sa compagne française, Sandrine Murcia, a décidé de médiatiser son cas et de lancer une mobilisation internationale de soutien. « Hossein m’a annoncé qu’il était au courant de cette mobilisation et qu’elle le touchait énormément », explique Sandrine Murcia à la Règle du Jeu. « Il est évident que cette campagne a eu un impact sur cette libération provisoire ».

D’ailleurs, ces deux années coupées du monde ne semblent pas lui avoir ôté le goût de l’information et des nouvelles technologies. « Après deux heures passées au téléphone, révèle sa compagne, il m’a dit qu’il devait me laisser car il avait beaucoup de choses à rattraper sur le Net ».

Journaliste réformateur puis blogueur à son départ d’Iran pour le Canada en 2000, Hossein Derakhshan a été l’auteur à 26 ans de l’un des premiers blogs en persan à destination de l’Iran, “Sardabir: khodam” ou Rédac chef : moi-même” où il chroniquait l’Iran d’aujourd’hui et informait sur les dernières technologies. Son fait d’armes, un “guide de création du blog en persan”, qui a permis à nombre de ses jeunes compatriotes de s’exprimer sur le Net, faisant aujourd’hui de l’Iran un des premiers pays au monde en nombre de blogs.

En parallèle, il a collaboré avec de prestigieux titres tels que le Guardian, le Washington Post , Newsweek et le New-York Times , où il croquait avec originalité l’Iran pour faire connaître la réalité de son pays au monde entier.

En 2006, il a même décidé de se rendre à deux reprises en Israël, afin de tenter de mener un dialogue entre les peuples iraniens et israéliens”, et leur a trouvé de “nombreux points communs”. Mais la rhétorique guerrière de George W. Bush envers l’Iran, ainsi que le fameux “Bomb Iran“ prononcé par son vice-président Dick Cheney en 2007, ont fait ressurgir son nationalisme iranien exacerbé.

Dès lors, le Blogfather s’est mis à dénoncer la diabolisation médiatique occidentale contre l’Iran, à défendre le droit de son pays à acquérir l’arme atomique pour pouvoir se protéger d’une attaque, et a apporté son soutien au président ultraconservateur iranien Mahmoud Ahmadinejad.

Mais cela ne l’a pas empêché, en novembre 2008, deux semaines après son retour en Iran, d’être arrêté et envoyé en cellule d’isolement dans la funeste prison politique d’Evin de Téhéran.