« Son affaire est toujours en cours d’examen et n’a pas été décidée pour l’instant ».

Voilà ce qu’a annoncé jeudi, assure un responsable judiciaire iranien, Mossadegh Kahnemoui, aux membres du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD), au sujet du cas de Sakineh Mohammad Ashtiani, iranienne de 43 ans, mère de deux enfants, condamnée en 2006 à mort par lapidation pour avoir entretenu «une relation illégale» avec deux hommes après la mort de son mari, mais aussi pour «meurtre et crimes».

Dans une interview exclusive réalisée par l’Iranien Saeed Kamali Dehgan, du quotidien britannique Guardian, par l’intermédiaire d’une tierce personne se trouvant en Iran, Sakineh Mohammad Ashtiani accuse les autorités iraniennes de mentir au sujet des accusations pesant sur elle, afin d’ouvrir la voie à une exécution dans le secret.

« Ils mentent », affirme-t-elle au Guardian« L’attention internationale que suscite mon cas les embarrasse et ils tentent désespérément de détourner l’attention des médias pour pouvoir me tuer en secret ». Jeudi, Mossadegh Kahnemoui, le responsable judiciaire iranien, a souligné:

« Cette femme, en plus d’un double adultère, s’est aussi rendue coupable de conspiration en vue de tuer son mari ». Des accusations auxquelles Sakineh tient à répondre:

« J’ai été rendue coupable d’adultère et ai été acquittée du meurtre, mais l’homme qui a tué mon mari a été identifié et emprisonné. Or il n’a pas été condamné à mort ».

Cet homme n’a pas été menacé d’exécution car le fils de Sakineh (et donc fils du mari défunt) l’a pardonné. Or sa mère (Sakineh) a été condamnée à mort après avoir été accusée d’adultère par un procureur local de la ville de Tabriz (nord-ouest).

« La réponse est assez simple », explique l’Iranienne. « C’est parce que je suis une femme, c’est parce qu’ils croient qu’ils peuvent tout se permettre vis à vis des femmes dans ce pays. C’est parce que pour eux, l’adultère est pire que le meurtre – mais pas toutes les sortes d’adultère: un homme adultère peut même éviter la prison alors qu’une femme adultère est, pour eux, la fin du monde. C’est parce que je vis dans un pays où les femmes n’ont pas le droit de divorcer de leurs maris et sont privées de leurs droits basiques ».

Autre révélation contenue dans l’article du Guardian, l’Iranienne explique qu’au moment où le juge a prononcé la sentence, elle n’avait pas compris le mot en langue arabe utilisé en tant que terme légal pour désigner la lapidation.

« Quand le juge a prononcé la sentence, je n’ai même pas réalisé que j’allais être lapidée à mort car j’ignorais ce que signifiait le mot « rajam ». Ils m’ont demandé de signer la sentence, ce que j’ai fait, et quand je suis retournée en prison et que mes codétenues m’ont avertie que j’allais être lapidée, je me suis immédiatement évanouie ».

L’avocat de Sakineh Mohammadi Ashtiani, Mohammad Mostafaei, qui la défendait jusqu’ici gratuitement et qui a permis au monde entier de connaître le triste sort de sa cliente, n’a eu d’autre choix que de fuir l’Iran et de demander l’asile en Turquie, pour éviter de se faire arrêter. Il est sur le point de trouver refuge en Norvège, alors que sa femme, Fereshteh Halimi, est toujours emprisonnée en Iran pour le forcer à revenir.

Sakineh explique pourquoi ils s’en sont pris à lui:
« Ils voulaient se débarrasser de mon avocat afin de pouvoir facilement m’accuser de ce qu’ils voulaient sans que celui-ci puisse s’y opposer. Mais s’il ne m’avait pas tant défendue, j’aurais déjà été lapidée à mort ». Décrivant sa vie de détenue depuis quatre ans dans la prison de Tabriz (nord-ouest), Sakineh avoue être constamment maltraitée par les gardiens de prison.
« Leurs paroles, la façon dont elles me regardent – une femme adultère qui devait être lapidée à mort – est comparable à être lapidée à mort chaque jour ».

Mais depuis cette vaste campagne internationale visant à la sauver, et malgré les dernières nouvelles peu réjouissantes en provenance d’Iran, l’Iranienne ne perd pas espoir.

« Durant toutes ces années, ils (les autorités) ont essayé de convaincre mon esprit que j’étais une femme adultère, une mère irresponsable, une criminelle, mais avec le soutien international, une fois de plus, je me suis retrouvée, moi, innocente ».

Sakineh Mohammadi Ashtiani, a enfin une dernière requête. Et c’est à nous qu’elle est adressée.

« Ne les laissez pas me lapider devant mon fils ».

http://freesakineh.org/fr/